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Etude : le piratage ne tue pas l’industrie du divertissement

Le piratage est le coupable parfait pour expliquer le changement que traverse l’industrie de la création en général. Une étude universitaire britannique démine le terrain et prouve que la vérité est ailleurs. En entre-deux.

Il faut repenser la culture numérique. Il est essentiel de prendre le recul nécessaire pour analyser une situation sans précédent. Il est impérieux de se détacher des seules études commanditées par les acteurs de la « création ». Il est capital de ne pas détruire les libertés individuelles en ligne au seul argument que le piratage détruirait l’industrie du divertissement. Mieux, cette dernière assertion est-elle fondée ?

Revenus en hausse ou stables

Ce sont ces divers points qu’une étude de la London School of Economics and Political Science (LSE) passe au crible. A commencer par ce credo qui veut que le piratage mette à mal l’économie mondiale du divertissement. Or, comme le précise le rapport synthétique de l’étude : « malgré ce que déclare la MPAA, qui veut que le piratage en ligne détruise l’industrie du cinéma, Hollywood a atteint des revenus records au box office mondiale avec 35 milliards de dollars en 2012, soit une hausse de 6% par rapport à 2011 ».

Evolution de paysage

Et le rapport de la LSE argumente que contrairement à ce que les industries du cinéma et de la musique avancent, elles ne sont pas dans une phase de déclin terminal. Mieux, elles engrangent de beaux profits, notamment liés à la croissance des revenus tirés des ventes numériques, des abonnements à des services de streaming ou aux concerts, qui « compensent les pertes liées à la baisse des ventes de CD ».
Une inversion de tendance illustrée par un exemple. En Grande Bretagne, en 2013, les ventes de musiques dématérialisées ont été pour la première fois supérieures à celle de CD et de vinyles, 55% contre 45. L’étude indique par ailleurs qu’aucune preuve ne peut être apportée à un déclin fort des revenus des majors de la musique. Les variations de revenus des différentes activités des majors seraient donc plus liées à un nouvel équilibre à trouver, à l’impact de la révolution numérique au global qu’à l’effet négatif du piratage.

Trouver de nouvelles voies

Le rapport de la London School of Economics and Political Science met d’ailleurs en avant les bonnes performances de l’industrie du jeu vidéo qui a su « introduire de nouvelles méthodes pour générer des revenus […] en travaillant avec la culture participative en ligne et non contre elle ». Même si les DRM représentent un fort poids dans ce secteur.
Une culture numérique du participatif et de l’ouverture qui a émergé avec l’adoption de plus en plus fréquente, selon le rapport, des licences Creative Commons et la montée en puissance de services, comme SoundCloud, qui permettent aux artistes de partager avec leurs fans.

Copyright et nouvelles options

Une culture du partage qui n’est pas appréhendée par les défenseurs du copyright, qui ne faut par ailleurs pas jeter par dessus les moulins, selon les auteurs de l’étude. Même si le partage n’est pas facilement compatible avec le copyright.

Les législations qui tendent à durcir les positions traditionnelles des « majors » ont plusieurs défauts pour la LSE. Tout d’abord, elles ciblent « les internautes individuellement ce qui arrivera assez peu probablement à inverser un mouvement comme la culture du partage en ligne ». Ensuite, il y a « un besoin urgent d’une vérification indépendante des déclarations indiquant que l’industrie de la création souffre » de ces échanges. « Malheureusement, les gouvernements ont peu de choix si ce n’est de prendre en compte les études commandées par les représentants de l’industrie créative qui annoncent une réduction draconienne des revenus. Ils sont obligés de prendre ces résultats comme les meilleurs résultats disponibles », puisqu’il n’y en a pas d’autres.

Le choix de légiférer

D’autant que le durcissement législatif, outre qu’il menace certaines libertés en ligne, est souvent en retard sur le paysage technologique qui évolue très vite. L’étude prend ainsi un cas bien connu, celui de la France et rappelle les conclusions de l’étude de l’Institut pour les Etudes Prospectives Technologiques, financée par la Commission européenne, publiée en mars dernier, que l’IFPI (International Federation of the Phonographic Industry) avait beaucoup critiqué.
L’étude montrait que si Hadopi a effectivement affecté les choix (illégaux) offerts aux Internautes, il a également été constaté que la France a également le plus haut de contenus streamés en comparaison d’autres pays. Le P2P a donc été remplacé par une autre solution…

La solution serait donc à trouver ailleurs. « Quand [les ayants droits et les internautes] pourront profiter du plein potentiel d’Internet, alors sera maximisée la création de contenus innovants pour le bénéfice de tous », conclut cette étude, qui en définitive ne condamne aucune des deux parties, mais tient juste à remettre en perspective les choses. Le piratage ne tue pas l’industrie de la création. Cette dernière doit juste trouver une nouvelle voie et s’adapter à une nouvelle ère sans participer à la réduction des libertés en ligne. Une tâche finalement plus compliquée que de marteler une vérité unique et chargée du poids d’un lourd héritage systémique.

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Source :
TorrentFreak

Rapport synthétique LSE

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Pierre Fontaine