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Les ministres européens protègent la loi antipiratage française

Réuni pour voter la réforme des télécoms, le Conseil des ministres européen a supprimé l’amendement des eurodéputés qui compromettait la riposte graduée à la française.

Nicolas Sarkozy peut se réjouir. Conformément à son souhait, le Conseil de l’Union européenne (1) a supprimé du projet de directive sur la réforme des télécoms un amendement plutôt gênant pour la future loi antipiratage française. Le désormais fameux ‘ amendement 138 ‘.

Proposé par les députés européens Guy Bono (PS) et Daniel Cohn-Bendit (Verts), cet amendement avait pourtant été adopté le 24 septembre dernier par la grande majorité des eurodéputés. Il interdisait en substance qu’une autorité administrative restreigne les droits ou les libertés fondamentales d’un citoyen sans faire appel à un juge. Et bloquait de fait la création de la Haute autorité antipiratage (Hadopi) telle qu’envisagée par le gouvernement.

Il y avait peu de chances que le Conseil de l’Union européenne (UE), actuellement sous présidence française, aille dans le sens des députés européens.

Ce jeudi 27 novembre, le texte proposé par la France, représentée par le secrétaire d’Etat chargé de l’Industrie et de la Consommation, Luc Chatel, a été voté par la quasi totalité des Etats membres. Un texte expurgé, donc, de l’amendement 138, mais dont le périmètre est, il faut le signaler, bien plus large (indépendance des régulateurs de télécoms, service universel, baisse du tarif du roaming, etc.). Seuls le Royaume-Uni, la Suède et les Pays-Bas se sont abstenus.

‘ Petits arrangements entre amis ‘

Le député Guy Bono ne cache pas sa colère à l’annonce du vote du Conseil :‘ Cet amendement posait manifestement des problèmes à Nicolas Sarkozy et à ses amis les majors, assène-t-il dans un communiqué. Ce n’est pas le Parlement européen ni la Commission qui sont éloignés du peuple mais le Conseil qui privilégie les petits arrangements entre amis ‘.

L’eurodéputé ne baisse pas les bras pour autant : ‘ Face à ce déni de démocratie, je redéposerai avec Daniel Cohn-Bendit cet amendement en deuxième lecture au Parlement européen ‘. En effet, l’affaire est loin d’être finie. La réforme des télécoms doit être débattue une seconde fois en février 2009 au Parlement, où l’amendement ne manquera pas d’être à nouveau plébiscité. Une seconde lecture suivra ensuite au Conseil, avec la position que l’on sait. En cas de désaccord, un comité de conciliation sera mis en place.

La Commission également critique sur la loi antipiratage

De son côté, la Commission européenne est à son tour entrée en scène dans ce dossier. En octobre, son président, José Manuel Barroso était resté sourd à la requête de Nicolas Sarkozy, qui lui avait personnellement demandé de ne pas soutenir l’amendement 138 : ‘ Cet amendement tend à exclure la possibilité pour les Etats membres d’appliquer une stratégie intelligente de dissuasion du piratage , avait motivé le président de la République dans un courrier confidentiel, divulgué dans la presse.

Depuis, la Commission a fait part d’un certain nombre de critiques à la France sur son projet de loi antipiratage, qui doit être avalisé par Bruxelles : sur la disproportion possible de la riposte graduée, les risques d’atteinte à la vie privée, la préservation du service téléphonique en cas de coupure d’accès ou encore les mesures complémentaires envisagées pour développer l’offre légale, etc. Des réserves largement partagées par les eurodéputés et auxquelles Paris devra apporter des réponses.

(1) Le Conseil de l’Union européenne réunit les ministres des 27 Etats membres, dont la nature diffère suivant le domaine en question (affaires étrangères, finances, affaires sociales, transports, agriculture, etc.)

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Julie de Meslon