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La pression monte autour des portails mobiles

Avec le lancement de Vizzavi, France Télécom n’est plus le seul sur le terrain de l’Internet mobile. Mais, le décollage n’est pas attendu avant l’introduction du GPRS et des services personnalisés selon la localisation de l’abonné.

La campagne du WAP est bel et bien lancée… sur le plan du marketing du moins, si l’on se fie au battage médiatique orchestré autour de Voila Mobile et de Vizzavi. Plus en retrait, Bouygues Telecom ne s’engouffrera véritablement dans la brèche de l’Internet mobile qu’en octobre prochain. Officiellement disponible depuis le 19 juin sur le réseau SFR, Vizzavi _ qui associe Vodafone et Vivendi _ est organisé autour de huit chaînes thématiques : loisirs, sport, informations, finance, jeux, voyages, achats et vie pratique ; et offre deux cents services. Le montant initial de l’investissement s’élève à 200 millions d’euros, dont une moitié a été apportée par VivendiNet (Vivendi-Canal+), et l’autre par Vodafone.

Répétition générale avant le GPRS

Ses promoteurs ont fixé à Vizzavi un objectif similaire à celui de Voila Mobile. Pour y accéder, ils espèrent donc commercialiser un million de terminaux WAP d’ici à la fin de l’année. Vizzavi réaffirme sa spécificité en tant que portail multi-accès auquel on pourra se connecter indifféremment à partir d’un mobile ou du réseau fixe (en attendant le téléviseur, au début de l’année prochaine, avec l’arrivée de la nouvelle génération de décodeurs Canal+). Conscients ‘ d’essuyer les plâtres ‘, France Télécom et Vivendi reconnaissent être en phase d’apprentissage du marché. Ils comptent être définitivement prêts à la fin de l’année, avec le lancement commercial du GPRS (General packet radio service), une technique de transmission de données qui portera à 52 kbit/s le débit offert sur les réseaux cellulaires. Pénalisés, aujourd’hui encore, par la lenteur des connexions GSM, les opérateurs ont donc six mois pour se faire la main avec leurs bouquets de services sur le WAP.

L’aventure ne fait que commencer

Car la véritable échéance reste bien l’introduction du GPRS, notamment en matière de services professionnels. On peut alors légitimement s’interroger sur l’effervescence autour du WAP, alors que tout le monde reconnaît que le débit de 9,6 kbit/s constitue un sérieux handicap. La démarche, en réalité, est à deux niveaux. Il s’agit, d’une part, de se faire la main et, d’autre part, de banaliser le WAP, sachant que tous les terminaux l’intégreront d’ici à quelques mois. En attendant, pas question de placer la barre trop haut. Et les opérateurs, pour une fois, se montrent raisonnables en ce qui concerne les tarifs. Ainsi, la consultation des services est pour l’instant gratuite, les opérateurs ne se rémunérant que sur les coûts de connexion aux portails (autrement dit, à la durée dans le cadre des différents forfaits). Ce contexte devrait néanmoins évoluer rapidement. SFR envisage, en effet, de faire payer l’accès à certains services Premium dès le mois d’octobre.

L’enjeu de la localisation des abonnés

D’ici à cet automne, chacun va regarder de très près le comportement des premiers utilisateurs (France Télécom en revendique 30 000, un mois après le lancement de Voila Mobile). Reste aussi à trouver les applications réellement susceptibles de faire décoller ces portails, à l’heure où le contenu de celui de France Télécom laisse sur sa faim, tandis que Vizzavi parie sur la forte personnalisation de ses services. Quant à savoir si une application est susceptible de faire décoller le marché à elle seule (comme les jeux avec le phénomène i-mode au Japon), c’est une autre histoire. ‘ On n’en est qu’au tout début du processus ‘, reconnaît Evan Newmark, le président de Vizzavi. ‘ De toute manière, il n’y a pas de killer application universelle. Cela dépendra des pays et des modes de vie ‘, poursuit-il. Il n’empêche, chacun a d’ores et déjà quelques idées bien arrêtées dans la perspective du GPRS. L’une des clés du succès, dans les mois à venir, résidera dans les applications capables de prendre en compte la localisation de l’abonné. Phénomène peu connu : les opérateurs cellulaires savent en permanence où se trouvent leurs clients (dès qu’un portable est allumé, il est immédiatement repéré par la station de base la plus proche). On peut alors envisager une kyrielle de services _ météo, trafic ou spectacles _ répondant réellement à la localisation du détenteur du portable. Si vous vous trouvez à Nice, ce n’est sans doute pas l’état du trafic en région parisienne qui vous intéresse. Inversement, si la requête doit préciser le lieu où l’on se situe, elle est par trop fastidieuse à saisir.

Quand le portable se fait baladeur

Les premiers services associés à la localisation sont annoncés pour le début de l’année prochaine. De nombreuses difficultés sont à résoudre d’ici là, à commencer par savoir à qui _ l’opérateur ou le fournisseur de services _ appartiennent les éléments relatifs à la localisation de l’abonné. Difficile de trancher au pied levé, d’autant que la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil) veille au grain. ‘ Ce serait tout de même un comble que les opérateurs soient autorisés à commercialiser les éléments relatifs à la localisation, alors que ces données appartiennent à l’abonné ‘, relève, non sans malice, Pascal Anthoine, directeur de l’activité Internet Mobile de Micropole, un jeune intégrateur spécialisé dans le WAP. Une mise en garde dont les opérateurs _ qui se retranchent derrière le consentement que devraient donner leurs clients _ ont bien conscience. Parmi les autres types d’applications promis à un bel avenir avec l’arrivée du GPRS figure la distribution de contenus musicaux. Avec la banalisation du MP3, technologie de compression en vogue sur le Web, il devrait être possible de télécharger facilement le contenu de CD-audio sur un portable. Beaucoup de monde y pense… à commencer par Vivendi (maison mère de Cegetel, qui contrôle SFR). Ces perspectives ont été spectaculairement relancées après son mariage avec Seagram, dont la division Universal Music est le numéro un mondial du secteur. ‘ La musique est un élément clé dont Internet va révolutionner la distribution ‘, affirme Philippe Germond, président de Cegetel et responsable des activités Internet du futur ensemble Vivendi-Universal. Le potentiel de développement du WAP _ dans un contexte où le taux de pénétration des portables est bien supérieur à celui des PC _ est donc considérable, même si certains analystes ne comprennent pas que le portail du groupe Vivendi puisse être valorisé de plusieurs dizaines de milliards d’euros, alors que ce dernier vient tout juste d’ouvrir et que les abonnés restent à conquérir…

Plus ouvert que moi, tu meurs !

Enfin, le dernier obstacle à surmonter, à court terme, par le WAP, est le contentieux entre opérateurs cellulaires et certains fournisseurs de services, depuis que WapUp a obtenu du juge des référés des mesures contraignantes à l’égard d’Itinéris. L’objet du délit, on se le rappelle, est le verrouillage des terminaux de telle sorte qu’il faille nécessairement passer par le portail de France Télécom avant de pouvoir accéder à d’autres sites. Bien qu’assez légitime, cette démarche a été provisoirement condamnée, le juge des référés ayant imposé à France Télécom de délivrer à ses abonnés WAP le code permettant de ne pas passer par Voilà Mobile pour accéder à d’autres portails. Attention toutefois à ne pas confondre la préprogrammation associée à tel ou tel portail avec la passerelle de l’opérateur, à laquelle il est pour l’instant impossible d’échapper, tant chez SFR que chez Itinéris.

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Henri Bessières