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Bernard Miyet (Sacem)

‘ Les FAI devront offrir des systèmes permettant à leurs abonnés de filtrer les réseaux de peer to peer illégaux. ‘

Bonjour à toutes et à tous, nous avons le plaisir d’accueillir Bernard Miyet, président du directoire de la Sacem sur le thème : ‘ Loi DADVSI : l’avenir de la création musicale menacé ‘.


Bonjour à tous. Il importe que le dialogue continue.Erell : Le texte satisfait-il entièrement les attentes de la Sacem ? Certains éléments vont-ils remettre en question le fonctionnement de la Sacem ?


Le texte est équilibré, mais il reste un certain nombre d’incertitudes en ce qui concerne les procédures de contrôle et l’effectivité des sanctions. Il ne devrait pas remettre en cause le fonctionnement de la Sacem.Michaël Goldberg : Pourquoi n’y-a-t-il eu quasiment aucun débat organisé au sein de la Sacem ? Pourquoi ces empoignades lamentables entre sociétés de gestion collective des droits ?


Il y a eu des discussions au sein de la Sacem et notamment des choix clairs opérés par le conseil d’administration, uniquement composé d’auteurs, de compositeurs et d’éditeurs de musique. Le débat a également été porté au sein de
l’assemblée générale depuis plusieurs années. La Sacem s’est efforcée d’éviter toute polémique vis-à-vis des sociétés de gestion collective des artistes interprètes qui ont pris des positions sans concertation préalable avec nous.zeffez : Pouvez-vous quand même rappeler les grands principes de cette loi… J’avoue être un peu dans le flou…


Le premier point c’est le rejet de la licence globale. Le deuxième, c’est la mise en place d’un régime de sanctions graduées contre des téléchargements illégaux. Le troisième point, c’est la responsabilité des éditeurs de logiciels
favorisant les échanges illégaux. Le quatrième, c’est le principe d’interopérabilité devant permettre de pouvoir lire les fichiers musicaux sur divers supports. Le cinquième, c’est le principe de légalisation des mesures techniques de protection
(DRM) dans le respect de l’exception pour copie privée.alice : Que change cette loi pour les artistes exactement ?


Elle doit maintenant permettre de pouvoir lutter contre les téléchargements illégaux, de manière à favoriser le développement d’offres légales diversifiées et attractives. Et, en conséquence, une légitime rémunération des ayants
droit.Erell : Pourquoi le texte distingue l’internaute qui télécharge et celui qui partage ?


Le terme partage est pour le moins équivoque dès lors que il s’agit de partager ce qui appartient à d’autres. C’est un terme qui a été galvaudé dans la mesure où les créateurs et les artistes sont les seuls à devoir en faire les frais. La
notion de téléchargement est différente puisque c’est simplement l’acte de reproduire sans mettre à disposition, celle-ci pouvant être toutefois légale ou illégale.Michaël Goldberg : Le DADVSI détruit le droit d’auteur français car il substitue implicitement l’usage de la licence d’utilisation au droit moral. Pourquoi la Sacem a-t-elle soutenu ce texte ?


Je ne comprends pas cette question, car le droit moral est entièrement préservé par la loi de même qu’il l’est dans les licences accordées par la Sacem à tout utilisateur.DragoonMaster : Les ‘ gros ‘ artistes, les plus souvent téléchargés, sont multimillionnaires, ce qui n’est pas le cas des personnes qui les écoutent ou qui les téléchargent. Le prix des CD audio
va-t-il enfin baisser ?



Le prix des CD a très sérieusement baissé. Au demeurant beaucoup plus vite depuis des années que l’ensemble des autres ?”uvres culturelles (places de cinéma en particulier). Nous nous battons aussi depuis des années pour obtenir une
baisse de la TVA, actuellement à 19,6 %.


Il est un proverbe chinois qui dit ‘ Quand les gros maigrissent, les maigres meurent ‘. Les premiers à faire les frais de la non-rémunération des auteurs seront les plus modestes d’entre eux. Combien d’employés
ont été licenciés par des maisons de disques, combien de contrats d’artistes modestes ont été rompus au cours des deux dernières années du fait de l’impact de la piraterie sur le marché du CD ?Gloom : Pourquoi la loi DADVSI propose-t-elle un contenu plus radical que les lois adoptées dans les autres pays d’Europe ?


Je vous propose de lire très précisément les lois adoptées dans les pays voisins pour constater exactement l’inverse de ce que vous avancez, notamment en matière de sanctions et d’interopérabilité.promusic : Avec les DRM et les MTP n’y a-t-il pas risque, à terme, de disparition de la copie privée ? Comment sauvegarder cette pratique qui est essentielle sur le plan culturel et social mais aussi, qui est un levier
économique de la filière musicale ?



Premièrement, nous sommes ?” quant à nous ?” très favorables à l’exception pour copie privée et la loi la préserve expressément, ce qui est positif. Deuxièmement, les DRM ou MTP ne concernent qu’une partie limitée des
supports ou services de musique en ligne puisque le répertoire mondial existant jusqu’à ce jour va rester disponible à l’ensemble du public sur les milliards de CD et DVD existants ainsi que sur les milliers de stations de radio et de télévision qui
diffusent à travers le monde.mmu_man : Pourquoi, sous le prétexte de défendre le droit d’auteur, devrait-on attenter aux droits de certains auteurs, les auteurs de logiciels comme moi ? La loi DADVSI veut imposer des DRM dans les logiciels. C’est un
discours d’Etat, ça ne se fait plus, même à l’Est. Cette loiI interdit de publier un logiciel de contournement. C’est une atteinte à mon droit de divulgation en tant qu’auteur et à ma liberté d’expression.



Nous sommes nous tout à fait favorable à la défense du droit d’auteur pour tous à la condition de préserver celui des autres.on.est.en.finale.!!! : La nouvelle réglementation sur la copie privée va-t-elle imposer une autre taxe sur les disques durs et lecteurs MP3 (sur quels composants et matériels informatique exactement ?) ?


Il n’y a aucune réglementation sur la copie privée. Simplement, l’adoption et la révision à intervalles réguliers du niveau des redevances applicables aux divers supports en fonction de la réalité des pratiques de copie privée. A cet
égard, vous avez pu constater il y a quelques mois que la redevance sur l’iPod Nano est passée de 43 euros à 8 euros.Guest10 : Le groupe socialiste dépose un recours devant le Conseil constitutionnel. Si celui-ci parvient à ses fins, la DADVSI ne sera pas promulguée. Quelle sera votre réaction ?


Attendons de voir ce qui se passe avant de pouvoir réagir.teddy : Oui à l’interopérabilité, mais comment comptez-vous faire pour faire face aux fabricants qui pèsent des milliards ? Ne sentez-vous pas que c’est une bataille perdue d’avance ?


Ceci n’est pas dans ma sphère de compétence et il appartiendra à la puissance publique de faire respecter la loi adoptée.DragoonMaster : En quoi un logiciel dit de P2P est illégal ?


Un logiciel n’est illégal que s’il est manifestement destiné à favoriser les échanges illégaux.Erell : Pensez-vous que les sanctions seront suffisamment dissuasives ? Certains téléchargent des centaines de fichiers depuis des années, la peur de l’amende va-t-elle modifier leur comportement ?


Votre question est pertinente et nous attendons avec impatience et vigilance le contenu des décrets d’application concernant la mise en ?”uvre des sanctions. Ceci devrait avoir un effet sur le comportement des utilisateurs.ganesh : Comment les ayants droit récupéreront l’argent récolté par la batterie d’amendes incluses dans la loi DADVSI ? Et comment la création musicale sera-t-elle assurée avec cette perception via l’Etat ?


Pour l’heure, les amendes tombent dans la poche de l’Etat pas dans celle des créateurs. Ceci étant, nous avons la possibilité d’aller devant les tribunaux pour obtenir des dommages et intérêts pour les auteurs. Nous espérons que ceux qui
aiment la musique comprendront enfin qu’il est nécessaire de rémunérer les créateurs pour pouvoir continuer à bénéficier de leur talent.4u2é1*3^ : L’amende de 38 euros s’applique-t-elle au fait de télécharger ou par fichier téléchargé ?


Cela sera défini par les décrets d’application dont nous attendons de connaître le contenu dans les mois à venir.Michaël Goldberg : Le téléchargement ne s’arrêtera pas. Les mesures de répression seront inefficaces. C’est ce qui se passe actuellement aux USA. N’était-il pas préférable d’intégrer le peer-to-peer dans un
nouveau modèle économique ? Que comptez-vous faire en cas d’échec complet de cette législation ?



Nous ne sommes pas contre le peer to peer, bien au contraire, dès lors, comme cela paraît possible, qu’il s’intègre dans un système légal et rémunéré. Nous serons toujours prêts à réexaminer la situation en fonction de
l’évolution des pratiques, des règlements et des moyens techniques. Mais nous avons clairement pris position contre la licence globale dans la mesure où elle aurait figée toute possibilité de développement de services de musique en ligne
(peer to peer légal, fnac.com, virginmega.fr…) ou de téléphonie mobile.zeus : Pénaliser le contournement des mesures techniques de protection d’une ?”uvre revient à l’époque où copier de la musique sur une cassette était illégale. L’exception à la copie privée est arrivée. Pourquoi
n’applique-t-on pas cette notion au téléchargement, etc. ? La DADVSI plombe la manne financière que peut percevoir la copie privée et la redistribue au lieu de ça en amendes pour l’Etat…



Je pense que vous faites une confusion entre ‘ rémunération pour copie privée ‘, qui reste autorisée dans les limites qui seront fixées par l’autorité de régulation des mesures techniques, et
‘ contournement des mesures techniques ‘ qui sont reconnues par la loi et imposées par la directive européenne. Le téléchargement sur un site légal est un acte soumis à rémunération et toutes les copies ultérieures relèvent
de la copie privée. C’est ce qui est prévu dans toutes les autorisations données par la Sacem aux services de musique en ligne.Mag : Les FAI sont-ils acteurs dans le débat DADVSI ?


Naturellement, car les FAI devront offrir des systèmes permettant à leurs abonnés de filtrer les réseaux de peer to peer illégaux. Et à ce titre, ils auront une responsabilité directe dans les échanges
illégaux.-nF4Me : Un créateur a-t-il le droit de mettre à disposition ses ?”uvres sur son site perso ou son blog (notamment par rapport à l’arrivée de myspace en Europe, sur lequel on peut mettre des musiques et des vidéos à
disposition pour l’écoute ou le téléchargement) ?



La Sacem offre à ses sociétaires la faculté d’obtenir des autorisations gratuites pour la diffusion de leurs ?”uvres en streaming sur leurs propres sites.Laurent fery : Qu’est-il permis de faire en podcast en respectant le droit d’auteur, on voit fleurir des programmes musicaux en podcast, y-a-t-il là un vide juridique ?


Nous sommes en négociation actuellement avec les différentes sociétés de radio et de télévision qui offrent des podcasts afin de les légaliser.Capitaine Caverne : La Sacem et les organismes de contrôle ont-ils vraiment les moyens de lutter contre les nouvelles formes de pirateries et d’échanges de fichiers anonymes (newsgroups, torrents, freenet, ftp, boards de
warez…) ?



La loi devrait permettre demain d’aller dans ce sens et nous espérons que les moyens mis à disposition de la puissance publique permettront de réguler les échanges sur Internet.Gloom : Rendre obligatoire la mise en place de DRM a pour effet collatéral de bannir l’utilisation des logiciels libres. Cela vous semble négligeable ?


La mise en place des DRM n’est en aucun cas obligatoire, c’est leur contournement qui est illégal. Les logiciels libres ne sont pas concernés sauf lorsqu’ils contribuent à contourner les DRM mis en place.mmu_man : Faites-vous la différence entre un ‘ hacker ‘, un ‘ pirate ‘ etun internaute qui télécharge sans s’acquitter des droits ? Il semble que même le rapporteur
Vanneste et le ministre Donnedieu de Vabre ne la faisaient pas.



Le régime des sanctions fait la différence entre le type d’infraction selon qu’il s’agit d’un simple téléchargement, du contournement des mesures techniques ou de la mise en ?”uvre d’un logiciel favorisant les échanges illégaux. Il n’y a
pas lieu de définir l’infraction en fonction du nom qu’on veut bien lui donner (hacker, pirate). Seul l’acte compte.Capitaine Caverne : La loi DADVSI stipule que contourner un DRM est passible d’une amende de 300 000 euros et d’une peine de prison. Le fait d’enregistrer un morceau bloqué par un DRM sur un autre support et de le
réenregistrer sous forme de MP3 sans MTP rentre-t-il dans ce cadre ?



Un, l’amende prévue pour le contournement de DRM n’est pas de 300 000 euros, mais de 3 750 euros ou de 30 000 euros si l’on en fait une activité habituelle et commerciale. Deux, le principe d’interopérabilité
devrait permettre de copier sur divers supports, ceci relevant de l’exception pour copie privée.Laurent fery : Je ne parle pas de podcasts proposés par des radios mais directement par des DJ avec des titres de tout répertoire. Si cela est permis, il deviendrait possible à toute personne de créer ses propres émissions.
Ce qui est très intéressant. Ensuite au public de plébisciter un programme.



La Sacem donne déjà des autorisations depuis longtemps pour des sites personnels et fera de même pour des podcasts mis en place par des particuliers et qui utiliseraient des ?”uvres protégées.Mag : Que pensez-vous de la manipulation dont vous accusent les grandes sociétés de production, comme Apple ?


De quelle manipulation s’agit-il ?Capitaine Caverne : La Sacem propose-t-elle une alternative aux Creative Commons pour permettre à un compositeur de faire la promotion d’une ?”uvre sur Internet ? Et est-il possible de déposer à la Sacem
une ?”uvre déjà sous licence/contrat Creative Commons ?



Nous avons d’ores et déjà une alternative aux Creative Commons puisque il y a des autorisations gratuites accordées à plus de 250 auteurs/compositeurs de la Sacem pour leurs sites personnels. Ceci leur permet de promouvoir leurs
 ?”uvres tout en les protégeant sur le long terme, notamment en cas de succès car ils peuvent en recouvrer l’entière propriété contrairement à ce qui se fait avec Creative Commons.


Concernant votre deuxième question, vous pouvez adhérer à la Sacem en lui confiant certains droits mais il est évident que si vous les avez exclus pour Internet, ils ne pourront pas être protégés à l’avenir.Gloom : Votre doigt d’honneur n’avait en rien fait changer le comportement des internautes que l’on sache ?


Je tiens à affirmer que la Sacem n’a jamais adhéré ni soutenu cette campagne de publicité qu’elle a trouvé regrettable.DragoonMaster : Certains artistes vivent du téléchargement de leurs albums, qu’en pensez vous ?


Lesquels ? De quels artistes parlez-vous ?DragoonMaster : Ne craignez-vous pas un boycott de l’achat des différents supports multimédias, tant CD audio que DVD ?


Non, car je pense que ceux qui aiment la musique continueront à acheter des CD, des DVD où à télécharger légalement. Car c’est le moyen de permettre aux artistes qu’ils aiment de vivre de leur art et de continuer à créer.denis : Pour vendre de la musique que l’on crée sur Internet, on nous demande des codes isrc et ean. Pour les obtenir faut-il être une structure commerciale ? L’avenir de la création musicale est-il toujours
bloqué ?



De manière à pouvoir rémunérer les divers ayants droit, il importe de disposer des éléments d’informations permettant de les reconnaître. Le code isrc est celui développé par les producteurs de disques mais d’autres solutions sont en cours
d’élaboration. L’avenir de la création musicale dépend avant tout de la possibilité et de la faculté d’en vivre des créateurs.jobi : Pensez-vous que la brèche ouverte par Internet, sur le choix du pays d’hébergement du site et le paiement des droits inhérents dans le pays hôte, soit extensible à d’autres types de diffusions publiques ?


Les ayants droit restent maîtres des conditions dans lesquelles leurs ?”uvres sont utilisées ou diffusées et n’importe quel site est dans l’obligation d’en tenir compte où qu’il soit situé. Il y a une différence entre les services comme
Internet qui sont à diffusion multinationale et les opérateurs traditionnels qui diffusent sur une base nationale et doivent obtenir leur autorisation dans leurs pays d’exploitation.Merci beaucoup Bernard Miyet, le mot de la fin ?


Continuez à aimer la musique et pour cela continuez à respecter les créateurs. Et en toute hypothèse, nous souhaitons poursuivre le dialogue afin de toujours trouver un juste équilibre entre la liberté des citoyens et la juste rémunération
des créateurs. A bientôt et bonnes vacances et vive l’équipe de France.

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La rédaction