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Estrepublicain.fr condamné pour avoir dévoilé la vie privée d’un député

Le quotidien a été sanctionné pour avoir divulgué sur son site des informations personnelles concernant l’élu. Ces éléments ne figuraient pas dans l’édition papier.

Ce qui est bien avec Internet, pour un journal, c’est que le problème de la place ne se pose pas. Quand on a beaucoup d’informations, on peut tout mettre en ligne sans avoir à faire un tri. C’est ce qu’a dû se dire L’Est républicain, qui a publié une série d’articles sur les démêlés juridico-financiers d’un député de l’Essonne.

Mais le journal a été rappelé à l’ordre par la justice. Il a été condamné à 1 euro de dommages et intérêts et à 3 000 euros de remboursement de frais de procédure pour atteinte à la vie privée, comme le révèle le site Legalis.net.

Le 14 janvier 2009, le quotidien publie deux articles, un dans son édition papier, l’autre sur son site Internet, consacrés aux dépenses du député en question. L’Est républicain s’appuie sur un rapport confidentiel de la cellule gouvernementale Tracfin, dédiée à la lutte contre le blanchiment d’argent. Ce document détaille des mouvements bancaires, mentionne des dépenses précises, des dates, les produits achetés, les moyens de paiement.

Le journal exploite donc ces données mais, mi-février, le député porte plainte pour atteinte à sa vie privée devant le tribunal de grande instance de Paris.

Illustrations concrètes

Celui-ci a rendu son jugement le 27 avril dernier. Il ne trouve rien à redire à l’article papier du quotidien. Il reconnaît la vocation « légitime » d’un journal à « informer le public sur certains des éléments révélés par ce rapport ». De plus, L’Est républicain pouvait «  en donner des illustrations concrètes afin de permettre à ses lecteurs de mieux comprendre les mécanismes [des dépenses du député, NDLR] et d’en apprécier l’ampleur ».

Pour le tribunal, les précisions issues du rapport et livrées dans l’article papier ne posent pas de problème quant au respect de la vie privée du plaignant. En revanche, sur son site, L’Est républicain fait l’erreur de permettre à ses lecteurs d’accéder à l’intégralité du rapport.

Là, le tribunal constate une « révélation exhaustive des très nombreux éléments de vie privée contenus dans ce document confidentiel », qui dépasse « très largement » la seule nécessité d’informer. Car le rapport permet ni plus ni moins que de reconstituer les faits et gestes du député pendant plus de deux ans. Ses déplacements, les noms des personnes qui l’accompagnent, ses relations familiales, les hôtels où il descend, les restaurants qu’il fréquente. Le rapport inclut également des coordonnées d’agences bancaires, des noms de personnes ayant reçu ou versé de l’argent, etc.

Le tribunal constate également que L’Est républicain a tenté de dissimuler, dans le rapport, certains patronymes et numéros de comptes « en les bâtonnant ». Mais il estime que le procédé est inefficace. En revanche, cela revient pour le journal à prouver lui-même qu’il avait « conscience que certaines des informations […] n’étaient pas utiles à l’information du public ».

L’Est républicain a donc été condamné à 1 euro de dommages et intérêts et à la publication sur son site Internet d’un communiqué judiciaire.

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Arnaud Devillard