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Un volontarisme affiché en matière d’offshore

Dès 2005, le Maroc a misé sur l’exportation de prestations informatiques vers l’Hexagone comme relais de croissance. Dix mille ingénieurs travailleraient désormais dans ce domaine. Malgré les mesures prises en matière de formation, le marché de l’emploi manque de profils expérimentés et d’experts.

Le Maroc est de loin le pays nord-africain le plus volontariste en matière d’offshore IT. En 2005, l’exportation de services informatiques figurait parmi les secteurs prioritaires du plan Emergence, vaste programme d’investissements sur des secteurs économiques clés. Ambition affichée : devenir le leader de l’offshore francophone et hispanophone, même si cette stratégie est surtout orientée vers l’Hexagone. Puis le Pacte national de l’émergence industrielle (2009-2015), ou plan Emergence II, est venu renforcer cette première série de mesures.Concrètement, le gouvernement du royaume a mis sur pied des zones franches consacrées à l’externalisation des prestations informatiques. Première à sortir de terre, et de loin la plus avancée, Casanearshore est la vitrine de cette politique. Campus à l’américaine, immeubles et bureaux modernes, sécurité à l’entrée de la zone, réseau télécoms aux normes internationales… ce site suit les traces, en version plus modeste, de Bangalore, la référence en matière d’offshore IT. Sur un parc de 53 hectares, à cinq kilomètres du centre de Casablanca, s’est construit un immense complexe immobilier qui accueillera à terme jusqu’à 26 000 emplois. La deuxième zone la plus avancée, Rabat Technopolis, est plutôt un pôle de compétitivité, l’exportation des services informatiques n’étant qu’une des filières. Au final, ce sont cinq lieux qui seront consacrés à cet offshore.

Les grandes SSII françaises attirées par les incitations fiscales

Le programme immobilier va bon train. Les deux premières tranches de Casanearshore sont opérationnelles et l’achèvement des deux dernières est prévu pour 2012. Une partie de Rabat Technopolis est également occupée. La majorité des grands prestataires de l’Hexagone ? Logica, Accenture, Capgemini, Atos, Steria, GFI et Bull ? se sont installés dans le royaume, attirés par le cadre incitatif : exonération d’impôt sur les sociétés pendant les cinq premières années (réduction de 50 % au-delà), impôt sur le revenu plafonné à 20 % pour les salariés, subvention pour la formation des personnes embauchées (jusqu’à 5 800 euros sur trois ans pour un ingénieur). Seule condition : réaliser 70 % du chiffre d’affaires à l’export. Au total, une cinquantaine d’entreprises sont installées à Casanearshore et une vingtaine à Rabat Technopolis, selon Mohamed Lakhlifi, président de la Fédération des technologies de l’information, des télécommunications et de l’offshoring (Apebi). Dix mille ingénieurs travailleraient dans les services informatiques délocalisés. L’activité historique des centres d’appels fournissant encore le gros des troupes (42 000 salariés).Paradoxalement, le plus délicat pour le Maroc est de satisfaire la demande. Malgré la crise qui sévit en Europe, la croissance dans l’offshore IT reste à un niveau élevé (environ 20 % par an), selon l’Apebi. Le programme de formation des ingénieurs, lancé parallèlement au plan Emergence, a tardé à porter ses fruits. De 4 300 diplômés en 2006, dont 1 500 informaticiens, leur nombre devait passer à 10 000 en 2010, toutes disciplines confondues. S’il est difficile de dire si le chiffre a été atteint, le flux d’informaticiens sortis des écoles semble désormais suffisant. “ Nous n’avons plus de souci pour recruter les profils juniors, souligne Mohamed Lakhlifi. Sauf sur les expertises, notamment dans les ERP. ” Des tensions persistent sur les profils de managers et de middle management, assure la société Medz Sourcing.Après une période de surchauffe il y a deux ans, l’inflation salariale serait, elle, sous-contrôle (de 4 à 5 % par an en moyenne). Avec un salaire d’ingénieur débutant s’élevant à 1 400 euros par mois charges comprises (supérieur à celui d’autres zones francophones, comme la Roumanie), le Maroc ne peut plus miser sur le seul bénéfice coût. “ Des réflexions sont en cours au sein de l’Apebi pour voir comment l’on pourrait proposer des centres d’excellence ”, lance Mohamed Lakhlifi. Autre piste de développement : l’externalisation de processus métier, considérée à l’origine comme l’activité la plus prometteuse. D’autant que, depuis l’adoption de la loi relative au traitement des données à caractère personnel, équivalent marocain de notre loi Informatique et libertés, un des principaux freins est levé.

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Xavier Biseul et Olivier Discazeaux