Chaque produit a son histoire. C’est ce que disent tous les discours marketing. La Beam de Sonos est née d’une constatation. « Nous avons réalisé que nos utilisateurs sont de plus en plus des jeunes urbains. Si vous pensez à notre utilisateur type, il aime la musique et vit à Berlin, New York ou San Francisco », avance ainsi Hilmar Lehnert, directeur de l’ingénierie sonore chez Sonos, en marge d’une petite conférence à San Francisco où le produit a été dévoilé.
Au-delà du discours marketing
Si vous n’habitez pas une de ces trois villes, ne le prenez pas mal, la liste n’est pas exhaustive. Ce qu’il faut comprendre par-là, c’est que les jeunes urbains, à New York comme à Saint Flour, vivent dans des appartements plus petits. Pas besoin d’une barre de son monstrueusement puissante et encombrante, donc.
Côté dimensions, la Beam est vraiment bien plus compacte que ses aînées et on aurait tendance à apprécier ce choix fait de discrétion et de bon goût. Pour trouver la bonne taille, les ingénieurs de Sonos ont écumé les fiches techniques des téléviseurs (pour que son épaisseur ne soit pas trop importante et ne cache pas le bas des écrans) et aussi des meubles de télévision. C’est en tout cas ce que s’amusait à nous raconter Hilmar Lehnert. Le résultat est plutôt seyant, très dans l’air du temps avec un revêtement tissé et maillé très fin et un design à la fois monolithique et épuré. On y trouve tout juste quelques boutons de commande sur le dessus et un capteur infrarouge très discret en bas de la face avant.
Voilà en tout cas une bien ingénieuse manière de justifier les dimensions compactes de ce nouveau produit et son positionnement tarifaire. Car Sonos aurait tout aussi bien nous dire que la Beam est un appareil aux multiples visages, lancé pour asseoir sa domination en le positionnant à la croisée de plusieurs chemins.
La Beam est évidemment là pour proposer une entrée dans la gamme de barre de son de Sonos. A 449 euros, elle est plus accessible que ses deux grandes sœurs, les Playbar et Playbase, vendues 799 euros pièce. Un bon choix alors que la concurrence commence à prendre de l’ampleur dans le domaine. Sans oublier qu’elle joue de la simplicité : une connexion Wi-Fi ou Ethernet pour le streaming et une prise HDMI seulement, à une époque où il est toujours aussi peu pratique d’avoir un son correct avec un téléviseur à écran plat sans se casser la tête et sans se ruiner. Mais la Beam est aussi là (en embarquant Alexa, pour l’instant) pour marquer le territoire de Sonos face à des enceintes connectées et intelligentes de plus en plus nombreuses. « Bien sûr que le HomePod est notre concurrent, mais nous aimons la concurrence », nous a concédé, goguenard, Chris Kallai, patron du hardware.
On l’aura saisi, Sonos joue gros avec cette nouvelle barre, très gros pour des petits salons…
Un son ciselé et clair
Mais retrouvons Hilmar Lehnert, qui continue d’expliquer à une petite meute de journalistes, dont nous sommes, que le prix était sans doute une des plus grosses contraintes de ce projet. Avant de préciser, un peu précipitamment, que la qualité n’a évidemment pas été négligée et que chaque vis, chaque composant a été conçu spécialement par Sonos au cours des deux années de développement nécessaire à la création de la Beam.
De fait, nous avons eu l’occasion de l’écouter à l’œuvre dans un petit salon aménagé pour l’occasion. Nos premières impressions, en attendant un test prochain, sont bonnes. Premier constat, pour une pièce de taille moyenne, la puissance est tout à fait suffisante pour emplir l’espace, sans avoir à pousser la barre dans ses retranchements. Deuxième constat, les basses sont présentes et détaillées, sans pour autant tout écraser, les mediums étaient un peu plus difficiles à cerner d’après nous. Mais ce qui a surtout retenu notre attention, c’est la clarté générale du son et particulièrement des voix, extrêmement précises et mises en évidence.
C’est sans doute grâce à la présence de cinq haut-parleurs que l’on doit une partie de cette réussite. On compte ainsi quatre woofers, dont deux sont placés aux extrémités, tournés en biais vers l’avant, pour diffuser le son sur les bords et englober l’utilisateur par ricochets. Les deux autres sont en façade. Ils fournissent à eux quatre un bel effet stéréo et une diffusion du son optimisée grâce à la technologie maison Trueplay.
On trouve enfin un tweeter en voie centrale, chargé de rendre les voix le plus clairement possible. Cinq haut-parleurs qui forment trois canaux seulement. Mais pourront servir de base à une installation 5.1 si on leur adjoint deux Sonos One en guise de satellites et un Sub pour jouer le rôle du caisson de basse.
Tout ça dans un boîtier, rappelons-le, de moins de 7 cm d’épaisseur. Cela induira peut-être quelques limites et défauts (les tweeters auront forcément des limites physiques) mais nous n’avons pas pu jouer suffisamment avec le volume sonore ou les genres de musique pour nous en assurer.
Quoi qu’il en soit, le tour de force est d’autant plus impressionnant que ce constat de clarté détaillée vaut aussi bien pour l’écoute de musique que lorsque la Beam apporte ses poumons à un film ou une série.
Le traitement logiciel du son est différent dans les deux cas, mais indéniablement très réfléchi et abouti, à défaut d’avoir un caractère marqué. Giles Martin, producteur fameux et grand manitou de l’expérience son pour Sonos, revendique d’ailleurs cette position. A ses yeux (et oreilles ?), le but de Sonos est de servir le travail réalisé par ses collègues de Hollywood et de partout ailleurs, pas de l’interpréter et de le modifier. Mettre un savoir-faire et une technologie au service des autres, servir de canal de diffusion… agnostique.
Sonos, terre d’asile
Agnostique, la Beam l’est – comme tous les produits de Sonos – par d’autres aspects. Tout d’abord, elle est ouverte à tous les services de streaming musical existants (ou presque) : Spotify, Apple Music, Tidal, etc. Ensuite, comme la Sonos One, première enceinte « intelligente » de la maison, elle embarque Alexa, d’Amazon, mais sera ravie d’accueillir Google Assistant, d’ici quelque temps.
Seule Siri reste inaccessible et pourtant, là encore, Sonos arrive à jouer la conciliation grâce à AirPlay 2, qu’Apple vient enfin de lancer. Ainsi, il est tout à fait possible depuis un iPhone ou un iPad de lancer la lecture d’un morceau Apple Music sur la Beam. Pour demander ensuite à l’enceinte, via Alexa, de nous dire ce qui est en cours de lecture. Patrick Spence, le PDG de Sonos, et ses équipes appellent cela la « continuité de contrôle ». Tactile, vocale, sur un smartphone ou sur la Beam, tout est bon pour que vous profitiez de votre musique dans les meilleures conditions, même se trouver au milieu d’un champ de bataille… En définitive, la position de Sonos est d’autant plus compréhensible et louable qu’elle ne change pas.
Mais servir les autres doit être bien fait, notamment pour que les assistants vocaux puissent nous comprendre. Les ingénieurs de Sonos ont donc intégré cinq micros à la Beam pour saisir au mieux la voix de l’utilisateur. De fait, à part un faux départ, Alexa a toujours été activée et a compris la commande qui lui était soumise lors des démonstrations auxquelles nous avons assisté.
Pour y arriver, Chris Kallai nous a révélé une petite astuce. La Beam sait quel son elle est en train de jouer elle le soustrait donc de ce que les microphones enregistrent et se retrouve ainsi avec la commande prononcée. Simple et efficace, au point qu’il ne devrait pas être nécessaire d’élever la voix pour se faire entendre par-dessus un solo bruyant ou une explosion tonitruante.
La magie du HDMI et l’absence d’ATMOS
Enfin, à la croisée de deux mondes où les installations complexes sont monnaie-courante, Sonos a fait le choix de la simplicité pour la Beam. Le port HDMI ARC (et le câble fourni compatible) assure la voix de la facilité d’installation et de fonctionnement au quotidien. Grâce à ça, n’importe quelle télécommande d’un téléviseur compatible pourra contrôler la Beam.
Chris Kallai nous explique que ses équipes ont pesé le pour et le contre et pensent désormais que suffisamment de téléviseurs implémentent correctement HDMI ARC – on peut l’espérer dix ans environ après son introduction. La fluidité de l’expérience dépendra donc certainement de l’âge de votre téléviseur.
Mais ARC permettra aussi à l’assistant embarqué dans l’enceinte de gérer les fonctions basiques liées aux téléviseurs (allumer/éteindre, baisser le son, etc.). Un assistant qui pourra également étendre son emprise sur les éléments domotiques présents dans la maison. La beam est une sorte d’Echo Dot géant, ou un Google Home pour audiophile.
Dernier point technologique, alors que la mi-2018 sonne et qu’Apple annonçait en début de semaine la compatibilité de son Apple TV 4K avec la norme Dolby ATMOS, on pourrait s’étonner que la Beam n’y adhère pas. Hilmar Lehnert sourit alors et explique que le choix est mûrement réfléchi. Tout d’abord, il n’y a pas encore assez de contenus ATMOS. Ensuite, et c’est le plus important sans doute, le résultat aurait imposé des compromis et aurait même pu avoir un impact négatif sur la qualité sonore générale. « Il n’y a pas un centimètre carré de plastique sur cette enceinte qui ne soit pas équipé d’un composant acoustique », dit-il, pas peu fier, rappelant la densité de son produit. Giles Martin, en défenseur du beau son et du mixage juste, ajoute son grain de sel : « Nous travaillons avec les professionnels pour avoir leur retour. Avec le Dolby ATMOS, il est très difficile de rendre la bonne spatialisation du son, comme le voulait son producteur ». Comprenez que sur une barre de son à 449 euros qui ne peut dépasser le 5.1 une fois associée à d’autres produits Sonos, la technologie ATMOS n’a pas (encore) sa place.
« Elle le sera si une mise à jour logicielle suffit », nous confie, Chris Kallai. Sous-entendu : s’il ne faut pas une nouvelle génération de Beam, avec d’autres composants.
Sonic Internet, un écosystème connecté pour le son
Mais la Beam n’est pas pensée pour être obsolète rapidement. Patrick Spence se défend de cette approche qu’il reproche à certains de ses concurrents. « Depuis treize ans, nous lançons des produits et 93% d’entre eux sont encore actifs », se félicitait-il en ouverture de la conférence.
C’est cette satisfaction et ses derniers produits qui serviront à construire son projet de Sonic Internet. Des systèmes audio connectés de bonne qualité, signé par Sonos et quelques partenaires, dont IKEA, pour que « la musique emplisse nos vies et les rende meilleures ». Un sacré projet, dont la Beam est une des premières pierres angulaires. Quand on vous dit que Sonos mise « petit » mais joue gros…
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