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Apple impose la vertu à ses fournisseurs

En publiant pour la première fois un rapport sur ses fournisseurs, Apple entend montrer qu'il prend au sérieux les critiques qui lui ont été faites sur les droits et les conditions de travail des milliers d'ouvriers en Asie.

L’écart entre l’image lisse et policée des produits Apple et la réalité des conditions de leur fabrication a souvent été décrié. Alors qu’une usine de Foxconn a évité de justesse une vague de suicides collectifs la semaine dernière sur une chaîne de production de Xbox 360, de Microsoft, Apple vient de publier, pour la première fois de son histoire, un rapport sur la responsabilité de ses fournisseurs, qui comportent un état résumé de ses exigences en la matière et de la situation « sociale » et humaine dans les usines où sont fabriqués ses produits.

Améliorer la situation

La société de Cupertino a non seulement dévoilé la liste des entreprises avec lesquelles elle travaille. Au nombre de 156, ces partenaires représentent 97 % des dépenses d’Apple pour la fabrication des produits à la pomme. Mais elle a également expliqué dans ce rapport de 27 pages sa politique d’audits, ses programmes d’éducation et d’apprentissage de langues, du droit du travail, etc. Au rang de ses principales préoccupations demeurent la garantie de ne pas employer de personnes mineures, le respect d’horaires de travail qui ne soient pas excessifs, le respect de devoirs sociaux et environnementaux par les fournisseurs, etc.

Par ailleurs, Apple a annoncé avoir été la première société de haute technologie à être acceptée au sein de la Fair Labor Association (FLA) en tant que « société participante ». Une association  chargée de protéger les droits des travailleurs et leurs conditions de travail à travers le monde. Cela signifie que les fournisseurs d’Apple seront audités indépendamment par l’association, que les résultats de ces audits seront publiés librement sur le site de la FLA et qu’Apple devra se conformer aux exigences de l’association dans les deux ans.

Encore du chemin

Pour autant, même si on croit volontiers Apple et si on salue sa volonté d’assurer de bonnes conditions de vie et de travail à ceux qui font sa fortune, le chemin semble encore long si on compare la situation dressée à grands traits dans ce document avec ce qui est la norme en France. Si les chiffres ne sont pas toujours explicites et s’il est très difficile de les comparer à ceux d’études menées en France, notamment, on lit que certaines usines (99 sur 156 ?, le document ne le précise pas) tournant pour Apple n’étaient pas aux normes de sécurité anti-incendie.

Ce qui est assez effrayant quand on connaît la taille de ces usines, véritables villes. Sur un autre point, les 229 audits menés par Apple en 2011 révélaient que 65 % seulement des pratiques en matière de protection contre les blessures au travail étaient conformes aux exigences d’Apple, qui se calent sur les standards de l’Organisation internationale du travail, reconnue par l’ONU. Préoccupant, car réel témoin d’une volonté productiviste, la défaillance, à en croire le rapport d’Apple, provient souvent de l’encadrement. Ainsi, seulement 52 % du système de management était opérationnel pour appliquer les règles d’ergonomie au travail préconisées par Apple.

Dans des domaines plus risqués, la conformité avec les exigences de Cupertino est plus élevée. Ainsi, dans 86 % des cas, la prévention contre les risques chimiques était toutefois conforme. Bref, Apple joue la carte de la transparence. Vu les contraintes qu’elle impose à ses fournisseurs, ce n’est a priori pas pour se défausser de ses obligations, mais bien pour améliorer son image et éviter les attaques.

Après avoir « nettoyé » ses produits et les avoir fait passer du rôle de mauvais élève à celui de modèle en terme d’écologie, Apple s’attaque à l’autre point noir de son image : celui d’un exploiteur des temps modernes. La firme de Cupertino marche ainsi dans les pas de Nike, membre fondateur de la FLA. Fera-t-elle des émules ?

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Pierre Fontaine