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Comment AMD veut réduire l’impact écologique du Net et des IA d’ici à 2025

Alors que les data centers poussent comme des champignons et sont souvent pointés du doigt pour leur consommation électrique, AMD promet une multiplication par trente de leur efficacité énergétique en seulement quelques années.

On n’arrête plus AMD : en parallèle de son succès dans le domaine des puces grand public, le concepteur américain de puces est tout feu tout flamme dans le monde professionnel. Après que ses Opteron, jadis champions du calcul intensif, ont été littéralement oblitérés du marché par les Xeon d’Intel, AMD prend aussi sa revanche dans le milieu des centres de données et autres supercalculateurs.

Quasiment absent des écrans radars il y a peu, voilà qu’en cette fin d’année 2021, 15% des supercalculateurs du Top 500 sont propulsés par des EPYC, ses puces professionnelles très haute puissance.
L’éternel challenger d’Intel ne semble pas prêt à s’arrêter puisqu’il vient d’annoncer ses nouveaux CPU Milan X et Genoa – ce dernier sera la première puce du genre à être gravé en 5 nm – ainsi qu’un GPU dédié au calcul intensif, l’Instinct MI200. Un GPU qui se revendique jusqu’à x5 plus rapide dans certains calculs que les puces A100, les GPU les plus puissants du genre de son concurrent Nvidia, qui contrôle plus de 90% des GPU professionnels.

Lire aussi : AMD dévoile des CPU et GPU impressionnants pour devenir un champion des centres de données

Nous avons eu l’occasion d’échanger avec Mark Papermaster, directeur de la technologie et vice-président exécutif chargé de la technologie et de l’ingénierie chez AMD. Le bras droit technologique de Lisa Su, géniale patronne qui a insufflé une nouvelle vie à une entreprise qui périclitait sérieusement dans les années 2010.

Mark Papermaster, haut cadre d’AMD, intervenait en Europe à l’occasion du Websummit 2021, où il est arrivé avec une phrase choc :

« Nous voulons multiplier par 30 l’efficacité énergétique des centres de données d’ici à 2025 ».

Une promesse impossible pour faire parler de son entreprise ? Un chiffre pour faire le buzz ? Outre le fait qu’il ne s’agisse pas trop du genre de la maison – quand on vient défier le numéro 1, le bluff n’est pas une bonne idée – le retour de bâton de promesses non tenues semble trop fort.

Alors, comment et avec quoi tenir un tel objectif ? Et surtout, pourquoi maintenant ?

La pandémie a tout accéléré

« Le monde des microprocesseurs en est plein macroboom », commence Mark Papermaster pour caractériser l’époque que nous vivons.
« Nous sommes à un tournant de l’histoire dans notre industrie (des semi-conducteurs, ndr). Et le rythme est dicté par un besoin exponentiel de puissance de calcul ».

Entre le développement de l’IA, de la voiture autonome, de la SVOD, etc. nombreuses sont les industries qui se transforment et qui transforment notre monde.
Mais cette soif a été accélérée par la pandémie. Et ce, de manière fracassante :

« La transformation numérique qui était en cours a explosé du fait du COVID-19. Certaines entreprises, certaines industries ont dû prendre des décisions radicales du jour au lendemain », poursuit-il, en faisant référence à des achats massifs d’équipement ou à l’explosion de services cloud.
« Là nous sommes à l’étape d’après où nous générons et consommons un volume massif de données. Par exemple, le télétravail a entraîné une multiplication par cinq du volume de données liées à la vidéoconférence ».

Et pour gérer ces flux vidéo, l’encodage et le décodage en temps réel des séries Netflix, les calculs massifs pour entraîner les IA qui améliorent les images dans vos logiciels, il faut de la puissance. Beaucoup de puissance.
D’où l’explosion du nombre de cœurs, de la mémoire cache, de la fréquence et de tous les autres attributs qui constituent les microprocesseurs.

Des puces gonflées aux hormones

64 cœurs/128 tâches et une quantité de mémoire cache jamais vue dans l’industrie – 804 Mo ! –, la puce EPYC Milan X fraîchement annoncée est un monstre de calcul. Un beau bébé, conçu sur l’architecture très modulaire qui a fait le succès de toutes les lignes de CPU d’AMD de la génération « Zen ». Une puce qui sera disponible l’an prochain, et qui annonce dès le jour de son officialisation le nom et quelques-unes des caractéristiques de son successeur, la puce Genoa.

Et ça, ce n’est rien que pour les CPU, car les GPU ne sont pas en reste. Ici aussi, AMD fait sa révolution et réplique, dans ce segment, remontada qu’elle a déjà réussi dans le monde des GPU grand public – en adoptant peu ou prou son succès des CPU.
Avec sa nouvelle architecture CDNA dédiée au calcul, la nouvelle puce Instinct MI200, d’AMD, promet, sur le papier au moins, de faire mal à Nvidia. Non content d’atomiser sa propre génération précédente de GPU de calcul, AMD affiche en effet ici, pour la première fois de son histoire, des promesses de domination sur les GPU de son concurrent Nvidia, leader des GPU grand public, mais surtout archi leader des GPU de calcul intensif.

« Si notre feuille de route est riche en composants performants, notre objectif de multiplier par 30 l’efficacité énergétique des centres de données est impossible à réaliser en améliorant un seul composant », nous explique Mark Papermaster.

À l’image d’Intel et de son OneApi, AMD plaide pour un monde du calcul qui s’améliore à tous les niveaux. Et surtout, opte pour des approches plus intelligentes.

Une approche plurielle

Si le rachat d’ARM, par Nvidia, fait couler beaucoup d’encre, il en est un plus discret, mais presque aussi gros, et lui aussi très important. En début d’année, AMD annonçait en effet son rachat de Xilinx, une entreprise dont vous n’avez peut-être pas entendu parler, mais qui va quand même coûter 35 milliards d’euros à AMD !

« Le rachat des puces programmables de Xilinx (des fPGA dans le jargon, ndlr) fait partie d’une nouvelle approche hétérogène. À mesure que les charges et la variété des types de calculs augmentent, autour de l’IA ou de la vidéo par exemple, il est important d’utiliser correctement les bonnes puces pour les bonnes tâches », détaille Mark Papermaster.

Dans toutes ces tâches, celle dont la soif des besoins en puissance semble sans fin est l’IA. Car si cet acronyme est utilisé à toutes les sauces, ce n’est pas qu’un effet de marketing. C’est une réalité de terrain.

« L’IA est désormais dans tous les business », valide Mark Papermaster. « Si par le passé le CPU faisait tout, ensuite le GPU a pris le relai. Mais désormais, avec la variété des tâches, qu’il s’agisse de machine learning ou d’inférence, il faut combiner les puces selon les tâches. Et les puces programmables et celles dédiées à l’IA de Xilinx complètent parfaitement notre portfolio », se félicite le représentant d’AMD.

C’est en effet en partie ce cocktail de puces qui pourrait permettre à AMD d’atteindre ses objectifs d’efficacité énergétique. En partie seulement.

« Pour atteindre un tel niveau d’amélioration, toute la chaîne doit être prise en compte. Il y a les puces bien sûr, mais aussi les procédés de fabrication et la partie logicielle. Le mot-clé est ici l’adaptabilité maximale pour atteindre l’efficacité maximale, et ainsi atteindre les objectifs que nous nous sommes fixés », ajoute-t-il.

AMD, champion de la coopération et de l’adaptation

De loin, l’approche d’AMD ressemble à celle d’Intel. Comme son éternel rival et titan des semi-conducteurs, AMD conçoit et développe des puces x86. Comme lui, il est impliqué dans les marchés grand public et pro. Comme Intel qui a racheté Altera en 2015, AMD fait l’acquisition d’un champion des puces fPGA. Et comme AMD, Intel se met à faire des cartes graphiques hautes performances. La stratégie globale des deux acteurs semble donc similaire.

Lire aussi : Intel annonce Arc, son premier GPU dédié aux gamers

Or, AMD n’est pas Intel. D’une part, il n’est pas fondeur, c’est-à-dire qu’il ne possède pas ses propres usines, et sous-traite la production de ses puces, surtout à TSMC.
D’autre part, il reste un éternel challenger d’Intel sur les CPU, et de Nvidia sur les cartes graphiques. Longtemps AMD a également été le seul acteur à faire à la fois des CPU, des GPU, des APU (c’est lui qui inventé ces puces deux-en-un) tout en travaillant pour d’autres acteurs, tels que Sony ou Microsoft. Un côté touche à tout multitâche qui l’a rendu fragile par le passé, le reléguant souvent au rang « d’alternative pas chère » sur tous les marchés.

Mais le vent « Lisa Su » qui souffle sur l’entreprise depuis 2014 porte le navire AMD sur les flots du succès. Comment ? En transformant des faiblesses en forces.

« Notre modèle fabless s’avère très efficace puisqu’il nous permet de nous concentrer sur la différentiation, sur le design. Et puis, avec notre business de puces sur mesure avec nos différents clients (comme Sony, Microsoft ou Valve, ndlr), nous avons une solide expérience dans le travail avec les fonderies tierces », détaille Mark Papermaster.

Lire aussi : Renaissance d’AMD : une réussite à base de leadership, d’architecture et de consoles

Et le dirigeant d’AMD ne ne se prive pas d’ajouter que le passé de « petit » Poucet des puces, leur a conféré un avantage.

« Aujourd’hui nous sommes gros, mais une de nos grandes forces est que nous essayons toujours d’agir et nous comporter comme une petite entreprise. Nous avons cette culture de la collaboration, et aujourd’hui cela paye », conclut-il.

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Héritier de monstres d’HPE tels que El Capitan, Frontier ou Lumi, Ad Astra est à 100% propulsé par des CPU et GPU signés AMD. Et affiche une efficacité énergétique déjà impressionnante : alors qu’il ne consomme que x1,5 plus d’énergie que son prédécesseur, le nouveau fleuron s’avère x21 plus performant !
Rendez-vous en 2025 pour voir si, oui ou non, le pari du facteur x30 d’efficacité énergétique est rempli.

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