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Le système de stockage Millipede, d’IBM, réinvente le phonographe

La nouvelle technologie mise au point par IBM pour succéder aux disques durs n’est ni électronique, ni magnétique, ni optique. Elle est purement mécanique. Big Blue travaille actuellement sur un prototype baptisé Millipede.

Le premier disque dur, né en 1956 dans les laboratoires d’IBM, était constitué de cinquante plateaux de 60 cm et avait une capacité de 5 Mo. Aujourd’hui, les disques de 3,5 pouces atteignent 36 Go, et, dès l’an prochain, des disques de 72 Go devraient être commercialisés et pourraient rapidement aboutir à 200 Go. Cependant, il est peu probable que l’on aille plus loin. En effet, au-delà d’une concentration estimée à 15 Gbit/cm2, la taille de la surface magnétique nécessaire pour stocker un bit de données devient si petite qu’elle serait susceptible de perdre spontanément son aimantation. Parmi les techniques de remplacement, celle proposée par IBM est assez surprenante, dans la mesure où elle est mécanique.

Une cure de jouvence pour le bon vieux pick-up

Le nouveau système de stockage sur lequel travaille le laboratoire de recherche IBM, à Zurich, fait appel au principe des phonographes : la gravure des informations dans la cire. Un bras muni d’une pointe semblable à celle d’un tourne-disque peut se déplacer sur un substrat en polymère, en abscisse et en ordonnée. En forme de U, ce bras est constitué de deux conducteurs reliés à leur extrémité par une résistance sur laquelle est fixée une pointe. Pour écrire un bit, la pointe est chauffée à 400 ?’C grâce à un courant électrique. La chaleur fait fondre le polymère, ce qui produit un petit trou. Pour la lecture, la pointe est à nouveau chauffée, mais à 350 ?’C, afin de ne pas faire fondre le polymère. Lorsque la pointe rencontre un trou, le bras se rapproche du substrat, ce qui a pour effet d’élever légèrement sa température. Sa résistivité augmente alors et la variation de courant peut être mesurée. Pour effacer les données, il suffit de chauffer la plaque entière. Le prototype, baptisé Millipede, comprend 1 024 pointes disposées selon une matrice 32 5 32. Cette procédure pourrait sembler banale, si elle n’était dérivée du microscope à force atomique AFM (Atomic force microscope), inventé dans le même laboratoire. Et c’est en cela que réside toute la prouesse technologique. Car la matrice de 1 024 pointes tient dans un carré de 3 mm de côté ! Les bras ont une longueur de 10 µ, soit presque le dixième de l’épaisseur d’un cheveu, pour une largeur de 0,3 µ. L’extrémité de la pointe, enfin, est de 8 nm, ce qui ne représente qu’une centaine d’atomes de largeur. Chaque pointe se déplace sur une surface de 92 µ 5 92 µ et, sur cette zone de l’épaisseur d’un cheveu, peut graver jusqu’à dix millions de trous, d’un diamètre de 50 nm.

Vingt fois plus dense que les meilleurs disques durs

La capacité atteint 10 Gbit pour l’ensemble des pointes, soit une densité de 80 Mbit/cm2. C’est déjà vingt fois plus que la densité maximale des disques durs actuels ! Les prototypes suivants devraient stocker 1 térabit sur un carré de 6,35 mm de côté, avec des débits atteignant 100 Mbit/s. Ces pointes sont fabriquées avec les mêmes techniques de gravure que celles des circuits intégrés, ce qui signifie qu’elles pourront être produites à bas prix, mais leur commercialisation ne devrait pas intervenir avant quatre à cinq ans.

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par Alain Coupel