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Epidémie de clients

Le virus ILOVEYOU s’est propagé en quelques heures sur la planète entière. Devenu l’un des patronymes les plus célèbres du Net, il révèle ainsi la puissance et la dangerosité du marketing viral. Par Jean-Baptiste Dupin.

On estime qu’une bonne campagne de publicité électronique par bannières génère environ 1 % de clics. Autant dire que l’efficacité de ce moyen de promotion, pourtant très prisé, est assez limitée. A cela viennent s’ajouter des campagnes off line, plus efficaces en matière de notoriété, mais aux coûts démesurés. Une autre solution, peu coûteuse et redoutablement efficace existe pourtant : le ” marketing viral “.Ce nom provient d’une analogie avec la façon dont peuvent se propager les virus informatiques. L’efficacité d’ILOVEYOU est due en partie aux m?”urs du Net, avec l’envoi à ses amis de blagues, d’images, de liens, de fichiers exécutables… L’habitude et l’imprudence ont fait le reste : l’auteur du message était connu, on a ouvert la lettre d’amour, et patatras !Cette pratique, si elle peut se révéler néfaste dans le cas d’un virus, peut, en revanche, permettre à une marque de se faire connaître mondialement et très rapidement. C’est le bouche à oreille magnifié par les habitudes de la communication numérique. Des outils aussi connus que Hotmail ou ICQ se sont ainsi développés mondialement sans aucune campagne publicitaire, seulement par une diffusion de proche en proche auprès d’un nombre toujours croissant d’utilisateurs.De la même façon, une offre promotionnelle particulièrement alléchante, un site original, une petite animation amusante, trouveront un relais naturel parmi les internautes. La rumeur peut vite faire bien plus que des millions engloutis dans un plan marketing classique. Les spots publicitaires pour les bonbons KissCool, mettant en scène les Schmurks et les Blemischs, auraient-ils eu le même impact s’ils n’avaient pas été abondamment diffusés sur Internet ?
Une stratégie de marketing viral consiste à initier de tels mouvements de propagation, avec une issue aussi incertaine qu’elle peut se révéler triomphale. Fragile, elle dépend complètement des internautes et, de ce fait, est totalement incontrôlable. On lance l’opération et advienne que pourra, le meilleur comme le pire.Si les ficelles sont trop grosses, si la volonté de manipulation est trop évidente, si cela ressemble un peu trop à du spamming déguisé (envoi de mails publicitaires non sollicités), l’arme risque de se retourner contre l’entreprise. Ainsi, à l’occasion de l’ouverture de son magasin de San Francisco, Ikea avait proposé à ses clients jusqu’à 75 dollars de remise, s’ils transféraient une carte postale électronique d’information à dix de leurs amis. Au bout d’une semaine, le tollé provoqué par les 37 000 messages ainsi diffusés avait incité le fabricant de meubles à faire machine arrière, et avait terni durablement son image.
Redoutable, le marketing viral l’est d’autant plus qu’il n’existe pas de vaccin protégeant ceux qui souhaiteraient lutiliser.Prochaine chronique le jeudi 8 juin 2000

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Jean-Baptiste Dupin, journaliste