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Comment Amazon va répercuter la taxe Gafa sur les e-commerçants français

Plus de trois mois après l’adoption définitive par la France de la taxe Gafa, Amazon réplique. Le géant du e-commerce augmente « ses tarifs de ventes » pour les commerçants qui utilisent la plate-forme.

Amazon met ses menaces à exécution, les petits commerçants trinquent. Dès ce 1er octobre, le géant du e-commerce fait payer le montant de la taxe Gafa française aux vendeurs qui utilisent son interface. Au total, ce sont près de 10 000 petites et moyennes entreprises (PME) qui vont désormais devoir payer une commission plus élevée.

Concrètement, sur un produit à 100 euros, Amazon prélevait, jusqu’à présent, en moyenne 15 euros. La plate-forme va s’octroyer à partir de ce jour 3 % de plus, soit en moyenne 15,45 % (soit 15,45 euros) et ce, sans négociation possible -au risque pour le vendeur d’être déréférencé.

« À la merci d’Amazon »

« Ce qui nous chagrine c’est qu’Amazon utilise sa position de leader pour mettre la pression sur les commerçants qui utilisent la plate-forme comme outil de développement de leur activité. Aujourd’hui, ils sont à la merci d’Amazon », explique Xavier Douais, président de la section commerce de la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME).

L’addition est salée pour les structures modestes. Le calcul est écrit noir sur blanc dans un mail automatique adressé à tous les commerçants, daté du 24 septembre 2019. « À la suite de l’instauration en France d’une nouvelle taxe sur les services numériques au taux de 3%, nous souhaitons vous rappeler que nous serons contraints d’ajuster les taux de nos frais de vente sur Amazon.fr pour refléter ce coût supplémentaire », se justifie le géant du retail dans la missive lapidaire.

« Une provocation »

Ce n’est pas une surprise, mais le choc reste violent. Dès l’annonce de l’adoption définitive de la taxe chère à Bruno Le Maire, le 11 juillet dernier, Amazon avait annoncé la couleur. La société qui appartient à l’homme le plus riche du monde, Jeff Bezos, soutient ne pas être « en mesure d’absorber une taxe supplémentaire assise sur le chiffre d’affaires et non sur les bénéfices ».

« C’est de la provocation, analyse Xavier Douais. Si l’État veut faire payer plus d’impôts aux plates-formes, ce n’est pas pour que les PME payent à leur place. 3% de la marge c’est très important pour les commerçants. »

Derrière cette attitude « minable » selon l’ONG Attac se cache une véritable volonté de s’opposer à la taxe Gafa… en faisant finalement payer les Français.

«Hausse des prix de leurs produits vendus en ligne»

« Malheureusement, nous nous attendons à ce que nombre de ces entreprises soient en conséquence contraintes de répercuter cette taxe sur les consommateurs, ce qui entraînera une hausse des prix de leurs produits vendus en ligne », avait communiqué Amazon au cours de l’été à l’AFP.

Le pied de nez d’Amazon agace Bercy. Mais au ministère de l’Économie et des Finances, on reste convaincu de la justesse de la taxe Gafa et on préfère penser que l’attitude de la société américaine lui sera défavorable.

« Amazon répercute la taxe Gafa sur des entreprises qui déjà payent plus d’impôts que la plate-forme ! Chaque consommateur jugera et pourra acheter sur d’autres plates-formes », glisse-t-on à Bercy. « Les géants du numérique ont peur aujourd’hui de la généralisation de cette taxe. C’est pour ça que c’est important que la France tienne bon ». 

À l’issue du G7 de Biarritz, fin août 2019, le gouvernement s’est engagé à supprimer la taxe Gafa à l’échelle de l’Hexagone, dès qu’un système d’impôt international sera mis en place par l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) d’ici 2020.  

Refus par principe

Amazon n’en est pas à sa première opposition aux autorités publiques françaises. En mars 2019, la firme américaine avait refusé de signer une charte de « bonnes pratiques » pour le e-commerce, à l’initiative de Mounir Majhoubi, alors secrétaire d’État au Numérique. Malgré le caractère symbolique du texte, Amazon et Alibaba étaient les seules plates-formes à avoir refusé de signer.

Cette opposition de principe inquiète la fédération des PME. « Il ne faut pas qu’Amazon par son attitude conduise les pouvoirs publics à durcir leur réglementation, ce qui serait dommageable pour tout le secteur », plaide le président des petites et moyennes structures.  « Il faut leur faire entendre raison ».

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Marion Simon-Rainaud