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Les espoirs déçus des places de marché B to B

Après leur entrée en fanfare sur la scène de la nouvelle économie, les places de marché professionnelles en ligne, qui devaient permettre aux entreprises d’économiser des milliards en transférant sur le Web les échanges avec leurs fournisseurs, tirent aujourd’hui la sonnette d’alarme.

Au premier trimestre 2001, les mauvaises nouvelles se sont accumulées aux Etats-Unis, notamment avec l’annonce par l’éditeur de logiciels pour les marketplaces Ariba, pionnier du secteur, de ventes proches de zéro pour les trois premiers mois de l’année, du licenciement d’un tiers des salariés et d’une perte financière là où les analystes attendaient un bénéfice.Le lendemain, son principal concurrent, Commerce One, annonçait lui aussi des prévisions de résultats très inférieures aux espoirs de Wall Street.” Il y a eu l’illusion que, du fait que ces applications étaient fondées sur le Web, les lois du développement de logiciels ne s’appliquaient pas. Un programme pouvait comme par miracle être conçu, débogué, installé en quatre-vingt-dix jours et fonctionner… alors qu’il n’avait jamais été testé ni certifié “, explique aujourd’hui Bruce Richardson, analyste de la société d’études industrielles AMR Research.Des milliers de places de marché B to B (business to business) promises il y a un an et demi, plusieurs centaines n’ont jamais dépassé le stade de l’annonce et, parmi les autres, nombreuses sont celles qui ont déjà fermé leurs portes ou côtoient le gouffre de la faillite.La société Ventro Corp. a fermé, le mois dernier, deux de ses principales places de marché, Chemdex pour l’industrie chimique et Promedix pour le milieu médical. Ce qui a occasionné une perte de 382,5 millions de dollars pour un exercice financier 2000 en déficit de 618,1 millions, un montant onze fois supérieur aux pertes de l’année précédente.Autre échec, plus discret, celui du deuxième constructeur mondial, Dell Computer Corp., qui a fermé en février Dellmarketplace.com.

Les fournisseurs manquent à l’appel

Seules les plus grandes places de marché en ligne, telle Covisint dans l’automobile, Transora dans les biens de consommation et Exostar dans l’aérospatiale et la défense continuent de faire parler d’elles, mais sans diffuser aucune information sur leurs résultats.” Nous ne sommes pas encore en état de nous vanter “, admet Mark Holman, directeur général de la société e2open, une des deux premières places de marché dans le secteur de l’électronique et des technologies de pointe. En effet, les dix entreprises fondatrices, qui espéraient effectuer des transactions à hauteur de 200 milliards de dollars en juin dernier, ne se sont même pas échanger un seul cent.Le premier facteur de déception est le manque de fournisseurs. “Personne, pas un seul des grands constructeurs ni une seule des places de marché, n’a mis en place un effort concerté pour attirer les petits et moyens fournisseurs”, constate Joshua Greenbaum, du cabinet Enterprise Applications Consulting.” Or, s’ils ne regroupent pas tous les fournisseurs possibles, ils n’atteindront pas la masse critique et les transactions resteront à l’état de communiqués de presse. “Moins de 1 % des fournisseurs mondiaux est connecté aux places de marché en ligne, selon Bruce Richardson, d’AMR Research.” L’exemple typique en est General Motors. Quand ils ont signé un contrat avec Commerce One en novembre 1999, ils ont claironné que, en dix-huit mois, leurs 30 000 fournisseurs prendraient part aux transactions. Ce délai expire le mois prochain et, à l’heure actuelle, je crois qu’environ quarante fournisseurs sont impliqués “, explique-t-il.

La simplicité, atout majeur et manquant

Plusieurs analystes restent néanmoins convaincus qu’il y a une place pour les transactions B to B dans le commerce électronique.” Si vous prenez l’image d’un pendule, la boule est partie trop fort d’un côté l’année dernière, et, maintenant, elle repart trop loin de l’autre “, déclare Peter Pashigian, vice-président de la division Digital Transformation Group de la banque d’affaires Morgan Stanley.Une autre analyste d’AMR Research a rédigé une étude sur les places de marché, publiée cette semaine, qui passe en revue les principaux acteurs parmi 1 400 sites dans dix secteurs industriels. “L’argent change de mains mais personne n’est encore rentable”, observe Joan Harbin.Quelques bonnes perspectives peuvent être espérées dans les secteurs du commerce de détail, de la chimie, de l’électricité et, dans une moindre mesure, de l’aérospatiale.Ces secteurs ont en commun l’avantage de la simplicité des transactions, les matières premières se révélant beaucoup plus aisées à vendre que des voitures, par exemple.La simplicité des échanges constituent, selon Joan Harbin, une condition essentielle du succès pour les places de marché B to B. Ces dernières doivent arrêter de croire qu’elles ne sont qu’une version grossiste des sites grand public de commerce électronique.” La transaction entre un vendeur et un consommateur n’est pas si complexe, dit-elle. Mais quand vous parlez de prévision et de conception faites en collaboration entre constructeurs et fournisseurs, ce sont des processus compliqués et qui prennent du temps. “Cette analyste, pourtant plus favorable aux places de marché que la plupart de ses collègues, savoue pourtant sceptique sur la capacité des sites B to B de mettre en place ces procédures de collaboration. “Nous devrons examiner la situation à nouveau dans douze à dix-huit mois pour le vérifier”, conclut-elle.

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La rédaction (avec Reuters)