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” La Net économie bouleverse les méthodes de travail des SSII “

Avec 17 % de croissance en France – 15,6 % si l’on prend en compte l’international -, le bilan 1999 du Syntec traduit – sans surprise…

Avec 17 % de croissance en France – 15,6 % si l’on prend en compte l’international -, le bilan 1999 du Syntec traduit – sans surprise – la très bonne santé des sociétés de services et des éditeurs de logiciels. François Dufaux, le président du syndicat des SSII, explique notamment les conséquences de la Net économie sur les méthodes de travail des sociétés de services.

En 1999, comme en 1998, les SSII ont enregistré une très forte croissance de leur activité. Les tendances sont-elles identiques d’une année sur l’autre ?


Le changement principal provient de l’avènement de la Net économie, qui nous a énormément profité durant le second semestre. Ces six très bons premiers mois nous ont permis de compenser une baisse d’activité observée sur des marchés plus traditionnels. Dans le secteur financier, notamment, du fait des grands regroupements bancaires ou d’un certain attentisme avant le passage à l’an 2000. Ou encore dans l’industrie, en raison d’une surabsorption des progiciels intégrés. Pour l’ensemble de l’année, une croissance de 17 % reste considérable. Même les entreprises de la distribution ont recours à nos prestations. Pour cette année, nous tablons sur une croissance plus prudente, de l’ordre de 14 à 16 %.
Pouvez-vous quantifier ce que la Net économie pèse exactement dans votre activité ?


Pas encore. Ce que l’on peut dire, c’est que, dans certaines grandes SSII, cela représente de 8 à 10 % de l’activité. Sachant que, par Net économie, nous entendons tous les projets liés au commerce électronique, à la mise en place d’intranets ou à la mobilité. Cette année devrait d’ailleurs consacrer la nouvelle économie.
Aujourd’hui, toutes les grandes SSII lancent leur ” e-division ” à grand renfort de publicité. L’explication est à chaque fois la même : une meilleure réactivité. N’est-ce pas le constat d’un certain retard, notamment par rapport aux ” e-VAP “, ces fameuses sociétés de services nées avec Internet ou issues du monde de la communication ?


Non. Quand une nouvelle technologie appara”t, nous créons des pôles de compétences inter- nes. Nous le faisons avec Internet aujourd’hui comme nous l’avons fait pour la téléphonie mobile. C’est une preuve de notre adaptation. Ce qui est nouveau, en revanche, c’est que les SSII intègrent de nouvelles compétences – en graphisme, par exemple.
Reste que les projets liés à la Net économie vont forcément influencer les méthodes de travail traditionnelles des SSII : réponse à un cahier des charges, intégration, recette, etc.


Plus la nouvelle économie se développe, plus le poids des prestations de conseil augmente. Aujourd’hui, on ne peut plus mettre en place un système d’information préétabli à partir d’un cahier des charges figé. Les méthodes de conception changent radicalement. La méthode séquentielle cède la place à une approche fondée sur des tests successifs. Ce qui est important aujourd’hui, c’est d’être le premier. Les systèmes d’information doivent donc répondre à un processus de conquête du client. Pour cela, il faut procéder par expérimentations parallèles, car le temps d’apprentissage diminue. Les cycles de projets sont plus courts.
Le piratage, il y a un mois, des plus grands sites de commerce électronique mondiaux a soulevé les faiblesses de l’économie du Web. Vous avez d’ailleurs créé, depuis, un groupe de travail à ce sujet. Quels seront ses axes ?

Il existe une liste de sujets urgents et préoccupants à traiter, et auxquels nous n’avons pas de réponses aujourd’hui : de la sécurité des transactions à la déontologie, en passant par la formation. Sans oublier un volet économique pour mesurer le phénomène. Jusque-là, ces préoccupations étaient partagées entre différentes commissions. Les premiers résultats devraient déboucher à la rentrée, et il n’est pas impossible que nous menions des actions avec le Cigref (Club informatique des grandes entreprises françaises, NDLR).
Vous avez toujours dénoncé l’application des 35 heures à votre profession. Aujourd’hui, la loi est votée, et les négociations ont démarré sur le terrain. Votre position a-t-elle évolué ?


Cette loi est catastrophique. Le nombre d’accords reste encore limité. Tout ce que l’on avait prédit se réalise – l’insatisfaction dans les entreprises, notamment. Nous risquons de nous retrouver dans une position concurrentielle difficile face à nos concurrents étrangers. Nous compenserons l’impact des 35 heures sur nos marges de deux manières. Par la modération salariale, d’une part, ce qui est totalement fou et accélère le départ des cadres à l’étranger, jeunes diplômés inclus. Et par la délocalisation, de l’autre. En clair, nous tiendrons nos objectifs en termes de chiffre d’affaires, mais avec d’autres ressources. Les SSII vont instituer des relations structurées avec des SSII indiennes, tunisiennes ou encore européennes. C’est un phénomène de fond. En attendant, nous aimerions que le gouvernement signe l’extension de l’accord Syntec de réduction du temps de travail par rapport à la loi Aubry II. Ça tra”ne un peu…
Pour résoudre le problème de la pénurie d’informaticiens, l’Allemagne a décidé d’accorder des milliers de visas aux informaticiens étrangers. Le Syntec Informatique est-il favorable à une démarche similaire en France ?

Il faut se méfier des effets d’annonce qui se cachent derrière de tels discours. Nous sommes toujours en situation de pénurie de spécialistes. Mais aujourd’hui, nous n’avons aucun problème pour faire venir un étranger. Il existe des facilités de visa, à condition que la personne soit ingénieur
Propos recueillis par Alain Ruello et Clarisse BurgerLe grand tournant Internet Force est de constater que la Net économie bouscule bel et bien le monde des services informatiques traditionnels. Tout change : le système d’information, les compétences, les prestations, les méthodes et le temps de travail, le recrutement, les rémunérations, les contrats, et même les clients ! Jusqu’ici, les SSII françaises ont vécu sur leurs acquis, et les moteurs de la croissance tournent toujours à plein régime depuis maintenant trois ans. Les grandes SSII ont-elles pris à temps le virage d’Internet ? A écouter François Dufaux, elles n’ont pas raté le tournant de la nouvelle économie. Et de fait, à en croire les toutes dernières études de PAC et de Markess International, les activités et les commandes dans les services informatiques traditionnels fléchissent depuis le premier trimestre. En revanche, les dépenses liées aux nouveaux projets e-business et à la gestion de la relation client sont en hausse.
Mais dans ce secteur à fort potentiel excellent également aujourd’hui les jeunes sociétés de services baptisées ” e-VAP “, spécialistes d’Internet et nouvelles entrantes à la Bourse. Bref, celles qui commencent à déranger l’ordre établi des grandes SSII et des cabinets de conseil. CBu

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par Alain Ruello et Clarisse Burger