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Hadopi et Megaupload, le piratage se réorganise mais ne régresse pas

Trois mois après la fermeture du numéro 1 du téléchargement direct, Hadopi publie une étude qui dessine par le menu les traits de l’économie générée par les sites et services illégaux et dresse le décor fluctuant de l’après-Megaupload.

Le 20 janvier dernier, le FBI faisait fermer Megaupload et sa nébuleuse de sites, dont Megavideo, soufflant le froid sur tout un mode de consommation illégale de contenus numériques au niveau mondial. Quelque trois mois plus tard, Hadopi publie une étude, commandée le 9 janvier dernier à l’Idate et baptisée avec concision « Etude du modèle économique de sites ou services de streaming et de téléchargement direct de contenus illicites ». Au vu de la date de commande, l’après-Megaupload n’était pas au cœur des préoccupations de la Haute Autorité. Pour autant, ce point a été traité de manière partielle dans la dernière partie de cette étude.

Déstabilisation

On y apprend ainsi que le paysage de l’économie du partage de contenus illicites n’est pas « totalement stabilisé ». Les acteurs restants ayant généralement ajusté leurs offres pour éviter une fermeture « manu militari » : fin de la rémunération des personnes qui téléversaient des contenus, désactivation des fonctions de partage, augmentation des limitations de débit ou de temps de visionnage, etc. Certains acteurs majeurs, comme FileServe ou VideoBB, ont même, selon l’étude, opté « pour la suppression pure et simple de la quasi-totalité des contenus » illégaux. « Seuls restent les quelques vidéos amateurs accessibles à partir de leurs sites communautaires », poursuit l’Idate.


Une de l’étude commandée à l’Idate par la Hadopi/

Redistribution des cartes

Pour autant, cette étude de 136 pages, en comptant les feuillets blancs, ne dresse pas un tableau dévasté de ce double monde « parallèle », constitué par les services de téléchargement et de streaming. « Le paysage est (…) fortement modifié dans le domaine du streaming, les nouveaux leaders (…) étant auparavant des acteurs marginaux. » La consommation de contenus y a fortement baissé, du fait, notamment, de l’adoption de modèle d’accès par « abonnements premium ». Une généralisation de ce modèle économique qui, s’il se confirmait, « entraînerait un endiguement durable de l’usage », peut-on lire dans l’étude.

Pour ce qui concerne le téléchargement direct, « la réorganisation est (…) plus simple, le paysage étant nettement plus atomisé avec des acteurs majeurs (…) avant la fermeture de Megaupload ». Et l’étude de constater un peu plus loin que « Les usages ne semblent pas avoir réellement évolué, le trafic migrant de Megaupload vers d’autres acteurs clés du téléchargement direct. » Car les sites de référencement, qui sont autant d’indicateurs menant aux contenus, s’organisent pour reconstituer leurs catalogues en s’appuyant sur les services qui perdurent.

L’Idate note un point intéressant, qui montre que l’action du FBI est également dissuasive en ce domaine : « Tous les acteurs ne semblent pas vouloir ou pouvoir absorber tout ce trafic. » Pour autant, l’étude ne manque pas de préciser que la demande existe toujours. Car si la réorganisation des sites de référencement « a perturbé le marché (…), le trafic augmente sur les services qui restent actifs ».


Megaupload est fermé et l’illimité accessible à tous avec lui ?

Nouveau départ ?

Et l’étude de conclure : « En termes d’usages, on peut estimer que le téléchargement direct de contenus (…) est en voie de réorganisation plutôt que de régression. » La fermeture du numéro 1 du téléchargement direct ne serait finalement qu’un coup dans l’eau ? Pas totalement, car le rapport note que « La qualité de service en termes de débits disponibles a nettement diminué depuis la fermeture de Megaupload. » Le piratage continuerait-il donc, mais moins vite ? Par ailleurs, il ne parle pas du P2P et d’une éventuelle recrudescence de ce mode d’échange de fichiers. Un manque d’autant plus regrettable que l’Hadopi se félicitait encore récemment d’avoir fortement contribué à la baisse de l’utilisation de ses services pour le piratage de fichiers soumis aux droits d’auteur ou voisins.

Quoi qu’il en soit, les conclusions de l’étude devraient alimenter les travaux de la mission « Streaming et téléchargement direct de contenus illicites », confiée à Mireille Imbert-Quaretta (présidente de la Commission de protection des droits) par la présidente de la Hadopi. Jusqu’à présent, la Haute Autorité ne surveillait que les services P2P dans le cadre de son effort « pédagogique », on peut penser que les choses vont être amenées à changer.

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Pierre Fontaine