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Le vrai faux retard français en matière d’interactivité

La France possède, grâce au Minitel, un ” historique ” de plus de 15 ans de relations électroniques à distance, d’où une règle émerge : il…

La France possède, grâce au Minitel, un ” historique ” de plus de 15 ans de relations électroniques à distance, d’où une règle émerge : il faut davantage tenir compte des usages et de la valeur d’usage des contenus interactifs que des technologies qui en sont les ” facilitateurs “. Le Minitel est significatif : terminal noir et blanc en mode texte, connexion à 1200/75 bauds [vitesse de transfert, ndlr] et 9 touches de dialogue en langue française. Sa supériorité, qui l’a fait durer au-delà du cycle connu de vie d’un produit, s’explique par un accès facile à l’information, une ergonomie grand public, des services personnalisés précis. Ainsi, 32 % des Français ont un accès Minitel (18 % à domicile, 14 % au travail). Il a atteint rapidement une taille critique d’équipement : 5,109 millions de terminaux, plus 3 millions d’ordinateurs adaptés. Une industrie de l’information et de communication à forte audience démocratique a vu le jour.Le cercle vertueux perdure malgré l’obsolescence de la technologie. Le kiosque, tarifé à la durée, permet une rétribution des 7 000 fournisseurs de services (16 500 codes) qui migrent sur internet et financent souvent leurs développements grâce au Minitel ! En 2000, 440 millions d’euros (2,913 milliards de francs) leur ont été reversés, pour un chiffre d’affaires total brut de 680 millions d’euros. Nous possédons donc le savoir-faire des modes de distribution électroniques, pour les services comme pour les produits physiques, mais sans avoir mesuré l’importance de la création ex nihilo que nous avons réussie.Le Minitel est resté à un palier technologique qui aurait dû être généralisé au niveau européen dès 1984, comme pour la norme GSM. Même si les contenus représentent la valeur première d’un média, le support concourt au succès de leur diffusion. Notre avance conceptuelle nous a ralentis dans l’effort d’actualisation provoqué par internet. De ce fait, les États-Unis ont progressé sur une nouvelle zone de chalandise quasiment vierge, dont ils ont pris facilement le leadership.La langue d’internet est majoritairement l’anglais, que ce soit pour la navigation, les contenus, les logiciels. Les Américains maîtrisent les méthodologies marketing (affiliation…), commerciales (places de marché), économiques (circulation sur les flux, modèles, échanges communautaires…), aidés en cela par le premier marché intérieur interactif du monde. Pourtant, nous pouvons, sous certaines conditions, être optimistes. Les contenus sont les moteurs de l’utilisation, et l’Europe en possède de tout premier ordre.

Maîtriser production et diffusion

Cependant, il faut rester maîtres de leur diffusion. Il serait paradoxal que les ” infomédiaires ” américains se les approprient pour en retirer la valeur ajoutée grâce à l’accès client. Créons les conditions de termes de l’échange qui nous soient favorables : nous sommes producteurs, mais aussi détenteurs d’un marché à haute solvabilité et profilé. La bataille de l’accès au client final devient fondamentale via les portails/annuaires/moteurs en situation d’oligopole (marketing des flux et de l’audience). Leur hégémonie peut leur permettre de capter l’essentiel de la valeur comme de dicter les conditions aux producteurs. Nous devons maîtriser la production et la diffusion. L’effet ” taille critique ” du réseau rappelle toute la puissance que les États-Unis ont générée grâce aux médias télévisuel et cinématographique. Le média interactif est beaucoup plus fort : il peut être personnalisé et être consulté n’importe où. Nous devons, à l’échelle de l’Europe, saisir les enjeux de cette révolution de l’interactivité. Nous en possédons la courbe d’expérience, mais aussi la puissance de l’offre et de la demande nécessaires.
*PDG de Raffour Interactif, cabinet d’études, conseil en stratégie interactive

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Guy Raffour*