Passer au contenu

Yann Chapellon (Le Monde Interactif) : ‘ Internet devient un élément du paysage ‘

Le directeur général des activités numériques du quotidien du soir revient sur le parcours de son site, Le Monde.fr, et décrypte les nouveaux usages d’Internet.

01net. : Existe-t-il une différence de ton entre Le Monde et sa déclinaison Internet ? Yann Chapellon : Nous avons d’un côté un quotidien qui a un contrat avec son audience, qui consiste à livrer l’actualité au moment de la parution du journal. Cela implique un certain recul dans le traitement de
l’information. Concernant Le Monde.fr, nous avons un contrat de lecture différent : il s’agit là de donner l’actualité à l’internaute au moment où il se connecte. Cela oblige à être plus factuel. Mais entre les deux, il n’y a pas vraiment de
rupture de langage. En revanche, s’il y a rupture, c’est sur les formats de diffusion. Cela va de l’intégration d’un commentaire audio, ou d’iconographies, à l’animation d’images. Ce sont des portfolios d’actualité que nous avons fait avec Magnum,
ou encore des expérimentations comme nous en avons fait pour la rétrospective de l’année 2003. Là, on entre dans une vraie dimension quasi cinématographique. C’est un format où vous avez l’image et le son, mais où vous n’êtes pas devant la télé.
C’est passionnant.La ‘ culture numérique ‘ du Monde est elle ancienne ? Le Monde a eu une activité numérique autour de sa production dès 1987, avec des services d’accès aux archives par Minitel et sur CD-ROM. Ces mises à jour trimestrielles sont toujours distribuées dans les centres
de documentation du monde entier. C’est à partir de cette activité que s’est monté, d’abord à titre expérimental, le site Le Monde.fr. A un moment donné, il est devenu évident qu’il fallait y consacrer des investissements plus
importants. Jean-Marie Colombani a alors décidé de filialiser cette activité et le Groupe Lagardère nous a accompagné dans cette filialisation. 2000 et 2001 ont été des années difficiles, car il fallait essayer de poser un modèle économique, pour
parvenir à la rentabilité.Le Monde.fr est-il une activité rentable ?Au départ nous sommes partis sur un système mixte. Aujourd’hui nos revenus sont diversifiés. Ils comportent une très forte proportion de publicité (à hauteur de 40 %), de la facturation aux entreprises et des abonnements en
provenance des particuliers. A ce titre Le Desk vient de dépasser le cap des 50 000 abonnés. Résultat, l’activité du site est désormais pérenne.Quel est le profil de vos internautes ?Globalement, dans les grandes masses, on sait qu’il est un peu plus masculin et plus jeune que sur le papier, on sait qu’il est très ‘ cadre actif ‘, mais cela commence à se compliquer quand vous agrégez des
populations qui viennent de l’étranger. Car là vous avez toutes les catégories de population. Cela représente aujourd’hui 30 % de notre audience. Mais une connexion de l’étranger ne nous renseigne pas forcément sur le profil d’un internaute.
Les ‘ cadres actifs ‘ sont des grands voyageurs. Quand ils sont en déplacement et qu’ils souhaitent faire un point sur l’info avec Internet, c’est un réflexe que d’aller sur Le Monde.fr.L’arrivée de nouveaux canaux de diffusion et celle de l’UMTS vont-elless modifier la donne d’Internet ?Personnellement, je ne le crois pas. A une époque, nous avons investi dans la problématique SMS. Nous nous en sommes plutôt désengagés. En revanche, nous avons investi assez lourdement dans des chaînes sur iMode et sur Vodafone Live.
Cela fonctionne avec des résultats satisfaisants. Mais on constate aujourd’hui qu’il n’y a pas de massification, ni de l’audience, ni des usages. Ce qui est pourtant le cas ailleurs en Asie et en Europe (en Hollande). Mais aujourd’hui le modèle est
japonais et il est fascinant. Avec l’UMTS, vu l’état des premiers terminaux mis sur le marché, on ne peut pas dire qu’il y ait quelque chose qui tienne là du nouveau média. Dans quatre ou cinq ans, il y aura peut-être une rupture en termes
d’évolution. Pour l’instant on cherche, mais on n’a pas trouvé.La presse en ligne a-t-elle un avenir ?Nous allons connaître des évolutions majeures dans l’appropriation d’un site, comme Le Monde.fr. Cela fait à peine un an que les gens utilisent massivement Internet avec l’ADSL. Je ne crois pas qu’en un an nous ayons déjà posé les
bases des usages de ce que ce sera Internet dans les cinq ou dix prochaines années. Il y a des choses nouvelles qui sont en train d’apparaître, par exemple autour du Wi-Fi. Pas forcément le Wi-Fi dans la rue, mais ne serait-ce qu’à la maison.
On voit apparaître, aux Etats-Unis, des familles qui disposent désormais d’un écran d’ordinateur par pièce. Et pas chez Bill Gates, de façon très massifiée. A ce stade, cela veut dire que, en tant que média, vous devenez un élément du
paysage…

🔴 Pour ne manquer aucune actualité de 01net, suivez-nous sur Google Actualités et WhatsApp.


Philippe Crouzillacq