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OVH, l’hébergeur qui voulait bouter les pirates hors de ses serveurs

Le 1er août 2008 le fondateur d’OVH partait en guerre contre les pirates du P2P qui abusaient des serveurs de l’hébergeur. Quelques jours plus tard, il revenait à des propos plus mesurés.

‘ Maintenant on ferme le serveur immédiatement et on casse le contrat dans la foulée. Les sommes payées ne sont pas remboursées. Il n’y a pas de discussion possible. […] Notre réseau n’a pas vocation à
devenir une poubelle d’Internet où l’on peut trouver n’importe quel DivX, .exe ou MP3 en quelques minutes. ‘
Bigre ! En lisant ce post envoyé sur un forum de l’hébergeur OVH par son fondateur, Octave Klaba, le 1er août dernier, il est des pirates qui ont dû voir leur vie défiler en quelques secondes. Le ton était ferme. Il ne
souffrait pas de débat. Le sort en était jeté. Une simple alerte lancée sur la présence d’un fichier illicite sur un serveur d’OVH, et c’était promis les pirates du P2P allaient disparaître une fois pour toute du paysage…Mais l’initiative de l’hébergeur semble avoir fait long feu. Il aura suffi de trois petits jours à OVH pour revenir à des propos plus mesurés. Le 4 août, la société adressait, en guise d’explication de texte, un courriel à ses
clients. On y apprenait que le phénomène (l’utilisation malveillante des capacités de l’hébergeur) concerne entre 300 à 400 serveurs sur les quelque 40 000 que gèrent la société.Mais au lieu d’enfoncer le clou dans sa lutte contre les pirates du P2P, OVH s’en tenait à une interprétation très personnelle de la ‘ riposte graduée ‘. ‘ Les alertes que nous recevons
vont être renvoyées automatiquement aux clients concernés,
écrit alors Octave Klaba. Au bout de trois alertes, le serveur sera suspendu avec la possibilité de récupérer les données, mais la nécessité de réinstaller le
système. ‘
Si les incidents venaient à se reproduire ‘ au bout de trois alertes, OVH interviendra encore, mais pour suspendre le serveur et casser le contrat. Le client pourra toujours récupérer
ses données. ‘

Des serveurs à bas coûts prisées par les pirates

Cette mini volte-face illustre à merveille l’embarras d’un hébergeur qui entraperçoit les limites d’un modèle économique. ‘ Les pirates ont naturellement tendance à se diriger vers des prestataires qui leur
proposent d’être hébergés sur des serveurs à bas prix. Il y a une différence entre un serveur disponible à 19 euros par mois et une machine accessible à partir de 50 euros ‘,
commente Blaise Thauvin, directeur
technique d’Amen.‘ Dans les gammes de prix plus élevées, vous aurez des machines utilisées par des professionnels sérieux pour des bases de données ou du PHP. Au niveau technique, il est bien évident que pour échanger illégalement
des fichiers, un simple serveur suffit, peu importe ou presque sa puissance. ‘
L’essentiel pour ces applications est d’avoir une bande passante élevée.Amen gère 3 500 serveurs dédiés. Pour éviter les dérapages massifs, la société a mis en place il y a deux ans une procédure d’identification de ses clients (vérification de leur adresse physique, numéro de téléphone,
photocopie de la carte d’identité…).Autant de méthodes sur lesquelles les hébergeurs qui misent sur un gros volume de clients font souvent l’impasse. Mais la médaille a son revers. Outre les déboires judiciaires, le prestataire s’expose à de nombreux cas d’impayés,
susceptibles de nuire à long terme à son équilibre financier. Car dans le même temps, il lui faudra payer la bande passante générée par l’activité (légale ou non) de ses serveurs. OVH semble aujourd’hui à la croisée des chemins. Partagé entre la
volonté de faire le ménage parmi ses clients et le désir ne pas voir une grande partie des internautes s’exiler vers la concurrence.

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Philippe Crouzillacq