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La loi au secours de la vie privée des internautes américains

Les élus des États-Unis travaillent sur une vingtaine de projets pour réglementer la revente de fichiers clients. S’oriente-t-on vers une Cnil à l’américaine ?

Le 13 mars dernier, les représentants de la puissante FTC (Federal Trade Commission) ont tenu une réunion publique sur la protection des informations privées relatives aux consommateurs sur internet. L’agence gouvernementale s’intéressait aussi à la constitution de dossiers pour chaque acheteur. Un sujet d’une actualité brûlante, à l’heure où de nombreuses dot-com aux finances fragiles envisagent la cession de leurs fichiers clients. À l’issue de cette rencontre, les progrès sont réels : les partisans du respect de la vie privée ne contestent plus la nécessité, évoquée par les grands acteur du net, de constituer des dossiers clients pour forger des liens commerciaux durables. ” Il faut [simplement] que les consommateurs soient associés aux prises de décisions “, a souligné Mary Culnan, une universitaire spécialiste de ces questions. Mais on revient de loin.

La revente des données personnelles

Il y a quelques mois, les juristes de la FTC ont ainsi épinglé la firme Toysmart, un supermarché de jouets sur le net. En faillite, la société s’était offert une publicité dans le Wall Street Journal pour céder au mieux disant sa liste de 250 000 clients. Elle s’était pourtant engagée à ne rien dévoiler de leur profil ! Après intervention de la FTC, Disney, l’un des principaux actionnaires de Toysmart, a déboursé 50 000 dollars pour récupérer la banque de données et la détruire. Un épilogue heureux, qui n’a pas suffi à rassurer les juristes de la FTC.Début janvier, ils ont dénombré 175 sociétés dont la seule activité consiste à recueillir les informations financières sur les internautes dans le but de les revendre. Ils ont donc demandé au Congrès de légiférer sur la question, afin de faciliter leur contrôle et leur intervention. Une vingtaine de projets de loi sont en cours d’élaboration. Parmi eux, la proposition du sénateur républicain John McCain, candidat malheureux, à l’élection présidentielle. Il prévoit une obligation d’information des clients pour les sociétés de commerce électronique et la possibilité, pour tout individu, de refuser à une entreprise le droit d’utiliser des informations le concernant. Le projet McCain a la cote auprès des lobbies de l’industrie high-tech. Les représentants de l’AEA, l’une des plus vieilles associations regroupant fabricants d’ordinateurs et éditeurs de logiciels, se sont récemment déclarés favorables à une loi fédérale unique… En effet, les industriels n’ont aucun intérêt à ce que chaque État se mêle de réglementer un média de masse tel qu’internet. La constitution d’un imbroglio législatif les obligerait, en réalité, à s’aligner sur les lois les plus contraignantes pour conserver leur audience.

Un véritable débat citoyen

Mais la partie n’est pas gagnée, et le débat s’anime sous l’impulsion, notamment, de la Privacy Coalition, qui réunit pas moins de dix-neuf structures (des associations de consommateurs, le syndicat UAW, l’Electronic Privacy Information Center, la Privacy Foundation, etc.) pour promouvoir une réglementation plus sévère. Partie prenante, le Démocrate Ernest Hollings, par exemple, veut obliger les commerçants du net à obtenir l’accord préalable des consommateurs avant de pouvoir vendre leurs fichiers. L’élu souhaiterait encore limiter le type d’informations recueillies par les entreprises et les contraindre à indiquer systématiquement l’objet de la collecte aux clients.En conclusion, l’exigence de protection de la personne privée finit par poser outre-Atlantique la question complexe d’une réglementation nationale pour le net.

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Caroline Talbot, à New York