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Jouez sponsorisé

Le monde du jeu vidéo, de même que bien d’autres secteurs, vit en partie de la pub. Décryptage.

On compare souvent l’industrie du jeu vidéo à celle du cinéma. Moyens de production, techniques de narration et de mise en scène… Les similitudes sont en effet nombreuses. Mais aujourd’hui, un autre point commun, peut-être un peu plus discutable, se fait jour : l’intrusion de plus en plus fréquente de la publicité. Comme dans un film, on met en avant des produits de marque et l’on intègre des panneaux publicitaires aux décors.Mais ‘ la publicité dans les jeux vidéo existe depuis très longtemps, rappelle François Denoeux, responsable du développement B2B média chez Ubisoft. Au départ, dans les jeux de sport et les courses automobiles, il y avait des autopromotions autour du terrain ou sur les voitures. Pour plus de réalisme, nous sommes passés à de vraies publicités. Et désormais, quand le personnage incarné par le joueur se promène dans une rue, il y a des affiches publicitaires. ‘ Recherche du réalisme, sans doute, mais aussi des revenus qui en découlent. Car, bien entendu, la publicité dans les jeux rapporte beaucoup aux éditeurs. ‘ Financièrement, le prix varie entre quelques dizaines de milliers d’euros et quelques centaines de milliers d’euros par marque et par jeu ‘, reconnaît encore François Denoeux.

Des pubs subies plus que choisies

En réalité, les annonceurs n’ont pas eu à se faire prier pour s’installer sur ce nouvel espace. Avec un titre à succès, les marques sont sûres de toucher plusieurs centaines de milliers de joueurs à travers le monde. Tous reverront leurs publicités chaque fois qu’ils joueront. ‘ Le jeu vidéo met le contact [ndlr : le joueur] dans la peau d’un acteur qui choisit de voir la publicité ou non ‘, renchérit François Denoeux. Vraiment ?Quand le produit se niche dans l’interface du jeu, comme ce fut le cas pour les deux premiers Splinter Cell où le héros devait utiliser son PDA ?” d’abord un Palm, puis un Sony-Ericsson ?” pour progresser, le joueur n’est acteur de rien du tout : il doit subir la publicité.Ubisoft n’est pas le seul éditeur à ajouter de la publicité dans ses jeux. Certains, comme Electronic Arts, sont même devenus de véritables spécialistes. Mais ils préfèrent garder leur stratégie de travail secrète. ‘ Désormais, les agences et les marques nous appellent pour savoir dans quels jeux elles peuvent participer. Nous voyons avec les studios de développement où les intégrer ‘, avoue François Denoeux.

Pas de publicité pour les elfes

Ce placement a des limites car il doit être réaliste pour ne pas gêner l’immersion du joueur. La publicité ne peut donc s’installer que dans des jeux contemporains ou futuristes. Pas question donc de voir Napoléon ou un Elfe boire une marque de soda ! De plus, pour les jeux hors connexion, la localisation est souvent impossible.Les placements de produit étant réalisés par les studios de développement, ils sont intégrés au décor avant que la traduction ne soit effectuée dans chaque pays.

Des spots adaptés car géolocalisés

Pour obtenir une vraie localisation des publicités, il faut se tourner vers les jeux en ligne. Là, des spécialistes, tels Massive Incorporated ou IGN, les intègrent selon la nationalité du joueur. ‘ Nous l’identifions grâce à son adresse IP ou grâce à la langue qu’il a choisie à l’installation du jeu, si celui-ci a été traduit ‘, confirme Nicholas Longano, président du ‘ nouveau média ‘ chez Massive Incorporated. Cette méthode crée en outre une véritable interaction avec le joueur. ‘ Nous avons des publicités 3D qui interagissent avec le joueur ?” renvoi vers un mini-site pour certaines marques de produits sportifs par exemple. Qu’il clique sur les publicités ou non, cela n’entravera pas sa progression dans le jeu ‘, explique Nicholas Longano.Techniquement, la société fournit des codes aux développeurs de jeux, qui les implantent là où devront se trouver les pubs. Une fois le joueur connecté, Massive lit ces codes et fournit l’image correspondante. Par exemple, une publicité pour un soda, et non celle d’un 4×4, va s’afficher sur un distributeur de boissons. Autre exemple, une campagne pour une nouvelle saison de la fameuse série TV, Lost, n’est visible que par les joueurs des pays qui diffuseront la série prochainement.Cette adéquation presque parfaite entre publicité et cible expliquerait, selon Nicholas Longano, sa réussite : ‘ Nous avons un taux de visibilité plus élevé que n’importe quel autre support. Dans le domaine de l’automobile, la télévision ou la téléphonie, toute marque s’intéressant aux hommes entre 18 et 44 ans est un client potentiel. ‘ Selon lui, la publicité en jeu représenterait entre 20 % et 30 % du chiffre d’affaires généré par un titre. Et d’admettre enfin que ‘ la pub rapporte de 1 à 2 dollars chaque fois qu’un joueur joue ‘.Succès que confirment les chiffres des statistiques économiques. De 9 millions d’euros en 2004, le budget mondial de la publicité dans les jeux vidéo devrait atteindre 1,5 milliard d’euros en 2010, selon le cabinet d’études Yankees Group.

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Stéphanie Chaptal