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L’informaticien de métier,chouchou de la Net économie

La Net économie recrute des profils traditionnels d’informaticiens. C’est dans l’environnement de travail et l’accélération de l’apprentissage des techniques que se trouvent les vrais changements.

Le métier de webmaster est né d’Internet. Et, avec le Net, les directeurs artistiques deviennent des ” webdesigners ” : de nombreux métiers se réinventent ainsi au contact du réseau des réseaux. Malgré ces bouleversements, les informaticiens -la population la plus courtisée du monde Internet- exercent toujours la même profession. “Les technologies sont différentes, mais cela reste de l’informatique“, observe Alain Chéenne, consultant de la division informatique du cabinet de recrutement Michael Page, où une dizaine de consultants se consacrent uniquement à la chasse aux profils nés des besoins du Net.
Rien de plus banal, en effet, que l’intitulé des postes proposés par les entreprises qui recrutent. Il suffit de cliquer à la rubrique Internet des principaux sites d’emploi pour s’en convaincre. Au cours de cette promenade, on croisera l’incontournable développeur, l’indispensable administrateur de réseaux et systèmes ou de bases de données, l’inévitable chef de projet et l’inestimable spécialiste de la sécurité. Tous sont attendus autant par le génial détenteur d’une idée de site qui se lance sur la Toile que par la Web agency qui construit des projets aux technologies de plus en plus complexes, ou encore par la multinationale de la “vieille économie” qui veut contrôler sa stratégie Internet avec ses propres équipes de spécialistes.

Concernés par plus de 50 % des offres d’emploi

Symptomatique de cette tendance, l’Institut national de l’audiovisuel, qui gère la Bourse à l’emploi INA-Programme Média, remarque, dans une étude publiée en février dernier, que “les offres pour les professions liées à la filière développement informatique (administrateurs de réseaux et systèmes, intégrateurs, développeurs, ingénieurs) continuent de progresser en données absolues dans un marché en croissance, même si leur part diminue par rapport au nombre total des offres. Elles représentent 53 % des postes demandés en 1999, contre 70 % en 1998“. Cette Bourse d’annonces gratuites sur Internet se consacre aux offres d’emploi des métiers du numérique depuis 1996. Depuis deux ans, elle est devenue un point de passage quasi obligé pour les entreprises qui recrutent des profils liés au Web. Malgré leur proximité culturelle avec l’INA, les professions du graphisme et du traitement de l’image n’arrivent donc qu’en deuxième position du classement des postes les plus recherchés.
Le constat est cependant identique sur d’autres sites, comme Emploi Center, dont les offres très orientées Internet déclinent, elles aussi, un cortège de profils parmi les plus typiques des métiers de l’informatique. Après la tendance des débuts à employer des généralistes -d’où l’image d’Epinal des bidouilleurs représentés souvent par la fonction “fourre-tout” de webmaster-, on assiste aujourd’hui à une spécialisation des tâches. Les équipes s’étoffent, et, côté technique, on retrouve ses repères avec une répartitition des postes proche des services informatiques classiques. Le webmaster, quant à lui, se voit essentiellement attribuer l’animation du site. Le souci des recruteurs est de renforcer leur crédibilité technologique.
Même si, sur la Toile, les nouveaux usages doivent être inventées par les spécialistes du marketing, la maîtrise et la connaissance des innovations qui mettent en musique leurs idées sont l’apanage des informaticiens.
La création de site n’est plus seulement de l’intégration de pages HTML, remarque Christine Blache, directrice du cabinet de recrutement 9A+, spécialisé dans les profils nouveaux médias. Il faut aussi manier du code pour adapter les outils nécessaires à la construction de projets d’e-business. D’où cette très forte demande d’ingénieurs de développement.

Des robots intelligents

Olivier Courtois, trente-neuf ans, cofondateur d’Aktor Interactive, société qui développe et exploite le portail Robopost, confirme : “Nous avons d’abord créé nos propres robots intelligents, qui font la particularité du site, et nous les adaptons maintenant aux spécificités techniques de nos partenaires. ” Ces robots diffusent des annonces et des candidatures sur des sites dans les domaines de l’emploi, de l’immobilier et de l’automobile. “Un tel site, c’est 40 % de contenu et 60 % de technologie“, ajoute-t-il.
Au fil des offres d’emploi, s’ajoute à la forte composante de profils ingénieurs la très classique exigence d’une expérience du domaine. “En revanche, la condition habituelle de trois à dix ans est ramenée, dans le secteur Internet, à un à trois ans, observe Alain Chéenne. Tout autant pour les développeurs que pour les chefs de projet.
Les pionniers et défricheurs du Net sont alors favorisés : “Dans le contexte de pénurie, la valeur terrain prime, et l’on attache plus de poids à l’expérience des passionnés, remarque Christine Blache. On demande aux ingénieurs de développement encore plus de polyvalence, de veille et de créativité que dans l’univers monotâche des SSII.
Le parcours d’autodidacte d’Olivier Bitaud, vingt-cinq ans, titulaire d’une licence d’arts plastiques, est exemplaire : “J’ai appris seul chez moi tous les langages d’Internet. Cependant, pour faire du Web mon métier, il me manquait la compétence de l’administration des réseaux. Et cela, je ne pouvais pas l’acquérir ailleurs qu’en entreprise. ” Après cette formation suivie dans une SSII durant un an pour le compte d’une banque, il intègre, début 1999, la Web agency Himalaya. Il encadre maintenant une équipe de quatre développeurs. Si sa formation d’origine le porte naturellement à être plus attentif à l’ergonomie et au design des sites, son rôle est avant tout d’intervenir dans la dernière phase du projet, qui consiste à réaliser l’ossature technique du site après le travail de conception des webdesigners. Un travail qui s’étend à l’administration des sites hébergés par Himalaya. “Nous recrutons nos développeurs en fonction de leur expérience extraprofessionnelle, corrobore Olivier Courtois. Nos robots intelligents sont développés avec les langages de l’environnement Linux, qui sont en effet des techniques apprises, en général, chez soi après les heures de cours… Mais l’avantage des ingénieurs ou des universitaires diplômés en informatique est que l’on est sûr, en plus, qu’ils savent travailler de manière structurée et intégrer de nouveaux outils. ” De fait, l’autoapprentissage, l’autonomie et les capacités d’adaptation sont des qualités encore plus précieuses dans cet univers que dans celui des métiers traditionnels d’un service informatique d’une entreprise utilisatrice ou d’une SSII.

Difficile de s’adapter à un univers sans encadrement

L’autre grande différence notable est la structure de travail : la majorité des entreprises qui recrutent ces profils ont une taille moyenne de quinze à cinquante personnes, connaissent des croissances annuelles comprises entre 20 et 100%, et existent depuis moins de cinq ans. “Lorsque nous recrutons un profil pointu pour le compte d’une start up, nous nous demandons toujours si cette personne parviendra à survivre dans un univers sans encadrement“, avoue Christine Blache. Cette question peut également se poser dans les filiales des grandes entreprises créées pour lancer leur activité d’e-business, ou même dans un contexte “grand compte” -les repères habituels étant, là aussi, modifiés lorsque la cellule Internet n’est pas rattachée à la direction informatique. Ainsi, dans la quasi-totalité des cas, l’expert en technologie Internet et multimédia se situe au point de convergence entre les équipes des systèmes d’information et la maîtrise d’ouvrage.

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Sophie Maréchal