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Les ambitions informatiques de Huawei : rencontre exclusive avec le président Europe du géant chinois

Dans une interview exclusive à la presse française, le patron européen de Huawei confie ses objectifs dans le domaine de l’informatique. Après s’être fait torpiller sa division téléphonie mobile par le gouvernement Trump, le chinois ne semble pas chavirer le moins du monde.

« Nous voulons devenir numéro 1 de tous les marchés sur lesquels nous entrons » : dès le début de notre entretien exclusif avec William Tian donne le ton. Posé et agréable, celui qui dirige les activités du géant chinois Huawei pour l’Europe de l’Ouest ne gonfle pas le torse, mais transpire des objectifs ambitieux.

Huawei, ex-numéro 1 mondial des smartphones, qui a été quasiment rayé de la carte du segment par les sanctions américaines, ne semble pas le moins du monde découragé. Véritable machine de guerre technologique, premier acteur de R&D en Chine, Huawei prend un virage PC qui se perçoit directement sur son stand du MWC de Barcelone : peu de smartphones (et peu de gens autour), mais une horde de nouveautés informatiques.

Nouvelle itération du Matebook X Pro, tout-en-un façon iMac (mais bien plus beau !), clone de Surface, grand saut dans l’impression laser, calepin électronique e-ink à la reMarkable 2, mini-tour pour les marchés d’entreprises, etc. le déroulé de produits est impressionnant.

Sanctions américaines : aucune rancune perceptible

Quand on titille M. Tian sur le risque, pour cette entreprise chinoise, d’une stratégie s’appuyant à nouveau sur des technologies américaines – puces Intel et AMD, Microsoft Windows à tous les étages – le quinquagénaire se veut rassurant. « Tout d’abord nous ne nous considérons pas comme une entreprise chinoise, mais comment une entreprise internationale basée en Chine. Nous avons des centres de R&D dans de nombreux pays (dont la France, ndr), sommes présents dans 170 pays et touchons plus de trois milliards de consommateurs », déroule-t-il tranquillement.

Après avoir vu le déroulement du « Huawei Gate » pendant quasiment deux ans, nous renchérissons en pointant tout de même qu’une stratégie Chromebook (ou Harmony OS + puce ARM américaine ou non), représente moins de risque de coupure de technologie américaine, etc. Mais M. Tian et Huawei ne mangent pas de ce pain-là. « Nous sommes une compagnie globale, nous croyons dans le système de libre-échange, nous voulons développer des systèmes ouverts. Et nous travaillons main dans la main avec nos partenaires technologiques (américains, ndr) ».

Un flegme qui fleure bon l’image que nous, occidentaux, entretenons (à tort ou à raison) de la pensée confucéenne : pas de réaction violente ou de colère, Huawei joue sur le long terme. « Sans rancune » serait-on même tenté d’ajouter.

Apple toujours en mètre étalon

Avec un renforcement de sa gamme PC et cette volonté d’être « numéro 1 dans tous les marchés », se pose alors la question de la place de Huawei dans un écosystème déjà riche en acteurs. Et là, une marque revient plusieurs fois dans la conversation : Apple. « Vous me demandez quels sont nos atouts ? Le premier est clairement le design : vous connaissez une autre marque qui propose des PC aussi beaux qu’Apple ? Aucun autre acteur du PC que Huawei ne peut concourir avec Apple sur ce plan », professe M. Tian.

« Ensuite, il faudra compter sur nos innovations issues du mobile que nous allons infuser dans nos PC autour de l’imagerie, de l’IA, ou même du matériel avec des écrans encore plus bord à bord », promet M. Tian. En refusant d’annoncer quelles technologies pourraient rapidement arriver. 

Infuser les technologies mobiles dans les PC

« Notre troisième force est notre savoir-faire dans l’interconnexion mobile + PC », continue-t-il. Loin d’être anecdotique, cette symbiose logicielle que Huawei pousse de plus en plus se retrouve aussi chez Samsung qui propose, lui aussi, des logiciels d’interconnexion.

« Du scan de QR code au fait qu’il soit toujours dans la poche, le smartphone sait faire beaucoup de choses que ne peut pas faire votre ordinateur. Nous avons la maîtrise des deux univers et, en nous concentrant sur les services rendus aux utilisateurs, nous voulons proposer les meilleurs produits et les meilleurs PC, tout simplement », ajoute-t-il.

Les meilleurs PC, mais sans une course aux composants. En effet, en regardant les feuilles de route de lancement produits ainsi que la liste des composants, l’analyste éclairé constate deux choses : le Matebook X Pro en version 2022 sera non seulement lancé seulement au 3e trimestre de cette année, mais il sera de plus équipé d’une puce vieille d’un an (Core 11e gen) et non d’une puce Intel de 12e génération.

Volonté de Huawei ? Positionnement moins prioritaire dans les carnets de commandes d’Intel ? « Je ne peux pas répondre à ces questions de choix de composants, mais je veux juste spécifier que nous ne cherchons pas la course aux spécifications. Nous avons des technologies uniques, de refroidissements, etc. Mais toutes nos technologies et nos choix se concentrent non pas sur un ou deux indicateurs, mais sur l’expérience utilisateur globale », conclut-il. Une approche qui n’est pas sans rappeler celle… d’Apple.

Comme dans le monde des smartphones, où le chinois avait fini par dépasser le « maître », Huawei ambitionne donc de se positionner en « Mac » du monde du PC. Avec le même succès que son expérience mobile ?  

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