Passer au contenu

Ils mettent leurs actes au Net

Une armée de bénévoles, généalogistes passionnés, dépouille et photographie les archives de la Marne, acte par acte, pour aider les internautes à retrouver leurs ancêtres.

Le Web est un repaire de généalogistes amateurs, qui aiment se retrouver en groupes de discussion, souvent organisés par départements. Un beau matin de février 2004, une discussion s’engage dans l’un de ces groupes, MarneGenWeb. ‘ Quelqu’un pourrait-il me faire une photocopie d’un acte aux archives de Châlons-en-Champagne ? ‘, demande un internaute. ‘ Moi, et je vais même te faire des photos numériques de tout le registre ‘, répond Jean-René Maillard. ‘ Si tu fais ça, tu vas être assailli de demandes. Il faudrait demander de l’aide pour dépouiller le registre en échange ‘, suggère un troisième larron, Christian Barrilliot. L’idée de Marne Archive était née. En 15 jours, Jean-René et Christian dépouillent des centaines d’actes pour en extraire des données utilisables (nature et date de l’acte, noms et prénoms des personnes citées et leur filiation). Pour présenter ces informations sur un site, ils se servent du modèle Généacte, des tableaux Excel qu’ils remanieront plus tard pour faciliter la vie des novices en informatique. Les premiers actes sont mis en ligne le 29 février 2004. Un an plus tard, le site Marne Archive en recelait déjà 300 000.

De la photo au dépouillement

Jean-René Maillard et René Gérauld sont les photographes attitrés de l’association. Depuis un an, ils sont devenus des habitués des archives départementales de Châlons-en-Champagne, où est entreposée la collection des registres paroissiaux et d’état civil de la Marne. ‘ L’ordonnance de Villers-Cotterêts a rendu les registres de baptêmes obligatoires en 1539. Nos plus anciens registres datent de 1 530 ‘, explique Lionel Gallois, directeur des archives. Jean-René et René passent ici des journées entières avec leurs appareils photo numériques, un Nikon D70 et un Olympus C60. Montés sur trépied, les appareils mitraillent sans relâche ces registres anciens, page après page. L’étape suivante, c’est l’exploitation de ces documents. Plus de 200 bénévoles, les ‘ dépouilleurs ‘, récupèrent les photos numériques des actes sur un site protégé par un mot de passe ou, pour ceux qui n’ont pas l’ADSL, sur un CD envoyé par courrier. La plupart des dépouilleurs s’attachent à une commune à une époque donnée, parce qu’ils y recherchent un ancêtre. Mais certains font ce travail ‘ pour la beauté du geste ‘. Tous doivent déchiffrer les actes un par un et entrer les données dans le tableau Excel tout prêt. Plus le registre est ancien, plus la lecture est difficile. Heureusement, le groupe compte quelques spécialistes du décryptage de manuscrits. Les fondateurs de Marne Archive sont toutefois conscients que des erreurs se glissent inévitablement dans les résultats.Dans le groupe ont été désignés des ‘ cantonniers ‘, responsables de dépouillement de toutes les communes d’un canton. C’est à eux que les autres bénévoles rendent leur travail, transmis ensuite au webmaître, Christian Barrilliot. Après un an de travail, environ 300 communes sont en cours de dépouillement sur les 645 que compte la Marne. Une petite partie est même totalement dépouillée. Ainsi de Pierry, village natal de Christian Barrilliot, dont tous les actes depuis 1674 sont disponibles. Tout ce travail est destiné à être partagé. Sur le site Marne Archive, les archives des communes entièrement dépouillées se consultent à l’aide d’un moteur de recherche.

A la disposition des internautes

Pour les autres communes, on feuillette les pages de noms classés alphabétiquement. Quand un internaute tombe sur un ancêtre, il voit aussitôt qui détient le CD comportant la photo des actes qui l’intéressent. Il peut alors lui demander très simplement une copie numérique par courriel. Pas besoin de se déplacer dans la Marne ! Les visiteurs, mais aussi certains dépouilleurs, sont d’ailleurs bien loin du pays : au Brésil, en Australie ou encore en Californie. ‘ Nous rendons service aux généalogistes qui sont trop loin pour venir aux archives. Mais aussi aux archives, car moins de gens viennent consulter les originaux et cela les protège ‘, analyse Jean-René Maillard.Cette aventure qui a commencé sur un coup de c?”ur a pris une ampleur qui surprend presque ses promoteurs. ‘ Je m’inquiète à propos de la pérennité du système ‘, confie Christian Barrilliot. Et pourtant des améliorations sont toujours envisagées. Il serait utile de pouvoir cliquer sur un lien pour afficher directement la photo de l’acte. ‘ Oui, mais le coût en stockage serait énorme. Lhébergement du site est notre plus grosse dépense : 200 euros par an ‘, constate le webmaître de Marne Archive. Autre angoisse : voir toutes les données aspirées et mises en vente par un de ces indélicats qui sévissent dans le monde de la généalogiewww.marne-archive.com

🔴 Pour ne manquer aucune actualité de 01net, suivez-nous sur Google Actualités et WhatsApp.


Isabelle Boucq