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Les administrateurs béni-oui-oui, non merci !

La différence entre les entreprises qui gagnent et les autres ? Un conseil d’administration expérimenté !

Devinette qui fâche : quelle ressemblance y a-t-il entre World Online, Boo.com et Lastminute.com ? Réponse : des administrateurs médiocres !Car ces sociétés ont connu des déboires en Bourse liés à des erreurs de gestion, de communication ou de stratégie qui auraient été évitées si un conseil d’administration chevronné avait mieux guidé les dirigeants dans les moments clés de leur développement.Beaucoup de start-up européennes à fort potentiel ont souffert de cette carence. Certaines, leaders mondiaux potentiels, ont dû se vendre à des concurrents américains parce que leur conseil d’administration ne leur offrait pas le recul d’une stratégie à long terme…

Sun ou Cisco ont commencé sous la surveillance d'” aînés ” sévères

Aux États-Unis, le rôle des administrateurs est primordial dans les start-up. Inconnus au bataillon, les conseils béni-oui-oui ou purement prestigieux des entreprises françaises ! La mission de ces “aînés en business” a été inventée et développée depuis trente ans dans la Silicon Valley par les sociétés de capital-risque américaines.Les pionniers du venture capital de Menlo Park étaient tous, ou presque, d’anciens dirigeants des premières success stories de la vallée, les fabricants de semi-conducteurs Fairchild, National Semiconductor et Intel. Dans ces sociétés, la rigueur tenait lieu de culture managériale.Lorsqu’ils ont financé leurs premières start-up, les anciens managers devenus capital-risqueurs n’ont donc pas laissé la bride sur le cou des jeunes dirigeants. Ils ont exigé des reportings en temps réel sur tous les indicateurs, de la productivité au commercial. Ils ont imposé des règles obligeant le management à demander leur autorisation avant de prendre des décisions importantes. Au fur et à mesure que l’entreprise réussissait, les managers jouissaient d’une liberté plus grande.Les résultats ont été à la hauteur : Sun Microsystems, Cisco ou Oracle ont toutes commencé sur ce modèle ; avec des changements de stratégie et de management imposés par un conseil toujours attentif, même après l’entrée en Bourse !Un autre facteur a favorisé l’émergence de cette culture aux États-Unis : l’environnement juridique et social, plus favorable en cas de faillite de l’entreprise. Dans la Silicon Valley, on s’attend à ce que les administrateurs expérimentés épaulent les jeunes entrepreneurs, voire se substituent à eux dans les moments cruciaux, alors qu’en France cette pratique est inhabituelle, car ils peuvent être facilement accusés de soutien abusif.De plus, lorsqu’une entreprise de technologie met la clé sous la porte aux États-Unis, ses dettes sociales et fiscales ne sont pas très importantes. Ce n’est pas le cas en France, où les charges sociales et les indemnités de licenciement s’accumulent très vite.Quoi qu’il en soit, le professionnalisme cher aux conseils d’administration de la Silicon Valley fait encore défaut dans la plupart des entreprises européennes. Il aurait fallu, chez World Online, un administrateur chevronné ayant déjà vécu une dizaine d’introductions en Bourse pour conseiller la fondatrice Nina Brink lors de son entrée en Bourse, en mars dernier, et la mettre en garde contre l’insuffisance des informations communiquées aux investisseurs concernant le rachat d’une partie de ses titres quelques mois auparavant…Cette pratique est assez courante dans la Silicon Valley et elle se fait en pleine lumière sous la haute vigilance des administrateurs ! Or lorsque la tempête médiatique s’est déchaînée contre World Online, aucun membre du conseil n’avait vécu pareille situation et n’a pu réagir avec rapidité et fermeté.

Leur qualité peut influer sur la valorisation de l’entreprise

De même, il aurait fallu, chez Lastminute.com, des administrateurs ayant déjà accompagné des sociétés en hypercroissance et capables de guider les jeunes dirigeants dans leur stratégie. Ils se sont heureusement entourés depuis quelques mois d’administrateurs expérimentés, qui les ont aidés à redéfinir les priorités, ou à mettre en place les infrastructures technologiques et humaines…Moralité : la qualité du conseil d’administration doit être, pour un investisseur, une des composantes majeures de l’analyse des sociétés qui s’apprêtent à entrer en Bourse.

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Eric Archambeau