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Enfin un geek secrétaire du Numérique !

Mounir Mahjoubi a été nommé secrétaire d’Etat chargé du Numérique. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que son parcours d’entrepreneur du web et ses solides connaissances tech tranchent avec le profil de ses prédécesseurs.

Eric Besson, Nathalie Kosciusko-Morizet, Fleur Pellerin, Axelle Lemaire, Christophe Sirugue… les personnalités chargées du numérique depuis 2008 ne se sont jamais distingués par leurs compétences tech. La nomination cette semaine de Mounir Mahjoubi, qui fait figure d’expert, est donc une première qui doit être saluée. Il est rattaché, qui plus est, directement au Premier ministre. Ce qui lui confère davantage de pouvoir qu’Axelle Lemaire, par exemple, qui agissait sous l’autorité du ministre de l’Economie.

L’itinéraire de Mounir Mahjoubi a été décliné à foison depuis mercredi : l’histoire d’un autodidacte à l’ascension sociale fulgurante. Ce Parisien naît en 1984 dans une famille modeste d’origine marocaine. A l’adolescence, il se passionne pour les nouvelles technologies et l’informatique, apprenant notamment à programmer seul. Il travaille dès ses 16 ans au centre d’appel de Club Internet où il offre une assistance technique aux abonnés. Bien que plongé tôt dans la vie active, il bétonne son CV avec des diplômes en Sciences Humaines très éloignés des lignes de code : une maîtrise de droit à La Sorbonne et un master d’économie et de finances à Sciences Po.

Etudiant, travailleur et syndicaliste

L'une des affiches de Ségolène Royal durant la campagne présidentielle de 2007.
DR – L’une des affiches de Ségolène Royal durant la campagne présidentielle de 2007.

Mais c’est en s’engageant syndicalement et politiquement qu’il va se faire remarquer. Au sein de Club Internet, il devient syndicaliste CFDT. Il rejoint aussi le parti socialiste à l’âge de 18 ans où il connaît une première heure de gloire en 2007 en créant le site Segosphere.net avec Thomas Hollande. Un événement fondateur :  c’est la première fois en France qu’un responsable politique en campagne mise sur les réseaux sociaux pour communiquer. Mounir Mahjoubi devient alors un expert dans ce domaine, remettant le couvert en 2012 avec François Hollande dont il développe le site de campagne.

Expert et entrepreneur du web

Entre-temps, il fait ses premiers pas d’entrepreneur web en multipliant les start-ups (FairSens, La Ruche qui dit oui) et les agences de conseil. Il finit par devenir Directeur général adjoint de BETC Digital. Mais la politique le rattrape. Il accepte de succéder à Benoît Thieulin à la tête du Conseil national du Numérique en 2016, dont il démissionne en janvier dernier pour rejoindre la campagne d’Emmanuel Macron.

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Fan de Céline Dion et champion d’éloquence

Ce que l’on connaît moins, en revanche, c’est sa personnalité. Car derrière l’air lisse affiché sur les photos officielles, se cache un tempérament peu ordinaire. A 13 ans et demi, il remporte le concours des Jeunes Inventeurs de Sciences et Vie Junior. Le magazine vient de tweeter ce 19 mai l’article de l’époque où il célébrait le petit Mounir et sa règle à camembert.

On y apprend que le jeune homme est passionné de « mathématiques, électronique et informatique » mais aussi, au passage, qu’il est fan de Céline Dion. Avec les 5 000 francs du prix, il va s’acheter son premier ordinateur. « Vous avez changé ma vie », a déclaré, Mounir Mahjoubi à SVJ sur le réseau social, encore ému 20 ans après l’événement.

Le secrétaire d’Etat au Numérique a aussi remporté le concours de plaidoirie de la Sorbonne en 2004 et le concours d’éloquence de Sciences-Po en 2007. Une vidéo qui traîne encore sur Dailymotion le montre dans une joute oratoire en 2006 à la Sorbonne. On y découvre un Mounir Mahjoubi showman débridé aux accents très théâtraux :

Adoubé par les experts en informatique

Mounir Mahjoubi s’est aussi taillé récemment une jolie réputation auprès des experts informatiques. Il faut dire qu’il a été en première ligne lors du Macron Leaks, alors qu’il était conseiller en stratégie numérique du candidat. Le piratage des messageries de six responsables d’En Marche ! avait donné lieu à un déballage sur le web de documents internes deux jours avant le deuxième tour de la présidentielle. Le mouvement avait déjà subi des attaques informatiques répétées depuis le mois de décembre 2016 et se savait extrêmement menacé. D’où la décision d’adopter des règles très strictes de sécurité informatique. Mais pas seulement. L’idée de Mounir Majhoubi a été de tendre des pièges aux pirates en créant des milliers de faux mails et d’émettre énormément d’informations erronées pour leur faire perdre du temps et semer le doute dans leur esprit sur la véracité des documents récoltés. Il s’en est abondamment vanté dans la presse américaine mais cette stratégie semble avoir fonctionné puisque les hackers n’ont rien trouvé de majeur et n’ont dévoilé leurs données qu’en toute dernière minute, un peu en catastrophe.

Si les connaissances et les compétences de Mounir Mahjoubi ne font aucun doute en matière de numérique, son champ d’intervention reste clairement à définir. Comment le partage va-t-il se faire avec le ministère de l’Economie ? Il devra aussi assumer certains objectifs fixés avec légèreté par Emmanuel Macron durant la campagne. Citons notamment l’objectif intenable de couvrir tout le pays pays en très haut débit fixe en seulement 18 mois ou encore d’obtenir l’accès pour les autorités françaises aux données des messageries chiffrées. Mais son premier défi à relever dans l’immédiat, ce sont les élections législatives puisqu’il se présente dans le XIXe arrondissement de Paris et que son maintien au gouvernement dépendra de sa victoire.

Pose d'affiches en faveur de Mounir Mahjoubi dans le 19e arrondissement de Paris.
La République en marche. – Pose d’affiches en faveur de Mounir Mahjoubi dans le 19e arrondissement de Paris.

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Amélie Charnay