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‘ Luc Chatel, fossoyeur de l’e-commerce ? ‘

Catherine Barba, la fondatrice de Cashstore.fr, s’en prend aux mesures de la loi Chatel ‘ qui prétendent renforcer les droits des consommateurs ‘.

‘ Depuis hier [1er juin 2008, NDLR], la loi Chatel est entrée en vigueur. Parmi les nouvelles mesures qui prétendent renforcer les droits des consommateurs, cinq concernent la vente à distance et
l’e-commerce. Plus de 36 000 sites ?” autant que de communes en France ?” sont directement concernés par cette loi. Pourtant, pas un seul acteur, pas même ceux du Top 20 qui réalisent à eux seuls plus de 80 %
du volume de la vente en ligne, n’a été consulté.Le respect des acheteurs par les commerçants en ligne est un sujet qui fait presque partie de mon ADN, à double titre : consommatrice en ligne depuis plus de dix ans, inconditionnelle testeuse de tous les sites marchands, je
suis aussi professionnelle de l’e-commerce où, en dépit d’un âge encore peu canonique, je fais figure de mamie du Net.Aujourd’hui, l’e-commerce procure satisfaction aux 20 millions de Français qui le pratiquent. Les sites offrent des conditions générales de vente reposant sur le commerce en général et le commerce par correspondance en
particulier ; ils en respectent la déontologie et proposent à leurs clients de vrais services avant et après la vente, déterminants dans un contexte hautement concurrentiel. Résultat : le nombre de personnes ayant confiance en l’achat en
ligne a augmenté de 14 % par rapport à l’année dernière, selon la Fédération de l’e-commerce et de la vente en ligne (Fevad).Bien sûr, comme dans tous les secteurs, on rencontre aussi des acteurs peu scrupuleux, mais, sur Internet, ils sont faciles à débusquer : les mauvais élèves sont les marchands qui ne communiquent pas d’informations légales sur leur
site. Une simple lecture des conditions générales de vente permet souvent de se faire une juste idée du commerçant, et de passer son cyber-chemin si ce dernier ne fournit pas suffisamment de gages de sérieux.Par ailleurs, blogs, forums, sites d’avis de consommateurs ne manquent pas, qui prodiguent mises en garde et conseils pratiques de clients et offrent le récit parfois édifiant de leurs expériences : l’occasion de découvrir que ce
frigo 30 % moins cher que l’enseigne du contrat de confiance vous sera plutôt livré sur le trottoir, ou que cette petite robe griffée à -70 % n’arrivera probablement dans votre placard que de longues semaines après votre commande…

Sans risque pour l’acheteur responsable

Les chances de survie à moyen terme d’un marchand peu sérieux sont faibles en comparaison à d’autres canaux où l’information n’est pas aussi simple à obtenir ! Luc Chatel se trompe de combat : l’enjeu n’est pas tant d’alourdir
les contraintes des e-commerçants, déjà bien encadrés par la réglementation de la vente à distance, que de responsabiliser les consommateurs. D’autant que les abus contre lesquels la loi Chatel est censée protéger les acheteurs ne sont commis que
par une minorité d’acteurs, qui n’appliqueront sans doute pas plus cette loi que les réglementations existantes.Pour un acheteur responsable, Internet est sans risque parce qu’il est aisé d’éviter les mauvais sites, et parce que les e-marchands ne savent que trop le prix d’un bouche-à-oreille négatif pouvant toucher en une seule journée des
centaines de milliers de clients potentiels. Les 500 e-marchands dont nous sommes partenaires s’engagent à respecter et protéger leurs clients, et sont favorables à toutes les dispositions allant dans le sens de plus de transparence entre
e-marchands et acheteurs, gage de confiance accrue dans la vente en ligne.La confiance, parlons-en… Avec 99,6 % d’intentions de rachat en ligne à l’issue de Noël 2007, il serait bon que M. Chatel cesse de brandir des chiffres invérifiés. François Momboisse, président de la Fevad, rappelle
d’ailleurs dans sa tribune ‘ Pourquoi tant de haine contre l’e-commerce ? ‘ du 31 mars sur le Journal du Net, que le taux d’anomalies relevé par la Répression des fraudes, sur
12 000 réclamations qui lui ont été adressées en 2007 concernant des sites de vente en ligne, n’est pas de 43 %, mais de 12 %.Pour mieux protéger les consommateurs et continuer d’augmenter la confiance dans le commerce en ligne, il est aujourd’hui urgent de revoir la formulation de plusieurs mesures de la loi. La mesure concernant le remboursement des frais
de port en cas de rétractation, par exemple, donne lieu à trop d’interprétations. Avec un panier moyen inférieur à 40 euros HT et une marge commerciale de l’ordre de 30 %, supporter des frais de port de l’ordre de 10 euros par colis
retourné n’est pas viable économiquement. Il en va de même pour les services clients, eux aussi visés par M. Chatel, et que les marchands ne pourront plus assurer efficacement.Les numéros surtaxés bientôt interdits amortissent tout juste les coûts d’un service de qualité, avec un personnel compétent, localisé en France. Comment financer un tel service demain ? Sans modification des textes, les
conséquences de la loi Chatel seront donc inévitablement, pour le consommateur, la menace de prix à la hausse et d’une détérioration du service : est-ce vraiment la meilleure façon de défendre les acheteurs, leur pouvoir d’achat et de créer la
confiance dans l’achat en ligne ?Luc Chatel, ne soyez pas le fossoyeur de l’e-commerce. Acceptez de rencontrer les professionnels pour revoir la formulation de vos mesures, et réfléchir avec eux à la meilleure façon de responsabiliser et protéger les
e-consommateurs. ‘Catherine Barba est fondatrice et présidente de Malinea (cashstore.fr). Ce texte a été publié dans l’édition du 2 juin du quotidienLa Tribune.

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Catherine Barba (Cashstore.fr)