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Pour Apple, les marges avant tout le reste

Le groupe à la pomme n’a pas pris le virage stratégique attendu, préférant préserver ses marges plutôt que de se lancer dans une guerre de prix.

De la keynote d’Apple, mardi soir, nous savions déjà presque tout à l’avance. Il restait cependant une grande inconnue: le positionnement tarifaire de l’iPhone 5C, le modèle présenté comme low cost devant permettre au groupe à la pomme d’inverser la tendance à la baisse de ses parts de marché, en partant à l’assaut des pays émergents.

Mais le 5C n’a finalement pas grand chose de low cost, à commencer par son prix: 549 dollars sans abonnement, à peine 100 dollars de moins que le 5S, le modèle haut de gamme. En France, le prix grimpe même à 599 euros. Et en Chine, premier marché mondial où Apple est à la traîne ? 733 dollars !

La stratégie d’Apple a pris de court la majorité des observateurs, qui avaient anticipé un prix beaucoup plus agressif. A 300 ou encore 400 dollars, l’iPhone 5C aurait pu investir le segment du milieu de gamme, jusque là délaissé par le fabricant. Et ainsi attaquer de front la domination d’Android, le système d’exploitation mobile de Google, qui équipe désormais 80% des smartphones vendus dans le monde.

Mais «Apple marche sur la corde raide entre croissance et profitabilité», explique Rotman Epps, analyste chez Forrester. Face à ce dilemme, la groupe dirigé par Tim Cook a ainsi choisi la demi-mesure. Certes, il a pris un virage important en lançant deux smartphones simultanément, une première depuis la sortie de l’iPhone en 2007. Mais sa politique tarifaire ne va en rien l’aider à gagner des parts de marché.

«Apple pense qu’il peut atteindre cet objectif sans sacrifier ses marges», indique Gene Muster, de Piper Jaffray. La société compte toujours autant sur son image de marque pour séduire les consommateurs. Cela suffit encore aux Etats-Unis, où l’iPhone représente plus de 40% du marché des smartphones. Mais déjà beaucoup moins en Europe, notamment dans les pays, comme l’Espagne, où les subventions des opérateurs ont quasiment disparu.

Il reste du flou

Et que dire des pays émergents ? L’exemple de la Chine est le plus significatif: Apple représente à peine 5% d’un marché où dominent les smartphones Android vendu entre 200 et 300 dollars. Si l’arrivée attendue de l’iPhone chez China Mobile, premier opérateur du pays, représente un premier pas dans la bonne direction, les prix élevés empêcheront un vrai décollage.

Oui, Apple continue bien de vendre des smartphones par millions – 31 millions entre avril et juin, pour être exact. Oui, ses profits rendent jaloux tous ses rivaux. Mais sa part de marché recule inexorablement: selon IDC, elle est tombée à 13,2% au deuxième trimestre contre 16,6% un an plus tôt. Le risque c’est de perdre son statut de plate-forme privilégiée des développeurs d’applications. Un statut qui ne cesse de s’affaiblir.

Le flou autour de la stratégie d’Apple ne s’arrête pas à ses tarifs. Il entoure aussi l’existence même de l’iPhone 5C, qui n’est finalement qu’un iPhone 5 coloré en plastique. Les fans de la marque regretteront certainement le choix de cette matière (eux, qui ne manquaient jamais de se moquer du plastique utilisé par Samsung). Sans oublier ces nouvelles coques de protection à trous qui sont déjà la risée du web !

Et une question se pose : pourquoi ne pas avoir tout simplement continuer à vendre l’iPhone 5 (qui va de fait disparaître des étals une fois les stocks épuisés) pour le même prix que le 5C ? Peut-être pour tenter d’innover et de retrouver une image «cool» auprès des adolescents, comme il l’a déjà fait avec sa nouvelle gamme d’iPod. Carolina Milanesi, de Gartner, avance l’hypothèse qu’Apple n’aurait pas pu préserver ses marges. Mais cela est possible avec un modèle en plastique, plus facile à assembler. Les marges, toujours les marges !

Retrouvez tout notre dossier sur les nouveaux iPhone.

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Jérôme Marin (correspondant permanent aux Etats-Unis)