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Le quadruple play d’Orange sera placé sous surveillance

L’Autorité de la concurrence indique que les offres de convergence lancées par l’opérateur peuvent présenter des risques pour la concurrence. Elles feront l’objet d’une attention particulière.

En réponse à Bouygues Telecom et à SFR, Orange compte lancer dans les semaines qui viennent une offre quadruple play, combinant accès à Internet, téléphonie fixe  illimitée, TV sur IP et téléphonie mobile. Celle-ci sera suivie de près par l’Autorité de la concurrence (ex-Conseil).

Dans un avis publié ce 14 juin relatif aux ventes croisées, elle estime en effet que « la mise sur le marché d’offres de convergence par Orange présente des risques pour la concurrence, notamment tant que la situation restera bloquée sur le marché mobile ». Ladite mise sur le marché « mérite une attention au cas par cas ».

« Nous serons vigilants et nous pourrons nous autosaisir si besoin », nous indique une porte-parole. Orange sera observé, en tant qu’opérateur dominant sur les secteurs de la téléphonie mobile et de l’accès à Internet, mais pas uniquement. Car pour l’Autorité de la concurrence, c’est le modèle d’opérateur universel désormais prôné par SFR, Bouygues Telecom et Orange qui pose question.

Des risques de distorsion

L’Autorité liste plusieurs problèmes que peuvent poser les offres « tout-en-un ». Tout d’abord, leur généralisation risque d’augmenter les « coûts de changement » pour les consommateurs : durées d’engagement longues, interruption de service en cas de changement d’opérateur, portabilité des numéros, etc. « Le risque est que les offres de convergence conduisent à cumuler ces coûts de changement, limitant ainsi l’intensité de la concurrence », note-t-elle.

Autre écueil : ces offres groupées risquent de verrouiller non seulement les clients, mais aussi les foyers par un « effet club ». « Lorsqu’un foyer dispose d’un abonnement Internet haut débit et de plusieurs abonnements mobiles, les avantages techniques ou tarifaires des offres de couplage et de convergence incitent ses membres à migrer vers le même opérateur pour tous leurs besoins. » Ce phénomène a des chances d’avantager les opérateurs qui disposent des meilleures parts de marché.

Troisième danger pointé par l’Autorité : les risques de distorsion de la concurrence. L’Autorité estime ainsi qu’un nouvel entrant comme Free risque de se heurter à des difficultés pour pénétrer le marché et de se « trouver gravement pénalisé dans l’exercice de la concurrence », voire de connaître à terme « l’éviction ». Le risque serait atténué si Free pouvait bénéficier d’un accord d’itinérance « non seulement pour la 2G mais aussi pour la 3G compte tenu du très fort succès des smartphones et des clés 3G », ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.

Pas de souci en matière de ventes croisées

Pour prévenir ces risques de verrouillage, l’Autorité de la concurrence préconise quelques mesures pour « fluidifier le marché » (1), que les opérateurs mettraient en place d’eux-mêmes ou à la suite de mesures législatives ou réglementaires.  Elle évoque par exemple la synchronisation du terme des abonnements aux services haut débit et mobiles ou la portabilité des services convergents.

En matière de concurrence, l’Autorité n’a en revanche pas de remarques à faire à Orange sur le cross selling, ou ventes croisées, qui consiste à utiliser les données commerciales détenues sur un marché pour se développer sur un autre, en proposant éventuellement des couplages. Fin 2009, l’Autorité de la concurrence s’était autosaisie sur cette question, avec un focus sur le secteur des télécoms.

SFR et Bouygues Telecom pratiquent déjà les ventes croisées, mais Orange, opérateur dominant, ne s’y était pas risqué jusqu’à présent, attendant une clarification par l’Autorité. C’est chose faite, puisque cette dernière considère qu’il n’y a guère de risque de distorsion de concurrence sur ce marché. L’Autorité indique que les bases de données de clientèle « ne constituent pas des informations privilégiées, non reproductibles par les concurrents : elles ont été acquises dans le cadre d’une compétition par les mérites ». De plus, la progression des parts de marché de SFR et de Bouygues Telecom semble davantage liée à l’attractivité de ce type d’offre qu’au croisement des données entre activités dans le fixe et le mobile.

(1) Le régulateur des communications électroniques et des postes, l’Arcep, doit remettre d’ici à l’été un rapport au Parlement sur le développement de la concurrence dans le cadre de la loi Chatel. L’Arcep y « analysera les éventuels freins à la fluidité du marché, en particulier dans la téléphonie mobile » et proposera « des pistes pour améliorer les dispositions de la loi », indique l’autorité.

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Guillaume Deleurence