Passer au contenu

Le meilleur des mondes?

Les publicités présentent Internet comme un monde merveilleux d’amitié et de fraternité. Ce que dément vigoureusement la réalité.

Des enfants, des vieillards, des Asiatiques, des Noirs, des Blancs, des femmes enceintes, des étudiants, des retraités… De Tiscali à France Télécom, de Cisco à IBM, l’image d’Internet que véhiculent les entreprises dans leurs spots télévisés est toujours la même : un lieu de fraternité, de respect, de liberté, une utopie mondiale, un meilleur des mondes de la communication. Seul le fournisseur d’accès Freesbee tourne cette image en dérision, mais c’est pour mieux convaincre les sceptiques d’essayer.Pourtant, la réalité quotidienne du Net est toute autre. Au mieux, c’est l’anonymat du commerce électronique : on atteint un sommet de convivialité lorsqu’un site est capable de vous reconnaître et de vous dire bonjour ; pour le reste vous êtes bien seul devant votre écran et les formulaires qui défilent. Au pire, ce sont les merveilleux forums, ces lieux de discussion ouverts, ces agoras modernes, qui se transforment en fait rapidement en champs de disputes, où les nouveaux venus sont méprisés des habitués et où les insultes ne tardent jamais à fuser.Internet serait aussi le lieu de toutes les rencontres. On discute sans se voir, l’apparence n’a plus d’importance, seule compte la convergence des idées. Bel idéal, mais il faut avoir assisté aux rencontres d’internautes dans le ” vrai monde ” pour se rendre compte que, bien souvent, les plus diserts devant leur clavier n’ont plus rien à se dire en face à face. Pire encore, le mail ou les messageries instantanées, où l’on croit parler alors que l’on écrit, sont source d’innombrables brouilles et incompréhension entre amis ” réels “. Que d’efforts faudra-t-il alors déployer autour d’un vrai café pour convaincre qu’un mot a mal été interprété.Cette réalité du Net au quotidien est d’autant plus niée par ses promoteurs qu’il s’agit encore pour eux d’effacer auprès du grand public l’idée, répandue aux débuts du Réseau, selon laquelle Internet est un repère de dangereux terroristes néonazis pédophiles. Si ces derniers n’ont malheureusement pas été éradiqués, ils sont néanmoins submergés par l’arrivée d’un public plus vaste, qui n’est pas plus intelligent, ni plus tolérant, ni plus cultivé depuis qu’il pianote sur un clavier. Comme le prophétisent, sans trop prendre de risques, les La Palice du numérique : “Internet ne sera que ce que les gens en feront.” Ce que l’on pourrait lire de manière équivalente : “Les gens ne seront pas ce quInternet en fera.” Enfants, vieillards, Asiatiques, Noirs, Blancs, femmes enceintes, étudiants ou retraités, ils resteront les mêmes.Prochaine chronique le jeudi 30 novembre

🔴 Pour ne manquer aucune actualité de 01net, suivez-nous sur Google Actualités et WhatsApp.


Jean-Baptiste Dupin