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L’interdiction de vendre sur Internet va devenir exceptionnelle

Focal JM Lab, Triangle Industries et Bose doivent autoriser leurs distributeurs à passer par le Web pour vendre leurs produits.

Trois fournisseurs de matériel hi-fi haut de gamme viennent de donner une occasion au Conseil de la concurrence de prendre, le 5 octobre, une décision de taille. Les sociétés Focal JM Lab et Triangle Industries (enceintes)
interdisaient purement et simplement leurs distributeurs, par contrat, de vendre leurs produits sur Internet, via un site d’e-commerce. Le troisième, Bose (hi-fi et home cinéma), ne l’interdisait pas formellement, mais le Conseil de la concurrence a
estimé que ‘ les conditions posées […] à ce type de vente sont trop restrictives. ‘ Résultat : les trois sociétés se sont pliées aux exigences du droit, le Conseil a mis
fin à la procédure.Bose a en effet modifié son contrat de distribution, tout en imposant certaines contraintes aux distributeurs, comme de faire un site de qualité (de manière à ne pas nuire à l’image de ses produits), de proposer un lien vers le site
officiel de Bose, et de supprimer la notion de ‘ Périmètre de service ‘ pour les produits vendus sur Internet. Le vendeur-installateur pourra intervenir chez le client, même s’il n’est pas dans un rayon de
75 kilomètres. Focal JM Lab s’est engagé, lui, à conclure un contrat de distribution spécifique pour la vente sur la Toile, Triangle Industries a décidé d’accepter explicitement ce canal de distribution dans la Charte européenne de qualité
de ses revendeurs agréés.

Un décision attendue depuis 2002

Cette affaire, qui remonte à février 2002, fait suite à une saisine du Conseil de la concurrence par le ministre de l’Economie, Laurent Fabius à l’époque, et donne ainsi lieu à une ‘ décision très attendue des
acteurs économiques confrontés à la vente de leurs produits sur Internet ‘,
estime la juriste Céline Marchand, sur le site Juriscom.En fait, le Conseil de la concurrence ne défend pas complètement d’interdire la vente en ligne. ‘ Le droit de la concurrence régit les systèmes de distribution, précise la juriste à
01net.
Il encadre la façon dont un fournisseur peut imposer des modalités de distribution à ses revendeurs. Mais le droit les empêche aussi d’aller trop loin. ‘ Il faut des
‘ circonstances exceptionnelles ‘ pour que la vente en ligne puisse être proscrite, ou que les contraintes qu’un fournisseur impose soient proportionnelles à l’objectif qu’il vise.‘ Il existe pour certains types de produits, qui nécessitent un accompagnement particulier, des mécanismes de distribution particuliers, comme le réseau de distribution sélective, explique Benoît
Tabaka, juriste et auteur d’un blog sur l’e-commerce. C’est ce qui explique, par exemple, que l’on ne peut pas vendre aujourd’hui, à titre professionnel et sauf autorisations spécifiques accordées par les marques à de
grands distributeurs, de parfums neufs sur Internet. ‘
Le ‘ test ‘ du parfum par le client étant une condition de l’acte d’achat, on admet donc ce genre de limitation.En revanche, l’argument de la technicité de leurs matériels avancé par Bose, Triangles Industries et Focal JM Lab n’a pas suffi. ‘ Il s’agit de trois fournisseurs dont les produits de prestige sont vendus en
association avec un conseil,
explique Céline Marchand. Ils estimaient qu’à partir du moment où vous les vendez sur Internet, le conseil ne pouvait plus, lui, être vendu de la même façon. ‘

Possibilité de résilier le contrat de distribution

Cela dit, le Conseil a admis une restriction imposée par Focal JM Lab sur deux séries de produits très haut de gamme : leur vente via Internet ne pourra se faire que si les clients peuvent ‘ attester
d’une écoute préalable de ces produits chez un distributeur agréé et du bénéfice de conseils personnalisés pour leur installation. ‘
Si le distributeur ne remplit pas cette condition, son contrat avec le fournisseur pourra
être résilié.La décision du Conseil de la concurrence n’aurait cependant pas été la même si un vendeur en ligne ‘ pure player ‘ avait cherché à passer un accord avec un des trois vendeurs de matériel
hi-fi. Car, dans ce cas, pas de magasin physique, pas de conseil, pas de test préalable possible. On peut très bien imaginer un client se renseignant sur un article à la Fnac, réfléchir, puis l’acheter en ligne, chez un e-commerçant.
‘ Le pure player aura profité de la vente sans avoir fait tout le travail en amont et les investissements des distributeurs physiques agréés ‘, note Céline Marchand. Bose, Triangles
et Focal JM Lab auraient alors pu les empêcher de distribuer leurs matériels.En tout cas, le Conseil de la concurrence envoie là un signal. ‘ Avec cette décision, il montre qu’il se préoccupe de cette question. Il dit aux fournisseurs qui sont dans ce genre de situation que, s’ils doivent
changer leurs conditions de vente, ils doivent le faire maintenant ‘.

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Arnaud Devillard