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Excite At Home rattrapé par la grande purge des “dot-com”

At Home et Excite ouvraient l’ère des méga-fusions dès 1999. En 2001, le groupe est au bord de la faillite.

Le numéro 1 américain de l’internet à haut débit ?” 3,7 millions d’abonnés et un chiffre d’affaires 2000 de 629,2 millions de dollars (690 millions d’euros) ?” va-t-il faire faillite comme la première start-up venue ? La question est posée depuis que les dirigeants d’Excite At Home ont reconnu que le groupe, basé à Redwood (Californie), était complètement à court de cash et, par ailleurs, menacé d’exclusion du Nasdaq : “Nos liquidités pourraient s’avérer insuffisantes pour financer nos opérations jusqu’à la fin 2001“, ont-ils déclaré le 20 août à la Commission américaine des opérations boursières (la SEC). Cet aveu est d’autant plus grave que la compagnie avait levé 185 millions de dollars fin juin, le PDG d’Excite At Home, Patti Hart, ayant déclaré à l’époque que cette somme “excédait le besoin de cash pour l’année 2001“.

La Formule 1 du web…

Conclu sous le signe de la sacro-sainte convergence tuyaux-contenus, ce mariage à 6,7 milliards de dollars signé le 19 janvier 1999 entre le spécialiste américain de l’accès à internet par câble At Home et le portail Excite semblait pourtant prometteur.Parrain de l’opération : le numéro un mondial des télécoms AT&T (23 % du capital), propriétaire du premier réseau câblé américain (13 millions de foyers), rien de moins. Objectif ? Faire de la nouvelle entité le leader planétaire du haut débit, la Formule 1 du web, en proposant services interactifs inédits ou télévision à la demande à des millions de foyers à travers le monde. Visionnaire, l’opération ouvrait l’ère des mégafusions, qui allaient donner naissance aux empires AOL-Time Warner et Vivendi Universal…Avec de tels atouts, comment comprendre sa déroute ? Plutôt que de s’expliquer, la direction du groupe a remercié son cabinet d’audit Ernst & Young, qui avait pointé le premier le risque de faillite de son client. C’est un peu l’histoire du malade qui casse son thermomètre… Rex Crum, du site d’information spécialisé Upside, a son explication aux malheurs de la filiale d’AT&T : “ Ils ont parié les premiers à coup de centaines de millions de dollars sur le mariage du contenu et de l’ internet à haut débit, malheureusement AOL-Time Warner est devenu entre-temps un synonyme d’internet tout court pour des millions d’Américains. ” L’e-krach a fait le reste, le portail Excite ayant vu ses recettes publicitaires fondre comme neige au soleil. Résultat : après avoir annoncé au premier trimestre un trou phénoménal de 832 millions de dollars, Excite At Home a enregistré au deuxième trimestre 2001 une perte nette de 346 millions de dollars. Finalement, les pertes de l’exercice 2001 approchent déjà 1,2 milliard de dollars, soit la valeur de ses actifs au 30 juin ! Pire, selon Henry Blodget, de Merrill Lynch, le groupe est susceptible de brûler pour 200 millions de dollars de cash supplémentaires d’ici la fin de l’année…Qu’y a-t-il d’étonnant alors, que l’action de la société, cotée au Nasdaq, ait été massacrée à Wall Street : après avoir perdu 95 % de sa valeur en un an, pour toucher le fond à 0,5 dollar, elle devrait être prochainement ” délistée “, faute de pouvoir se maintenir au plancher fatidique du dollar. Incroyable destruction de valeur pour les actionnaires d’un groupe qui pesait 25 milliards en Bourse fin 1999 avec une action à 60 dollars ! Aujourd’hui, la filiale d’AT&T se dirige donc, à la vitesse du haut débit vers le célèbre Chapitre 11 de la loi américaine sur les faillites. Ce que sa direction reconnaît déjà : “Nous ne pouvons pas garantir que nous serons en mesure d’obtenir des financements additionnels à des termes acceptables, si jamais nous les obtenons.

600 emplois supprimés

Seul espoir du groupe, qui a déjà procédé à 600 suppressions de postes sur un effectif de 2 000 salariés : revenir à la case départ en se recentrant à 100 % sur les activités haut débit dAt Home. Mais aujourd’hui, personne ne veut plus d’Excite, à la cinquième place mondiale (37 millions de visiteurs), loin derrière Yahoo. En revanche, At Home est toujours le numéro 1 incontesté du haut débit aux États-Unis. AT&T a déjà fait savoir que les 3,7 millions d’abonnés de sa filiale ne subiraient aucune interruption de leur service internet rapide, même si le groupe dépose le bilan.Le géant des télécoms craint en effet que la déroute d’Excite At Home ne fasse chuter la valeur de son activité câble, AT&T Broadband, officiellement à vendre pour 50 milliards de dollars. Comcast, AOL-Time Warner et Microsoft, qui se disputent le contrôle d’AT&T Broadband, savent que le temps joue désormais pour eux…

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Jean-Christophe Féraud