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Les USA vont-ils (encore) tuer un champion chinois de la mémoire ?

Alors que Apple a dû renoncer à se fournir chez YMTC pour cause d’enquête de la part des autorités américaines, son placement sur liste noire de l’entreprise chinoise pourrait aller bien plus loin. Jusqu’à le condamner ?

Huit mois seulement après que des premiers rapports ont fait état d’un possible contrat entre l’Américain Apple et le constructeur chinois de mémoire NAND (stockage, ndr) Yangtze Memory Technology Co. (YMTC), la belle histoire vire au cauchemar pour ce dernier : son placement sur liste noire de la part du gouvernement américain pourrait mettre un terme à sa montée en puissance. Voire à son existence.

Lire aussi : Pourquoi Apple pourrait utiliser de la mémoire chinoise dans ses iPhone (avril 2022)
Lire aussi : Apple va devoir renoncer à utiliser de la mémoire chinoise dans ses iPhone (oct. 2022)

Soucieux de varier ses sources d’approvisionnement, Apple voulait profiter d’un souci de production chez Kioxia pour commencer son partenariat avec le chinois YMTC. Une entreprise fleuron de l’Empire du Milieu qui a su dépasser Micron et Samsung en matière d’empilement des couches de mémoire NAND  3D (plus de 200 couches logiques !). Le souci pour les Chinois, c’est que sa structure est opaque – elle vivrait essentiellement de subventions du gouvernement et une partie de ses équipes proviendrait d’une entreprise que les Américains avaient déjà ciblé…

Une guerre de longue date qui a déjà fait un premier « mort »

Après avoir suspectée puis reconnue coupable d’avoir volé des secrets à l’américain Micron, Fujian Jinhua Integrated Circuit Co. s’est faite mettre au ban par le gouvernement américain. / DR

La première fois que YMTC est passée dans notre radar est antérieure à l’hypothétique contrat avec Apple (avril 2022). C’est en 2018 que l’entreprise fait surface, lorsque les USA suspectent les Chinois de Fujian Jinhua Integrated Circuit Co. (JHICC) de voler son savoir-faire à Micron et qu’ils « torpillent » littéralement celle qui devait être la championne de la mémoire DRAM chinoise. Plusieurs rapports expliquent les activités de cette entreprise qui est propriété du gouvernement chinois et d’autres noms font alors surface : Innotron et YMTC.

Lire aussi : Les USA mettent un frein aux ambitions de la Chine sur les puces mémoire  (nov. 2018)

La question que vous vous posez peut-être est « mais qu’est devenu JHICC ? ». Elle peut compter comme le premier « mort » de la guerre. Elle a quitté et fermé ses sites industriels, qui commencent tout juste à être occupés par d’autres entreprises chinoises (Quliand Electronics, PengXinWei Integrated Circuit Manufacturing Co., etc.). Et il semble que tous ses employés ont quitté le navire… pour aller se recaser dans d’autres entreprises du secteur. Et, comme par hasard, depuis 2018 et le procès de 2020 dans lequel le taïwanais UMC a plaidé coupable d’avoir aidé JHICC dans son vol des données de Micron, c’est YMTC qui est devenue la vedette de la mémoire de stockage en Chine. Jusqu’à être repéré par Apple… pour être finalement écartée.

YMTC va-t-il survivre ?

YMTC avait réussi son pari de venir concurrencer Samsung et les autres dans les puces NAND haut de gamme. Mais elle va sans doute revoir ses plans bien à la baisse. S'adapter ou mourir ?
YMTC avait réussi son pari de venir concurrencer Samsung et les autres dans les puces NAND haut de gamme. Mais elle va sans doute revoir ses plans bien à la baisse. S’adapter ou mourir ?

Alors que sa mémoire de stockage 3D NAND sur 232 couches était censée être la vache à lait de YMTC, le futur de l’entreprise paraît bien sombre. Elle tablait pour une énorme croissance pour 2023, celle-ci va plutôt devoir pour lutter pour sa survie. La source du mal pour le chinois est que son placement sur la liste noire (Entity List) va la priver non seulement de clients occidentaux, mais aussi des machines et logiciels nécessaires à la production de masse de semiconducteurs de pointe.

Si les USA ne sont plus la principale source de production de semi-conducteurs du monde, ils restent (et de très loin) les champions en matière de machines et de logiciels. Ce de manière directe avec des champions – Lam Research, Cadence, etc. – mais aussi de manière indirecte par de nombreux brevets et autres mécanismes de propriété intellectuelle. C’est notamment grâce à ceux-ci qu’ils peuvent empêcher au néerlandais ASML de vendre ses machines au chinois SMIC, interdire au taïwanais TSMC de fabriquer pour la filiale de semi-conducteurs de Huawei (HiSilicon), etc.

Lire aussi : La Chine produit désormais sa propre mémoire DDR4… 100% domestique (juin 2020)

Selon les analystes de TrendForce, mis à part mettre la clé sous la porte et distribuer ses ingénieurs dans une autre structure pour permettre à la Chine de développer un autre champion, YMTC pourrait continuer à vivre en baissant ses ambitions. Et soit se spécialiser dans de la mémoire moins complexe (2D NAND) qui ne menace pas la puissance américano-coréenne, soit renoncer à être un vendeur en propre et rester un simple fournisseur de technologies matures. Dans tous les cas c’est, pour YMTC et pour le gouvernement chinois, un sacré retour en arrière dans le développement d’une filière nationale de mémoire de stockage. Si vous vouliez savoir à quoi ressemble un « missile » de la guerre économique, c’est exactement ça !

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Source : Tom's Hardware (US)


Votre opinion
  1. La vraie question est : les technologies numériques vont-elles tuer toute possibilité, de paix, de coopération, de créativité et de vie ?

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