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Dean Borgman, Président de Sikorsky : ” Assembler un hélicoptère prend deux fois moins de temps “

Sikorsky, filiale de l’Américain United Technology, l’un des tout premiers constructeurs d’appareils, place l’innovation au c?”ur de ses différents métiers.

Comment utilisez-vous les technologies dans la conception de vos hélicoptères ?Dans le design, où tout est fait sur écran informatique, mais aussi l’analyse. Pour le S92, les cinq partenaires internationaux ont tous imaginé les éléments de l’appareil sur écran. Le nez a été conçu et construit à Taiwan, le corps central au Japon, la queue en Chine, le pignon d’atterrissage au Brésil et le toit en Espagne. Nous avons tous utilisé le même programme et construit virtuellement l’appareil complet sur écran. Du coup, lorsque nous avons assemblé pour de vrai le tout premier hélicoptère, cela s’est fait deux fois plus vite qu’avant.Pourquoi ?Autrefois, on faisait facilement de mauvais calculs. Et au moment du montage, on découvrait des interférences. Là, tous ces problèmes sont résolus, avant, sur l’ordinateur.Quelles sont aujourd’hui les fonctions technologiques d’un hélicoptère ?Prenons le Comanche, un hélicoptère de reconnaissance de l’armée américaine, que nous développons avec Boeing. Du fait de la nature de sa mission, c’est l’appareil qui incorpore le plus d’automatismes et d’intelligence artificielle. Nous avons des capteurs à bord qui enregistrent des tonnes d’informations. Où est l’ennemi, où sont ses équipements ? Cette information est traitée dans l’hélicoptère et envoyée en même temps aux autres avions et à terre dans les centres de commande, près du conflit.Admettons qu’un membre de l’état-major à Washington veuille savoir ce qui se passe…Ces informations peuvent être envoyées partout dans le monde à travers un large réseau. Le système est très sophistiqué. On utilise la technologie à infrarouges pour repérer les cibles la nuit, celles-ci sont analysées, classées à bord… et on peut dire de suite aux autres pilotes quel objectif viser en premier.Utilisez-vous le même type d’innovations dans les hélicoptères commerciaux ?C’est différent, mais nous nous servons des technologies disponibles. Il y a énormément d’électronique dans le cockpit du S90, à commencer par le tableau de bord. Autrefois, tous les outils étaient mécaniques et il n’y avait pas de système de remplacement en cas de problème. Aujourd’hui, nous avons des écrans informatiques qui donnent au pilote toutes les informations nécessaires sur le moteur, la navigation… Et si le système tombe en panne, il y a de multiples capteurs pour pallier les défaillances. Dans le S92, nous avons aussi de nouveaux rotors très sophistiqués, qui incorporent une technologie permettant de survivre à un crash. En plus, ces rotors ont beaucoup moins de composants, ce qui fait que l’entretien est moins cher et les coûts de fonctionnement réduits.Pouvez-vous chiffrer l’économie ainsi réalisée ?Le coût direct de l’entretien d’un hélicoptère de ce type avoisine les 800 dollars [820 euros, ndlr] de l’heure. C’est deux voire trois fois moins cher que certains appareils concurrents. En effet, dès la phase de conception, nous avons imaginé pour le S92 le HUMS, ou Health and Usage Monitoring System. Cet ensemble de capteurs électroniques disposés à bord informent en permanence le pilote sur l’état de “santé” et le niveau de fonctionnement de l’appareil. Ces informations sont envoyées au sol aux équipes d’entretien. Maintenant, vous n’avez plus besoin de remplacer des équipements après un certain nombre d’heures de fonctionnement. Les capteurs vous di-sent en temps réel quelles sont les pièces qui ont effectivement besoin d’être renouvelées. Et vos coûts de fonctionnement ne cessent de baisser.Quelles sont les perspectives de développement de Sikorsky ?Nous faisons 85 % de notre chiffre d’affaires dans le secteur militaire. Depuis 25 ans, nous construisons des Black Hawks et l’armée US nous demande d’en moderniser 1 200. La Navy [la marine] va nous acheter 600 appareils et les Marines [l’infanterie de marine] veulent moderniser ses CH53. D’ici à 10 ans, nous espérons commercialiser Ucar (Unmanned Combat Armed Rotorcraft), un appareil complémentaire du Comanche, qui vole sans pilote et pourrait transporter des armes. Nous croyons aussi aux services d’entretien des appareils. À terme, ils représenteront 50 % de notre CA.Vos clients ne veulent plus gérer eux-mêmes les réparations et l’entretien ?L’armée travaille de plus en plus en partenariat avec nous. Nos clients pensent que le secteur privé est plus économique et plus efficace que le service public. Nos équipes savent tout sur le produit, travaillent vite et sont mobiles.15 % de votre chiffre d’affaires se fait dans le privé. Pour cette partie du business, dans quelle mesure êtes-vous dépendants de la conjoncture ?Certains experts disent que les ventes d’hélicoptères civils suivent le prix du pétrole. L’industrie pétrolière est une très bonne cliente. Les hélicoptères servent à l’exploration, ils font la liaison avec les plateformes offshore. Quand le prix de l’énergie grimpe, les commandes d’hélicoptères suivent.* à New York

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Caroline Talbot*