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Voiture autonome : comment Uber  aurait volé les secrets de Google

Le géant du Web poursuit la start-up parce qu’elle aurait copié son LIDAR, un système de télédétection indispensable à la navigation des véhicules sans conducteurs.

C’est une histoire d’amour qui finit mal. En 2013, Google avait investi 250 millions de dollars dans un prometteur service de chauffeurs privés : Uber. L’un des dirigeants d’Alphabet, David Drummond, siégeait même au conseil d’administration de la start-up jusqu’à l’été dernier. Mais aujourd’hui, le divorce est définitivement consommé. Face à face : Waymo, la filiale d’Alphabet consacrée aux voitures autonomes et Otto, celle d’Uber consacrée au même domaine.

Waymo porte en effet plainte contre Otto et Uber pour détournement de secrets commerciaux, contrefaçon et concurrence déloyale. Otto aurait volé sa technologie de LIDAR (Light Detection and Ranging), un système de télédétection indispensable aux voitures autonomes qui utilise les réflexions d’un laser pour mesurer les distances. Ce capteur est indispensable à la navigation des véhicules sans conducteur car il permet, en plus des caméras, de détecter et d’évaluer la forme, la vitesse et le mouvement de quantité d’obstacles : cyclistes, véhicules ou encore piétons.

Un véritable roman d’espionnage

L’origine de la plainte tient presque du thriller. Dans un post mis en ligne sur le site medium, l’équipe de Waymo raconte qu’elle a reçu récemment un mail d’un fournisseur de composant, qui il comportait en pièce jointe qui ne lui était pas destinée. Un document précieux, puisqu’il s’agit des plans du circuit intégré du LIDAR de la filiale d’Uber ! Et immédiatement, les gens de Waymo se rendent compte que c’est une copie de celui de Google.

C’est là que l’enquête commence. En fouillant dans son système informatique, Waymo s’aperçoit qu’en décembre 2015, l’un de ses cadres, l’ingénieur Anthony Levandowski, avait téléchargé sur son ordinateur portable 14 000 fichiers hautement confidentiels et 9,7 Go de données portant à la fois sur les secrets commerciaux et de fabrication de Waymo, et notamment le design et le circuit imprimé du LIDAR.

L'ingénieur Anthony Levandowsky.
DR – L’ingénieur Anthony Levandowsky.

Levandowski a ensuite transféré le tout sur un disque dur externe, puis tenté d’effacer les traces de son vol informatique, notamment en reformatant son ordinateur.

Quelques jours après seulement, le 14 janvier 2016, Levandowski rencontre des cadres dirigeants d’Uber, au siège de l’entreprise. Le lendemain, il crée sa propre société 280 Systems, qui sera rebaptisée plus tard Otto.

Le 27 du même mois, l’ingénieur démissionne. Hop, au mois d’août suivant, Uber rachète la start-up de Levandowsky et son LIDAR très performant !

Et ce n’est pas tout : d’après Waymo, d’autres employés de Google auraient dérobé des informations complémentaires par la suite avant de prendre la poudre d’escampette et d’être embauchés chez Otto. Pour Waymo, c’est donc clair : ce plan machiavélique destiné à voler sa précieuse technologie a été minutieusement planifié par Levandowski et Uber.

Uber s'est notamment associé à Daimler pour développer la voiture autonome.
Uber – Uber s’est notamment associé à Daimler pour développer la voiture autonome.

« Notre société mère Alphabet travaille depuis longtemps avec Uber dans de nombreux domaines et nous n’avons pas pris cette décision à la légère. Cependant, compte tenu du vol flagrant de notre technologie, nous n’avons pas d’autre choix que de défendre l’investissement et le développement de cette technologie unique », a déclaré Waymo.

Levandowski est-il le véritable père de la Google Car ?

Google a consacré des millions de dollars et embauché des centaines d’ingénieurs pour développer son système de voiture autonome. Soit huit ans d’efforts soutenus qui ont abouti notamment à ce fameux LIDAR propriétaire.

Uber, lui, ne s’est vraiment lancé dans l’aventure qu’en février 2015, annonçant un partenariat avec l’Université de Carnegie Mellon. Mais curieusement, il a pu lancer son service de taxi sans chauffeur en expérimentation dès septembre 2016. Une émergence éclair qui suscite aujourd’hui la suspicion. Pour sa défense, Uber se contente pour le moment de déclarations minimalistes. « Nous prenons très au sérieux les allégations faites contre des salariés d’Otto et Uber, et nous allons examiner attentivement la question », a confié la start-up à l’AFP.

Il n’empêche que Levandowski est une figure majeure de la conduite autonome, selon le New-York Times. Dans un article datant de 2014 du site IEE Spectrum, on apprend aussi qu’il a commencé à travailler sur le sujet il y a plus de dix ans. Il s’est distingué lors d’un concours de la DARPA en 2005 à l’occasion duquel il a développé son premier véhicule test. A la suite de cela, il a fondé sa start-up 510 Systems, raflée par Google en 2007.

Ce serait même Levandowski qui aurait permis de développer la première Google Car. Mais son nom n’a jamais été mis en avant par Google. Aujourd’hui, il est vice-président d’Otto et reporte directement au PDG et fondateur d’Uber Travis Kalanick. Peut-être y a-t-il aussi trouvé la reconnaissance qui lui manquait chez Waymo…

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Amélie Charnay