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Piratage IPTV et livestreaming illicite deviennent un phénomène de masse en France

Un quart des internautes regardent des flux TV directs de provenance illégale. Un noyau dur de 5 % dispose même d’un abonnement à des bouquets pirates. Les ayants droit peinent à organiser la riposte.

Il y a un an et demi, le piratage IPTV et le livestreaming illicite étaient encore une tendance émergente en France. Désormais, c’est un phénomène de masse. La Hadopi vient de finaliser une étude sur le sujet qui montre l’ampleur des dégâts. Ainsi, un quart des internautes français utilisent aujourd’hui, de façon plus ou moins régulière, un moyen illicite pour regarder la TV en direct. Beaucoup d’entre eux ont adopté cet usage en 2018 dans le cadre de la Coupe du monde et de la Ligue des champions. Le contenu sportif payant est en effet l’un des principaux points d’attraction de ce type d’offres, et cela, d’autant plus que le marché français s’est fragmenté avec l’arrivée de RMC Sport l’année dernière.  

Hadopi

L’usage le plus populaire est le livestreaming qui attire 17 % des internautes sur des services dédiés et 14 % sur les réseaux sociaux, généralement de façon ponctuelle à l’occasion de grands évènements sportifs. Environ 5 % d’internautes piratent de façon régulière les programmes TV, au moyen d’un boîtier dédié ou d’une application installée sur un ordinateur ou un téléviseur connecté. A l’instar des adeptes du livestreaming, ce noyau dur est constitué à presque deux tiers d’hommes. La différence, c’est qu’ils sont un peu moins jeunes et qu’ils disposent d’un plus grand pouvoir d’achat. C’est assez logique, car les offres de piratage IPTV sont majoritairement payantes.

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Si ces offres illicites ont le vent en poupe, c’est aussi parce qu’elles sont plutôt de bonne facture. Les « fournisseurs » ont adopté une présentation très professionnelle, avec paiement par carte bancaire et support technique en ligne. En dépit de certains bugs, la qualité est au rendez-vous. L’image est souvent diffusée en HD et les interfaces graphiques sont fluides, surtout pour les offres IPTV. « Comme les pirates n’utilisent pas de DRM, le changement de chaînes est plus rapide que sur les offres légales », souligne Didier Wang, ingénieur à l’Hadopi, à l’occasion d’une conférence de presse.

Résultat : les pirates commencent sérieusement à marcher sur les plates-bandes des ayants droits. Ainsi, 54 % des utilisateurs IPTV et 45 % des livestreamers se sont déjà désabonnés d’une offre légale parce que l’offre illicite leur suffisait. Un phénomène de cannibalisation qui ne pénalise pas seulement les éditeurs et producteurs, mais également l’Etat qui ne récupère pas les taxes qui devraient lui revenir (TVA, recettes sociales, recettes fiscales). « Sans oublier le manque à gagner relatif à la taxe Buffet qui contribue au financement des clubs sportifs amateurs », ajoute une porte-parole de BeIn Sport.  

Impossible à détecter

Malheureusement, la riposte n’est pas si simple. Contrairement au piratage peer-to-peer, il est impossible d’identifier les utilisateurs de programmes TV illicites. « Les moyens techniques qui le permettraient sont trop intrusifs », souligne Pauline Blassel, secrétaire générale de la Hadopi. Le seul levier que peuvent actionner les forces de l’ordre est la détection et le démantèlement des groupes mafieux qui opèrent ces infrastructures techniques, comme cela arrive régulièrement sous la houlette d’Europol. A cette occasion, les enquêteurs peuvent mettre la main sur un fichier d’abonnés, mais les poursuites judiciaires pour ces derniers sont rares.

Autre solution : le blocage par les opérateurs des sites de livestream et des boutiques de vente en ligne. Mais cela nécessite une décision de justice, ce qui peut prendre du temps. Les grands acteurs de l’Internet pourraient également jouer un rôle important, car c’est au travers de leurs plateformes que ce « business » se met en place. Beaucoup de boîtiers IPTV sont commercialisés sur AliExpress.com, même si on peut aussi en trouver dans certains magasins de l’Hexagone. Les offres d’abonnements sont vendues directement avec l’appareil, ou alors de manière séparée sur Internet, par exemple au travers d’eBay.

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Les paiements se font souvent par PayPal. Quant aux applications, on peut les trouver dans les boutiques applicatives d’Apple ou de Google. Généralement, l’offre d’abonnement illicite n’est pas mentionnée, mais parfois, c’est assez explicite. Le référencement naturel de Google aide certains fournisseurs pirates à très bien se placer. Il suffit d’effectuer une recherche sur le mot clé « IPTV » pour le constater. Enfin, YouTube regorge de tutoriels permettant aux personnes intéressées de bien démarrer. Mais d’après les ayants droit, tous ces acteurs se montrent bien trop peu coopératifs à leurs goûts. La guerre ne fait que commencer. 

Source: Hadopi

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Gilbert KALLENBORN