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Ce que cache le prototype de smartphone Xiaomi à optique Leica M

Entre l’encombrement que représente une optique M, la préhension forcément bancale et le petit capteur 1 pouce, le prototype de Xiaomi 12S Ultra équipé d’une monture interchangeable est aussi étonnant… Que bancal. Mais au-delà de la campagne de communication, se cache une information clé : Xiaomi entend réellement s’investir sur le domaine de la photo.

L’image étonne et, avouons-le, fait saliver les photographes : un smartphone sur lequel on peut enficher une optique Leica M. L’appareil n’est pas un produit fini, mais un prototype développé par Xiaomi sur la base de leur 12S Ultra. Fleuron de la marque réservé à la Chine à l’heure actuelle, ce smartphone équipé d’un capteur 1 pouce de compact expert a profité d’un traitement de choc.

Lire aussi : Xiaomi signe un partenariat photo avec Leica et leur premier bébé sera lancé cet été  (mai 2022)

L’optique à 7 éléments de plastique a été retirée, une grande plaque de verre saphir a été apposée à sa surface. Un renfort du châssis a été intégré pour encaisser le poids des optiques. L’ensemble étant ceint d’une monture métallique, capable de recevoir les optiques M. Et le tour est joué : le premier smartphone « vraiment » Leica de l’histoire ! L’histoire ne s’arrête évidemment pas là. Il ne s’agit pas d’un produit final et on sent bien qu’il s’agit pour l’heure surtout d’une campagne de communication. Analyse d’un ovni photographique.

Des précédents jamais convaincants

Samsung Galaxy NX

Le concept du Xiaomi 12S Ultra est le premier vrai smartphone à optiques interchangeables. Par le passé, il faut se souvenir du Galaxy NX de Samsung, qui était un appareil photo à ADN de smartphone qui fonctionnait avec feu les optiques NX de Samsung (et ses très bons capteurs APS-C). Le chinois Yongnuo avait, comme le rappelle Engadget, lancé un produit un peu similaire en Chine en 2018, sans grand succès.

Sony QX1

Changer les optiques des smartphones a toujours été une forme de Graal : Sony avait tenté les modules connectés en Bluetooth avec son QX1 en 2014 (capteur APS-C). Motorola avait conçu (soi-disant…), en partenariat avec Hasselblad, des modules interchangeables physiquement scellés – produits qui ont fait long feu.

Fonctionnant avec un simple adaptateur mécanique, le concept de Xiaomi est le plus intéressant que nous ayons vu ces dernières années. Notamment grâce à l’aura de qualité des optiques M, dont la netteté, mais surtout le rendu (douceur des transitions, rendu des couleurs, etc.) sont très respectés dans l’industrie. Mais ce serait oublier de nombreuses barrières techniques…

Le souci du capteur 1 pouce : le coefficient multiplicateur

Oh, je joli capteur 1 pouce

28/35/50 mm : dans le monde des appareils photo télémétriques, ces trois focales sont la sainte trinité. Hors éditions spéciales, il y a :

  • quatre versions du 28 mm (f/1.4, f/2, f/2.8 et f/5.6)
  • cinq versions du 35 mm (f/1.4, f/1.4 version 2022, f/2.0, f/2.0 APO et f/2.4)
  • et pas moins de sept versions du 50 mm (f/0,95, f/1.0, f/1.2, f/1.4, f/2, f/2 APO et f/2.4) !

Outre les cadrages « naturels » ou « classiques » que ces optiques représentent, elle sont aussi celles qui sont les mieux adaptées aux télémètres – pas trop larges, pas trop zoomées. S’il existe chez Leica des ultra grand-angles – le Tri Elmar 16-18-21 mm f/4 ou le Summilux 21 mm f/1.4 par exemple – ce sont plutôt des exceptions que la norme.

Pourquoi rappeler ce fait ? Parce que ces optiques, qui représentent le gros des optiques M, ne se comportent pas de la même façon selon qu’elles sont placées devant le capteur plein format d’un Leica M, le capteur APS-C d’un Pixii ou le capteur 1 pouce du prototype de Xiaomi.

Bien plus petit qu’un plein format 24 x 36 mm, le capteur 1 pouce impose un coefficient de recadrage de x2.7 sur les valeurs susmentionnées. Ce qui nous donne :

  • 28 mm x 2,7 = 75,6 mm
  • 35 mm x 2,7 = 94,5 mm
  • 50 mm x 2,7 = 135 mm

Alors qu’on a affaire à des grands-angles (28-35 mm) et une focale dite « standard », ces optiques deviennent des téléobjectifs sur un si petit capteur. Formant ainsi un système demandant beaucoup de lumière (plus la couverture angulaire est faible, plus le besoin en lumière est important), qui plus est dépourvu de tout système de stabilisation ! Tout aussi ennuyeux, il faut rappeler l’absence d’autofocus de ces optiques 100 % manuelles. Si faire le point est peu gênant avec un 16 mm, réussir la même chose sur un sujet en mouvement avec un téléobjectif être une vraie gageure dès que le sujet bouge un peu.

Ce que la campagne de communication nous apprend

Tout n’est pas à jeter dans ce coup médiatique dont vous pouvez regarder la vidéo ci-dessus. Ni d’un point de vue technique, ni d’un point de vue informationnel. Du côté technique, Xiaomi a pensé les limites d’une telle intégration : châssis renforcé pour les optiques, adaptateur à visser pour respecter la distance de tirage optique, etc. Quand bien même un produit ne sortirait pas dans les prochains mois, le travail des ingénieurs est rarement perdu. On peut ainsi imaginer un Xiaomi/Leica phone avec un capteur APS-C, fonctionnant non pas avec des optiques M manuelles, mais avec des optiques TL plus modernes, compactes, avec autofocus. Et nativement conçues pour les capteurs APS-C, comme celui du Leica CL.

Cela ressemble moins à un laboratoire d'ingénieurs de Xiaomi qu'à un joli décors de cinéma catégorie futuriste
Cela ressemble moins à un laboratoire d’ingénieurs de Xiaomi qu’à un joli décors de cinéma catégorie futuriste…

En regardant la qualité de la vidéo de Xiaomi, on en apprend surtout qu’il s’agit d’une campagne de communication très bien faite. Tout est faux dans ce que l’on voit, comme les labos de recherche, les illustrations techniques d’un hypothétique produit fini. Ce qui signifie que tout a été pensé et préparé en amont. Le montage de la vidéo est bon, attrayant, le rendu des couleurs soigné, les éléments de design itou. Si cela ne nous dit pas si et quand un tel appareil pourrait sortir, cela nous renseigne cependant sur l’investissement de Xiaomi.

Après avoir damé le pion à Huawei qui travaillait avec Leica depuis des années, Xiaomi entend bien utiliser l’aura de la marque allemande au maximum. Et faire rêver autour de la photo et des smartphones. Si son concept nous paraît pour l’heure techniquement bancal, nous saluons néanmoins cet effort de continuer à promouvoir la « belle image » à base de belles optiques. Car les algorithmes ont beau être efficaces et magiques, ils manquent de poésie par rapport un beau Summilux 35 mm f/1.4 !

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Source : Engadget


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