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La « taxe Gafa » européenne suspendue… et jugée discriminatoire par les États-Unis

Les 28 pays de l’UE ont formellement suspendu, mardi 12 mars 2019, le projet d’une taxe européenne dite « Gafa » sur les géants du numérique. Un impôt jugé « discriminatoire » par les États-Unis.

Les 28 membres de l’Union Européenne (UE) ont rejeté le projet d’une taxe sur les géants du numérique, dite « Gafa » (Google, Amazon, Facebook et Apple) au niveau européen, à cause de l’opposition de quatre pays : l’Irlande, la Suède, le Danemark et la Finlande. L’initiative est désormais bloquée car en matière fiscale, l’unanimité est nécessaire.

Réunis à Bruxelles, les ministres des Finances européens ont renvoyé la balle à l’OCDE, où des discussions se poursuivent pour parvenir à un accord sur une taxe internationale sur les géants du numérique d’ici à 2020.

« Dans le cas où d’ici la fin de 2020, il apparaîtrait que l’accord au niveau de l’OCDE prend plus de temps, le Conseil européen pourrait, le cas échéant, revenir à la discussion sur une approche européenne », a dit le ministre roumain des Finances, Eugen Orlando Teodorovici, après une réunion avec ses 27 homologues.

L’UE se divise et s’en remet donc à l’échelon supérieur. Cet échec était attendu et avait contraint la France à présenter le 6 mars dernier son propre projet de taxe sur les géants du numérique.

« Je suis désolé que nous n’ayons pas pu nous entendre aujourd’hui. Je suis d’accord avec Bruno [Le Maire, ministre français des Finances], c’est une occasion manquée », a déclaré le Commissaire européen aux Affaires économiques, Pierre Moscovici, à l’issue de la réunion. Bien qu’il assure que  « La commission européenne n’a pas l’intention de retirer son projet de la table, ce n’est pas la fin, il n’est pas mort », faute d’accord d’ici 2020.

Pour les États-Unis, une taxe « discriminatoire »

De leur côté, les États-Unis envisagent de saisir l’Organisation mondiale du commerce (OMC) des taxes, à leurs yeux « discriminatoires », que la France et d’autres pays européens veulent imposer aux mastodontes de l’internet comme Facebook et Google, a indiqué mardi 12 mars, à Paris un responsable américain à l’AFP.

« Au sein de notre gouvernement, certains étudient si cet impact discriminatoire nous donnerait le droit [de contester] en vertu des accords commerciaux et traités OMC », a indiqué Chip Harter, responsable du Trésor et délégué américain pour les discussions fiscales internationales. « Nous pensons que toute la base théorique des taxes sur les services numériques est mal conçue et que le résultat est extrêmement discriminatoire à l’égard des multinationales basées aux Etats-Unis », a-t-il poursuivi.

L’OCDE, une voie de garage pour l’UE ?

L’OCDE récupère la patate chaude. L’organisation internationale devient le fer de lance d’un nouvel accord mondial sur la taxation des géants de la technologie et du numérique, qui déclarent souvent leurs revenus dans des pays à faible imposition.

Mais cette refonte est attendue au plus tôt l’année prochaine, poussant la France, le Royaume-Uni, l’Espagne, l’Autriche et l’Italie à adopter leur propre version d’une « taxe Gafa » dès cette année. Et les projets nationaux divergent sur la forme. En France, elle serait appliquée rétroactivement à compter du 1er janvier 2019, alors que des mesures au Royaume-Uni et dans d’autres pays européens ne rentreraient pas en vigueur avant l’année prochaine.

« Nous comprenons qu’il existe des pressions politiques dans le monde entier pour taxer plus lourdement diverses entreprises internationales et nous sommes convenus que cela était approprié », a déclaré Chip Harter à l’AFP, avant de continuer : « Mais nous pensons que cela devrait être fait sur une base plus large que la sélection d’un secteur particulier ».

Cette réaction s’inscrit dans la veine des déclarations de Steven Mnuchin, secrétaire du Trésor américain, lors de sa rencontre avec le ministres des Finances français, fin janvier à Paris pour évoquer ce « problème » de taxe pour le « régler ensemble d’ici la fin de l’année ».

Un recours à l’OCDE qui repousse encore l’engagement européen face aux géants du numérique, majoritairement américains. 

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Marion Simon-Rainaud avec AFP