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Autrans s’insurge contre une crise de croissance du Web

La sixième édition des rencontres sur l’Internet, organisées à Autrans dans le Vercors, s’interroge sur les usages du Net. Plutôt que de crier à la crise des connectés, les participants veulent comprendre comment les premiers utilisateurs se sont appropriés l’outil.

” La perception d’une crise de croissance au niveau mondial de l’Internet est totalement erronée. En France, on recense environ 15 millions d’utilisateurs, et les chiffres continuent de croître. Ce qui est arrivé à épuisement, ce n’est pas le nombre d’internautes mais c’est la vision homogène qu’on avait des usages de l’Internet. “Daniel Kaplan, délégué général de la Fing, Fondation Internet nouvelle génération, et vice-président de l’Internet Society, replace ainsi le débat de l’évolution de l’Internet sur la pertinence de son utilisation par les internautes. ” Quand on parle de soi-disant crise, on évoque soit le cas américain, soit l’élite des utilisateurs d’Internet “, confirme Christine Schwartz, directrice de l’innovation de France Télécom.Même si nombre de participants d’Autrans évoquent les arguments du coût trop élevé de la connexion au Web, du peu d’offres d’accès à haut débit ou encore de la disparition de plusieurs fournisseurs d’accès gratuits pour expliquer un certain ralentissement des candidatures d’internautes au courant de l’année 2001, tous s’intéressent d’abord aux usages réels faits de l’Internet.

Le Net a été promu pour ce qu’il n’était pas

Le message d’Autrans est clair : avec le petit recul dont disposent les observateurs du Net, il est temps de remettre les pendules à l’heure. Car le décalage a été de taille. “On a survendu aux futurs internautes des services qui ne les intéressaient pas forcément, explique Daniel Kaplan. Le Web en tant que canal de vente ou en tant que source d’information mondiale sont deux arguments qui ne correspondaient à aucune réalité !”Alors qu’au tout début de l’Internet, il était de bon ton de dire que ce nouvel outil allait favoriser l’isolement et la désociabilisation, on se rend compte aujourd’hui que ce sont les usages de communication et de mises en relation qui explosent. ” On est dans le schéma classique des usages projetés qui diffèrent des usages réels. On se rend compte aujourd’hui qu’Internet n’est pas à proprement parler un média. Les services de mise en relation sont aujourd’hui très sollicités par les internautes “, explique le sociologue Patrice Flichy.Chats, mails, jeux en réseaux, échanges de fichiers sont d’abord et avant tout sollicités par les internautes d’aujourd’hui. ” Internet est plébiscité en tant qu’instrument de communication. C’est d’ailleurs ce qui explique la féminisation, particulièrement sur la tranche 18/25 ans, des utilisateurs du réseau “, remarque Christine Schwartz.

Les usages mal compris par le marketing

Une autre surprise des opérateurs a porté sur les offres haut débit. Alors que tout le monde s’attendait à voir exploser les téléchargements ou la connexion sur des sites à forte valeur ajoutée multimédia, ils ont été étonnés de constater que les internautes appréciaient essentiellement le fait de laisser l’ordinateur connecté en permanence ” comme l’eau courante sur l’évier “, lance un participant.La réflexion d’Autrans est symptomatique : l’Internet en est à une seconde phase, à celle de l’appropriation, nécessairement plus lente, de l’outil par ses usagers. Un phénomène qui échappe nécessairement aux marketeurs. ” Plus l’Internet se développe, plus il entre dans l’intime. Nous assistons à un phénomène d’adoption plus personnelle, plus communautaire. Et il n’est pas possible d’expliquer ou d’anticiper l’utilisation d’un outil intime “, souligne Daniel Kaplan.” A nous tous de créer des relais Internet dans les écoles, dans les communautés mais aussi d’assurer en local le développement du haut débit. Afin que tout le monde ait justement accès à un confort d’usage. “

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Laure Deschamps