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Non, le Huawei Mate 10 Pro n’est pas assez intelligent pour piloter une Porsche

Huawei a installé son smartphone haut de gamme à bord d’une Porsche. Son but ? Faire la démonstration des capacités du processeur Kirin 970 en matière d’intelligence artificielle. Si cet essai s’est avéré concluant, il n’en reste pas moins que le chinois s’est pris les pieds dans le tapis. On vous dit pourquoi.

C’est sur le parking du célèbre stade barcelonais -le Camp Nou- que Huawei a réalisé une démonstration visant à mettre en scène les performances de son processeur Kirin 970. Pour cela, le constructeur a connecté son smartphone haut de gamme, le Mate 10 Pro, à une Porsche Panamera. Le smartphone est alors supposé faire de son processeur le cerveau du bolide et lui offrir des fonctions dignes d’une voiture autonome. 

L’appareil est relié, d’une part, à une caméra installée sur le toit de la voiture et d’autre part, en Wi-Fi, à un énorme dispositif mécanique présent dans le coffre, pour transformer l’engin en un véhicule autonome. 

D. Nogueira, 01net.com – La Porsche Cayenne équipée par Huawei
D. Nogueira, 01net.com – C’est en fait la caméra installée sur le toit qui analyse la route

La démonstration est menée tambour battant : lorsque nous essayons de comprendre comment le smartphone interagit avec le véhicule, on nous explique juste que l’appareil est complètement autonome et qu’il n’est pas relié à un autre calculateur. 

D. Nogueira, 01net.com – Dans le coffre, une installation maison

Une explication qui nous semble étrange : le calculateur d’un véhicule est aussi là pour authentifier les commandes d’un conducteur. On se dit donc que Huawei est peut-être passé au-dessus d’une strate importante dédiée à la sécurité. Mais passons, nous n’aurons pas de réponses à nos questions.

Une démo qui fonctionne bien… mais n’impressionne pas

Comme vous pourrez le voir dans la vidéo ci-dessus, la démonstration a parfaitement fonctionné. La caméra présente dans le coffre de toit identifie très bien les trois objets qui apparaissent devant nous. Et on a envie de dire, encore heureux ! 

D’abord parce que Huawei a consacré plusieurs jours à une phase d’apprentissage durant laquelle le processeur Kirin a appris à reconnaître spécifiquement le vélo, le très gros ballon de football et le chien présents sur le parking. 

Ensuite parce que nous roulions lentement, ce qui laissait largement le temps à l’électronique d’identifier les obstacles.

Enfin parce que ces obstacles sont fixés sur des supports qui sont non seulement immobiles, mais parfaitement orientés. Le vélo, par exemple, est bien de profil, sur un fond noir pour ne pas se fondre dans le décor et donc tout à fait identifiable (cadre, les roues, etc.). L’énorme ballon, lui, opte pour un quadrillage noir et blanc. Pour finir, le chien est lui aussi de grande taille et parfaitement représenté de profil. Plutôt voyant et très, très loin de ce que l’on pourrait croiser sur la route !

Autant dire que nous sommes là sur une version très basique de ce que peut proposer une IA embarquée dans un véhicule, à savoir reconnaître un objet sous tous les angles, à des vitesses variées. 

Pourquoi Huawei aurait mieux fait de s’abstenir

De nombreux confrères journalistes étaient venus voir cette démonstration avec une vidéo en tête : celle publiée par Huawei sur la Toile il y a quelques jours. On y voit la Panamera, sans conducteur à bord, foncer vers un (vrai) chien, puis l’éviter. Grâce, évidemment, à la puissance du Mate 10 Pro. La voici, pour rappel. 

https://www.youtube.com/watch?v=JBGRRx-aSpU

“Le premier téléphone doté d’une intelligence artificielle capable de conduire une voiture” annonce fièrement Huawei. Qui laisse entendre que son mobile est le seul maître à bord, et que sa caméra détecte l’animal.

Vraiment ? A l’occasion d’une interview avant notre essai, on nous précise que, comme dans la vidéo, cette démo est réalisée en utilisant exclusivement pour simple caméra de détection celle présente au dos du Mate 10 Pro. Un capteur très loin des capacités techniques de la caméra intégrée dans le coffre de toit lors de notre essai. 

Interloqués, nous nous hasardons à poser une question au porte-parole de Huawei chargé de nous faire le briefing avant la démo. Qui maintient que c’est possible. Lorsque nous abordons avec lui la portée de mise au point de la caméra du Mate 10, il persiste… mais plus timidement. Si l’objet n’est pas identifié d’assez loin et donc assez tôt pour appliquer un freinage ou un évitement, cela sent pourtant la catastrophe. 

En publiant cette première vidéo, un peu trop belle pour être vraie, Huawei a fait un beau coup marketing, mais pour la performance technologique, on repassera. Le géant du smartphone aurait peut être mieux fait de trouver un autre moyen de prouver les aptitudes de son Kirin 970 à se comporter comme une véritable intelligence artificielle. 

Certes, les représentants de Huawei n’ont pas cessé de nous rappeler qu’ils ne souhaitaient pas ici parler de voiture autonome, mais bien des performances de son processeur en matière d’IA. Il n’empêche qu’appliqué à l’automobile, cela reste un sujet très sensible. Car c’est un domaine où chaque erreur d’interprétation et chaque mauvaise décision – dans le cadre de manœuvres d’évitement en situation réelle – peut avoir des conséquences sérieuses.

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