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Test : PocketCHIP, une console à 50 € pour apprendre à programmer comme au bon vieux temps

Moitié console, moitié Raspberry Pi, moitié gadget, le PocketCHIP est un nano-ordinateur low cost assez génial, dédié à toutes les expérimentations.

« Ceci n’est pas une console de jeu », aurait dit Magritte, même si on peut tout fait jouer avec ce PocketCHIP. Ce n’est pas non plus un ordinateur même si on peut programmer et changer son système d’exploitation. PocketCHIP n’est pas non plus une plate-forme de développement, même si son processeur et ses multiples entrées/sorties (i/o) lui en confère l’aspect. 

https://www.youtube.com/watch?v=W3qkdB5bzLY

En fait PocketCHIP est un peu un mélange de tout ça, sans ordre particulier, un objet aussi ludique qu’intrigant pour lequel il nous a fallu déterminer s’il s’agissait d’un énième gadget ou d’un produit indispensable.

Vrai ordinateur à 9$

Plus fort que Rasberry Pi et consorts, la partie centrale du PocketCHIP est le CHIP (C.H.I.P. selon la graphie officielle), une mini carte-mère qui ne coûte que 9$. Oui, 9$ sans la conversion en euros et sans frais de port. C’est quatre fois moins cher qu’un Raspberry Pi 3. Et pourtant, la carte mère née d’un projet Kickstarter intègre à la fois le Wi-FI, le Bluetooth, un processeur central à 1 Ghz (Allwinner R8, ARM), un composant graphique, 512 Mo de RAM, 4 Go de stockage, deux ports USB (normal et Micro USB) et une sortie audio.

Autour de ce « nano-ordinateur », les équipes de NextThing ont développé un genre de « consolordinateur » appelé PocketCHIP. Un appareil à mi-chemin entre le PC avec son clavier, son système Linux (installable gratuitement en option) et ses interfaces de bidouille GPIO, et la console de jeu vidéo. Le jeu est d’ailleurs un élément ostentatoirement mis en avant dans la vidéo de présentation du projet, un clip qui fleure bon le do it yourself et le retrogaming.

PocketCHIP, de la carte-mère à la console

Dans sa version PocketCHIP, le CHIP reçoit un écran LCD tactile de 4,3’’ (10,92 cm) affichant 480 x 272 points, un « corps » équipé d’un clavier, une batterie et un carcan de plastique qui protège autant qu’il facilite la préhension de l’engin. Le résultat final est loin du niveau de finition d’une PS Vita mais le côté un peu brut et primitif a son charme. Attention, le PocketCHIP ne dispose pas de haut-parleurs (que vous pouvez acheter et souder vous-même cela dit) mais d’une simple prise jack. Il fait donc s’équiper d’un casque pour profiter du son.  

Le système préchargé  – qui peut être remplacé par une version Linux Debian, lire plus loin – est tourné vers un usage ludique puisqu’il intègre une interface de jeu appelée Pico-8 et du logiciel de création musicale Sunvox – renommé ici en « Make Music ». On trouve aussi un terminal de commande Linux, un éditeur de texte, un navigateur de fichiers et une aide hors ligne, tout cela sur l’écran central. L’écran de gauche permet de redémarrer/éteindre/flasher le système, celui de droite gère la connexion Wi-Fi, le son et la luminosité.

Le clavier est utilisé en mode « manette » dans les jeux vidéo mais peut vraiment servir à écrire du texte ou des programmes – soyons fous ! – pour peu que vous supportiez l’ergonomie barbare de ces boutons pression.

Linux, flashage et bidouillage

Si vous vous fichez de l’usage console, CHIP est compatible avec des versions spécifiques de Debian afin de l’utiliser comme un vrai ordinateur ou comme un serveur. Le système d’installation d’un nouveau système – flashage – est assez original puisqu’il s’appuie sur un plug-in du navigateur Chrome. Il permet, une fois le CHIP sorti du Pocket, deux prises reliées par un câble ou un trombone, de détecter la carte-mère reliée à l’ordinateur et de changer son système d’exploitation.

Si l’écran du Pocket est trop petit pour votre usage « ordinateur », vous pouvez acheter un module externe appelé DIP (plus généralement appelé « shield » dans la communauté Arduino) VGA ou HDMI qui permet de le relier à un écran PC. Il vous faudra le flasher pour cet usage mais attention : ainsi flashé le CHIP ne fonctionne temporairement plus en mode PocketCHIP. Il faut le reflasher en mode PocketCHIP pour le rétablir dans son état normal. Nous avons testé le CHIP uniquement en mode PocketCHIP, n’ayant pas un tel adaptateur sous la main.

Quant au bidouillage aussi bien logiciel que matériel, non seulement les équipes de CHIP invitent clairement à modifier leurs appareils, mais en plus elles donnent quelques clés. On trouve par exemple, au hasard de la documentation du CHIP, le moyen d’ajouter un microphone.

Bref, même si le PocketCHIP est pleinement opérationnel dès l’ouverture de la boîte, ses usages peuvent être démultipliés et tout est fait pour encourager le hack.

Expérience de jeu rustre

En mode console, CHIP s’appuie essentiellement sur Pico-8 (lire plus loin) qui permet de profiter d’un grand nombre de petits jeux développés par la communauté. Le système n’ayant pas pris en charge notre manette de Xbox 360 USB, nous avons donc dû nous contenter des commandes par défaut, à savoir la croix multidirectionnelle en haut à gauche et les boutons F10 et F12. Si la technologie de « boutons pression » du clavier n’est pas exactement au niveau de standards actuels, on arrive quand même à jouer à des jeux simples.

Jeux disponibles : le goût de l’amateurisme d’antan

Ni Ubisoft, ni Electronic Arts ne développent, à notre connaissance, de jeux ou logiciels pour le CHIP. Les jeux disponibles sont ceux proposés gratuitement par la communauté Pico-8 (lire plus loin). On trouve de tout, du clone de Pac-Man vraiment opérationnel (Pico-Man), en passant par la course de voiture ou le jeu de plateforme des années 80, jusqu’aux démos, concepts et autres brouillons de jeu. Les fans de jeux AAA en 3D resteront hermétiques, mais les bidouilleurs et autres amateurs de culture alternative devraient être aux anges.

Le PocketCHIP fleure bon l’amateurisme dans le bon sens du terme, et c’est finalement assez rafraîchissant. Et si vous avez envie de créer vos propres jeux c’est tant mieux, le système Pico-8 intégré est là pour ça.

Pico 8 : la console de jeu virtuelle devient réelle

Le PocketCHIP intègre Pico-8, un logiciel de création de jeu vidéo. Initialement, Pico 8 est une console virtuelle tout-en-un intégrant un terminal de programmation ainsi que des éditeurs de cartes, de sprites et de sons pour réaliser des jeux de plateformes à la Mario. PocketCHIP donne un corps physique à Pico-8 en étant la première « console » à permettre de jouer de manière native et nomade au déluge de petits jeux disponibles. Le langage utilisé étant de l’interprété (et non du compilé), il est même possible d’éditer chaque jeu (code, sprite, couleur, musique) pour en faire une version alternative. De quoi mettre facilement le pied à l’étrier.

Pour les plus doués, il paraît que la versoin OpenArena de Quake III fonctionne comme le prouve cette vidéo mais il faut mettre un peu plus la main dans le cambouis que nous ne l’avons fait.

De l’importance de la communauté

Les équipes de NextThing qui ont développé le PocketCHIP ont fourni un gros travail au-delà du développement de la carte en lui-même : outre la documentation ultra fournie des CHIP et PocketCHIP, le grand nombre de jeux disponibles grâce au choix de la bonne plate-forme (Pico-8) et le travail de communication a ameuté une importante communauté autour du produit avant même sa disponibilité sur le marché. Or, pour ce genre de produit, la communauté, c’est la clé puisque c’est d’elle qu’arrivent les programmes, généralement gratuits et open-source.  

De nombreuses autres cartes nano-ordinateurs (les « boards ») ont été lancées ces derniers mois en parallèle des Arduino et Raspberry Pi, mais seul CHIP nous semble réunir la masse critique d’utilisateurs suffisants pour sortir du lot.

Produit infini

Face à une vraie console ou un vrai ordinateur, le CHIP et cette variante PocketCHIP semble, de prime abord, assez fruste, pas vraiment un produit fini. En fait, c’est tout là son intérêt : face à la cohorte de produits fermés, l’ouverture totale, en hardware comme en code de ce PocketCHIP en fait en produit « infini » puisque tout est virtuellement possible, de l’amélioration du son – avec des shield – en passant par la création ou la modification de jeux vidéo, de programmes, etc.

Si vous êtes un consommateur avant tout, le PocketCHIP finira vite sur une étagère. Si vous êtes un curieux, un maker, un bidouilleur ou tout simplement si vous voulez comprendre comme fonctionne un ordinateur, comment on fait un jeu vidéo et vous amuser en faisant, le PocketCHIP est fait pour vous. Et à 49$ en précommande, il ne va pas vous ruiner.

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