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À quoi pourrait bien ressembler une salle de classe du futur ?

En pleine Savoie, l’école de commerce INSEEC-Chambéry est devenu un terrain d’expérimentation tech, avec la complicité de la start-up Pixminds et du laboratoire de recherche Liris. Visite guidée de la « classe du futur ». 

« Vous entrez dans un laboratoire grandeur nature ! » Lorsqu’il nous invite à entrer dans la « classe du futur », David Bouvier, le directeur de l’INSEEC-Chambéry est aussi emballé qu’au premier jour. Ouverte fin août sur le campus savoyard, la salle de 100 mètres carrés où s’étalent 24 mètres carrés d’écrans tactiles imbriqués entre deux murs, est l’attraction de la rentrée. Du pur « made in » Savoie. 

Basé sur la technologie Ark 

Avant le confinement, le concept était déjà dans les tuyaux mais la pandémie a accéléré le projet. Développé en collaboration avec la start-up Pixminds et les scientifiques du Liris (Laboratoire d’InfoRmatique en Image et Systèmes d’information), le prototype de ce « tableau noir 2.0 » est basé sur la technologie Ark – qui a valu à la jeune pousse d’être primée au CES 2019. Après avoir essuyé un premier échec, le produit conceptualisé au milieu du Technolac a enfin remporté au printemps dernier l’appel d’offre de la région Auvergne-Rhône-Alpes. Alimentés sur secteur, les six écrans et six projecteurs intégrés de la « classe du futur » savoyarde consomment environ 3226W.

Face à l’écran géant, une trentaine de chaises colorées disposées aléatoirement sont prises d’assaut par les étudiants. Pour l’instant, un seul et unique cours a été décliné spécialement pour cette salle : les bases du marketing. David Bouvier, qui a la double casquette de chef d’établissement et de prof de marketing, se transforme alors en « showman » comme il aime à le dire. Au fil du cours calibré pour durer 1h30, les élèves de l’école de commerce voient défiler des images, des vidéos, des pop-up, des textes colorés. Tout appelle l’oeil. « Le temps moyen d’attention est de douze minutes, tout l’enjeu est de la garder », répète celui qui se présente comme un « passionné de l’enseignement ».

Un badge pour le plus attentif 

Captivés oui, mais pas passifs. Dans la « classe du futur », l’enseignant fait participer ses étudiants. QCM, jeux, test de rapidité… il faut stimuler l’auditoire. Celui qui gagne aura comme récompense un « badge ». Inspirés des techniques de gamification de l’apprentissage, ces petits tests grandeur nature sont un moyen de vérifier que les notions ont bien été intégrées, tout en amenant du challenge. « La ludification est intéressante et performante pour transmettre dès lors qu’elle est personnalisable », nous explique Jean-Charles Marty, maître de conférence en informatique à l’université de Savoie et chercheur au Liris qui dirige actuellement une thèse sur ce sujet.

Pierre Thieulin-Pardo / 01net.com – Une dizaine d’élèves suivent le cours de marketing.

Mêlant technologie, jeu et apprentissage, la « classe du futur » n’est donc pas seulement une salle de cours, mais aussi un espace d’expérimentation tech, un local d’étude comportemental et même un show room pour les investisseurs. Pendant le cours, une caméra enregistre ce qu’il se passe. Les données – dont on nous assure que tous les étudiants sont au fait – seront en suite étudiées par les équipes de Liris. L’objectif ? Savoir ce qui marche ou pas. « On est encore dans la phase d’expérimentation », se réjouit le chercheur. 

« C’est du sur-mesure ! »

Côté technologique, les équipes de Pixminds répètent, elles aussi, à l’envi que la solution est ajustable. « On peut mettre des écrans plus larges, plus hauts, sur le sol, sur le plafond… C’est du sur-mesure ! » Une adaptabilité qui a forcément un prix. « Pour une classe “complète” comme celle de l’INSEEC-Chambéry, on est aux alentours de 300 000 euros », détaille Cyril Laurent, directeur marketing chez Pixminds. « Mais ça peut commencer à 50 000 euros pour un écran de 5 mètres carrés. » Peu d’universités pourront a priori se le payer. 

Même si le scientifique Jean-Charles Marty admet que le produit demeure « relativement cher, l’expérimentation “classe du futur” vaut la peine. D’ici un an, la salle deviendra intelligente. Elle devrait être capable de dire ce qu’il se passe (un tel est en retard, un tel est en difficulté, un autre s’ennuie, etc.) que l’enseignant ne voit pas et permettre ainsi d’adapter le cours. » Pour lui, ce n’est qu’une solution complémentaire. Il ne s’agit pas de remplacer les cours traditionnels.

« Imaginez Elon Musk à Chambéry ! »

De son côté, le réseau d’écoles de commerce INSEEC voit grand. « Pour l’instant on est limité à cette salle, mais l’idée c’est que demain d’autres élèves puissent participer à distance avec une tablette ou un smartphone », détaille le directeur de l’établissement savoyard, récemment désigné responsable de la numérisation du groupe.  « Lorsqu’on déploiera la “classe du futur” sur nos campus de Bordeaux, Paris, Monaco, Genève, on pourra même assister aux mêmes conférences en simultané. Imaginez Elon Musk vient à Chambéry, tout le monde en profite ! » 

Lorsqu’on interroge les étudiants qui ont bien voulu faire les cobayes du futur, les retours sont unanimes. Tous, sortent de la classe -vite (ça reste un cours!)- mais enjoués et ravis de participer à l’expérience. Ils ont hâte d’en voir plus… nous aussi. 

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Marion SIMON-RAINAUD