L’année 2000 aura été exceptionnelle pour les équipementiers télécoms ! Avec un chiffre d’affaires cumulé de 346 milliards de dollars pour l’exercice 2000, les cinquante premiers constructeurs mondiaux ont affiché une progression globale de 25 %, comparée à leur chiffre d’affaires en 1999. Ce niveau record n’est pas surprenant si l’on considère la croissance de la plupart des ténors du secteur, qui ont profité à la fois de la dynamique de certains segments, mobile et optique en particulier, et d’acquisitions pour certains.
Des bouleversements radicaux
L’année 2000 demeurera néanmoins une exception, le retournement de la conjoncture, sectorielle et financière, ayant mené depuis à de profonds réajustements. Au sein du classement 2000, les constructeurs d’origine nord-américaine demeurent les plus représentés, avec vingt-deux sociétés classées comptant pour 45 % des ventes. L’Europe suit avec dix groupes et 36 % de chiffre d’affaires cumulé. Le Japon, avec treize groupes, ne totalise que 14 % des ventes, signe que ces fournisseurs sont encore peu tournés vers l’international. Enfin, les cinq constructeurs restants (5 % du chiffre d’affaires) sont tous issus du Sud-Est asiatique, Chine et Corée, à l’exception de l’israélien ECI. Cette distribution témoigne d’une concentration beaucoup plus forte chez les constructeurs européens, avec un revenu moyen de 12,6 milliards de dollars, nettement supérieur au revenu moyen issu du classement (6,9 milliards par équipementier).Sur un plan individuel, on retrouve, depuis trois ou quatre ans, les mêmes noms dans les neuf premiers. L’ordre et les écarts ont cependant largement évolué. L’année 2001 devrait apporter des bouleversements plus radicaux encore. En effet, si Lucent Technologies conserve son leadership à la fin 2000, c’est à la faveur du maintien d’Avaya Communication ?”chargé des communications d’entreprise ?” dans son périmètre, la cession annoncée en mars de la même année, n’ayant été effective qu’au 30 septembre, soit juste au terme de son exercice fiscal. On peut ainsi considérer Nortel Networks comme le numéro un virtuel de ce classement 2000, une place qu’il ne confirmera pas, de toute évidence, en 2001 eu égard aux coupes qu’il opère dans ses activités… et son effectif : plus de quarante mille licenciements effectués ou programmés, depuis le début de l’année, soit près de la moitié de son effectif au 1er janvier 2001. Dès lors, les deux spécialistes européens des mobiles, Ericsson et Nokia, apparaissent comme les prétendants légitimes à la tête de la hiérarchie mondiale, grâce à une progression très rapide lors des années passées. Nokia, en particulier, a doublé son chiffre d’affaires en deux ans. Cela, même si, pour eux aussi, l’année 2001 est d’ores et déjà en retrait sensible par rapport aux prévisions. Quant à Motorola, déjà affecté en 2000 par le ralentissement du rythme de croissance des mobiles, il se retrouve en sixième position, en recul de trois places par rapport aux deux classements précédents, derrière Alcatel.
Machine arrière
L’année 2000 aura cependant été marquée par d’importantes progressions des fournisseurs de plates-formes d’accès hauts débits ou de solutions dédiées à ce type de service, comme ADC Telecom (+ 53 %, 19e), ou encore, Alcatel (+ 38 %, 5e), tirant parti, pour sa part, de l’importance des marchés DSLam et BAS, et de la croissance forte des marchés de transmission optique.Ces derniers auront également porté Ciena, qui, aidé de ses commutateurs optiques, aura bondi de 80 %, mais dont les revenus de 859 millions de dollars le maintiennent pour l’instant à la porte du Top 50. Une situation que vivent également les spécialistes du monde IP, qui devraient poursuivre leur progression à un rythme très soutenu. Les plus dynamiques d’entre eux, Juniper Networks, Foundry Networks ou Redback, pourraient faire leur entrée dans notre classement dès le prochain exercice. En revanche, depuis quelques mois, un assainissement douloureux occupe le devant de la scène. Des groupes ont dû faire machine arrière après avoir recouru (exagérément ?) au vendor financing comme fer de lance marketing, en anticipant sur les dynamiques à terme des marchés, ou après avoir acquis au prix fort certains spécialistes des secteurs en développement.Au-delà des exemples déjà cités chez les majors, auxquels on peut ajouter Alcatel, des cas extrêmes apparaissent. JDS Uniphase, par exemple, affiche un déficit net de plus de 50 milliards de dollars pour un revenu de 3,2 milliards, en raison d’écarts d’acquisition faramineux ! Cisco Systems, dans une situation moins dramatique, a vu son rythme de croissance ralentir au cours de son exercice fiscal 2001 (+ 18 %, contre + 56 % en 2000), mais, surtout, affiche un déficit de 1 milliard de dollars lié à des charges exceptionnelles pour restructuration (8 000 licenciements) et à des écarts d’acquisition. D’autres, comme Corning (+ 21 %, 17e), pourraient faire face à d’importantes difficultés en 2001.Les perspectives générales pour 2001 semblent confirmer un recul global des marchés de l’ordre de 5 % en valeur, marqué par des disparités géographiques ?” fort recul aux États-Unis et en Europe, mais progression en Asie ?”, ainsi que des évolutions structurelles lourdes. Parmi celles-ci, on peut s’attendre à des baisses de rentabilité de certains équipementiers investissant dans l’UMTS, les coûts de développement étant lourds, et les premiers marchés restant faibles pour 2001. Ce qui expose particulièrement Nokia et Ericsson, qui figurent en tête du nombre de contrats remportés auprès des opérateurs européens. Ils sont, en outre, débordés par les japonais Nec et Matsushita, qui viennent de livrer le premier réseau 3G à NTT DoCoMo. Les fournisseurs nippons disposent ainsi d’un potentiel de livraisons important et d’une expérience qu’ils pourraient valoriser à l’exportation. On peut aussi s’attendre à des reculs importants des activités optiques et de transmission.
120 millions d’abonnés cellulaires en Chine
En revanche, du fait de l’augmentation du trafic sur les réseaux d’opérateurs, les segments les plus porteurs devraient être les réseaux de données (ATM, Ethernet et IP), ainsi que les réseaux mobiles (GSM et CDMA). L’impact de ces derniers est particulièrement visible en Asie du Sud-Est : la Chine dépasse désormais les États-Unis avec 120 millions d’abonnés cellulaires et 4 millions de nouveaux abonnés chaque mois !
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