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Benoît Flamant (Asset) : ‘ L’arrivée de la voix sur IP aura des conséquences considérables ‘

La téléphonie sur IP s’annonce comme une prodigieuse révolution, curieusement relativement mal comprise de ceux qui s’intéressent à nos technologies. Benoît Flamant, investisseur observateur de notre milieu, nous en rappelle les
principes et souligne les enjeux de cette technologie.

Electronique International Hebdo : Beaucoup d’observateurs mesurent mal les enjeux de la téléphonie sur IP. Comment l’expliquez-vous ?Benoît Flamant : La téléphonie sur IP (Voice over IP ou VoIP) est un ensemble de technologies qui permettent de transporter le trafic téléphonique sur des réseaux de données à paquets utilisant
le protocole IP. VoIP est de fait la première alternative réelle aux réseaux traditionnels de téléphonie, qui utilisent une technologie dite de commutation de circuits vieille de plus de 100 ans.En quoi la problématique change-t-elle aujourd’hui ?Depuis longtemps, les opérateurs de réseaux rêvent d’unifier les différentes technologies de réseaux afin de réduire leurs coûts. Les grandes entreprises, et encore plus les opérateurs télécoms, doivent en effet vivre avec une
superposition de réseaux, fruits des investissements passés, TDM, X25, SNA, Frame Relay, ATM, IP pour ne citer qu’eux. Tout unifier sur une seule technologie, IP, promet d’énormes réductions de coût. Pourquoi donc assistons-nous seulement maintenant
à l’explosion de la téléphonie sur IP ? Il y a deux facteurs : l’un est technologique, l’autre tient à la déréglementation.La téléphonie sur IP est-elle une killer application ?La téléphonie IP n’apporte pas de valeur ajoutée d’un point de vue métier. Pour l’utilisateur, un appel téléphonique sera toujours un appel téléphonique… La téléphonie sur IP n’est donc pas une killer
application
en ce sens qu’elle n’offre rien de nouveau. Les sociétés impliquées cherchent bien à vendre de nouvelles applications telles que messagerie unifiée (visualiser sur un même écran de PC les messages e-mails, téléphoniques et
fax), numéro unique (pouvoir faire suivre ses appels et les rediriger sur un numéro d’hôtel, personnel ou de mobile pour être joignable en permanence), transfert d’appel, vidéo-conférence, etc.L’impact ‘ marché ‘ sera-t-il tout de même important ?Deux marchés sont principalement concernés : le marché entreprises des autocommutateurs (PABX) et celui des équipements pour opérateurs. Les autocommutateurs sont utilisés par les entreprises pour gérer leur trafic téléphonique
interne. Ce marché est dominé par Alcatel, Avaya (anciennement Lucent), Nortel et Siemens. Ces sociétés ont eu largement le temps de modifier leur offre d’autocommutateurs, qui gèrent maintenant simultanément la téléphonie classique et la téléphonie
sur IP. En même temps, de nouveaux acteurs, avec une offre pure IP, apparaissent : Cisco, 3Com…Cette téléphonie sur IP n’est-elle pas une catastrophe pour les opérateurs qui vont devoir baisser leurs tarifs ?La téléphonie sur IP, une fois passé un point de non-retour, est très dangereuse pour les opérateurs. C’est tout le concept totalement artificiel de facturation en fonction de la distance et de la durée qui est en jeu. Les abonnés à
ADSL, peuvent déjà téléphoner pour un coût ridicule. Les fournisseurs d’accès Internet peuvent, à faible coût (à la condition qu’ils possèdent leur réseau), augmenter leur chiffre d’affaires généré par abonné. C’est un jeu gagnant-gagnant sauf pour
l’opérateur traditionnel. Soit ce dernier laisse faire et perd des parts de marché en tant que fournisseur d’accès Internet, soit il contre-attaque et accélère la cannibalisation de son activité principale, la plus rentable.

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Jean-Pierre Della Mussia