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Jean-François Lansard (CXP) : ” Les DRH ne voient pas la complexité informatique des trente-cinq heures “

Au sein des ressources humaines, la réduction du temps de travail pose problème. Plus en termes de projets que de choix de progiciels.

Quelles difficultés posent les trente-cinq heures à l’informatique des ressources humaines ?Les entreprises ont été plus ou moins obligées d’implémenter des modules de gestion pour le contrôle des temps, les plannings et la planification. La loi demande seulement que les temps soient surveillés de façon fiable et honnête. Elle n’impose pas une méthode. Mais pratiquement, comme il y a obligation de suivi, les entreprises sont de plus en plus amenées à installer un progiciel. Le résultat du contrôle sera alors plus difficile à contester.De nouveaux types d’outils sont-ils apparus à l’occasion des trente-cinq heures ? Je n’ai pas encore vu d’outils spécifiques à la gestion des trente-cinq heures. La seule nouveauté, c’est l’intégration dans un même progiciel de la gestion du temps et de la paie. Historiquement, c’étaient deux logiciels indépendants. Les trente-cinq heures ont un impact sur le bulletin de paie. Il faut y intégrer des modifications réglementaires, recalculer le complément différentiel au Smic, les nouveaux taux pour les heures supplémentaires, prendre en compte les aides patronales, l’implémentation d’un compte épargne temps, l’annualisation en heures, très difficile à calculer, etc. D’un côté, les éditeurs assurent une maintenance légale. Ils envoient un complément de version correspondant aux nouveaux textes de loi ?” une version ou juste un modèle à adapter par l’entreprise. De l’autre, certains proposent de changer le paramétrage. Ce qui constitue en fait l’essentiel des solutions. Mais les éditeurs ont un peu joué sur l’ambiguïté. Quand certains disent prévoir un module trente-cinq heures, il s’agit simplement de changer les paramètres. Et encore, nous ne parlons que de la paie. Or, quand des éditeurs annoncent une version trente-cinq heures de leur logiciel, ils font parfois référence à de la gestion de temps. On ne peut pas parler d’outils propres à la réduction du temps de travail. Mais il existe de vrais projets trente-cinq heures.La réduction du temps de travail rend-elle l’informatique indispensable ? Les trente-cinq heures diminuent le temps de travail en échange de plus de flexibilité et d’horaires individualisés. L’informatique est donc nécessaire. Je ne vois pas comment, par exemple, on peut mettre en place un compte épargne temps sans progiciel, car cela fait intervenir des notions de temps et d’argent. La question est de savoir si un jour épargné en 2000 vaudra un jour et demi en 2001. Or, autant les accords sont signés, autant ils ne sont pas encore appliqués sur le plan informatique. Les mises en ?”uvre vont donc s’étendre encore tout au long des deux ans qui viennent.La gestion de plannings pose-t-elle aussi de gros problèmes ? Elle existait déjà pour des services comprenant des équipes tournantes. Avec les trente-cinq heures, c’est toute l’entreprise qui a des effectifs tournants. Il faut donc qu’un responsable sache quand les gens prennent leurs jours de réduction du temps de travail. Soit il gère avec Excel, soit il se sert d’une fonctionnalité d’un logiciel. La plupart utilisent Excel. La planification, elle, est un problème nouveau. Il s’agit d’établir des effectifs en fonction d’une charge de travail prévisible, et en intégrant différentes contraintes : celles des trente-cinq heures, des équipes, des effectifs, des dispositions légales du choix des personnes… Cela aboutit à des projets très techniques, difficiles à mettre en ?”uvre au quotidien.Les directeurs de ressources humaines anticipent-ils ces difficultés ? Du point de vue de l’informatique, les directeurs des ressources humaines rêvent tout éveillés. Ils n’ont pas conscience de la complexité de la tâche. Normal : ce n’est pas leur travail. Il existe quelques cas où le directeur des ressources humaines qui prépare un accord trente-cinq heures est tenu informé des contraintes informatiques. L’accord qu’il va négocier en tiendra alors compte. Mais, en règle générale, il ne s’en préoccupe pas. Une entreprise peut donc très bien se retrouver avec un accord inapplicable. Sinon, le plus long, dans un projet de ce type, c’est la spécification du cahier des charges. Une fois que cela est fait, tout est terminé en deux ou trois mois.Les ressources humaines et l’informatique arrivent-elles à s’entendre facilement ? Historiquement, les directeurs des ressources humaines et les directeurs informatiques ne se sont jamais beaucoup aimés. Mais cela a changé. Un peu grâce à internet. L’informatique fait moins peur aux directeurs des ressources humaines ?” même s’ils ne sont pas mieux familiarisés avec elle qu’avant. Toujours est-il qu’entre eux et les directeurs informatiques l’écoute s’améliore. En dix ans, la décision d’acheter un progiciel est passée de la direction informatique à l’utilisateur. Et l’on commence à voir des informaticiens rattachés à des services de ressources humaines. C’est une bonne évolution.

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Arnaud Devillard