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2001, l’odyssée d’IBM

Depuis quelques semaines, une publicité provoque des murmures d’étonnement et d’incompréhension dans les salles de cinéma : entre un spot pour un parfum et un autre pour du pop-corn caramélisé, un long clip sur fond de musique éthérée vante le pouvoir apparemment sans limites d’un cube noir. Par Jean-Baptiste Dupin.

Référence explicite à l’étrange monolithe de 2001, lodyssée de l’espace, ce cube est de tous les pays et de toutes les époques, impénétrable et omniscient. Il est la ” boîte magique “. C’est un serveur Netfinity d’IBM. La chute est brutale, mais l’objectif est clair : un serveur devra être IBM comme l’e-business est IBM.


Si IBM s’adressait à un public totalement hermétique à la notion de serveur, ce spot n’aurait pas de raison d’être. Promouvoir un serveur dans une salle de cinéma, c’est donc partir du principe que ce mot aura un impact sur des cinéphiles. Dans 2001, le lien entre le monolithe et l’ordinateur HAL ?” codage enfantin d’IBM ?” restait mystérieux. En apportant une réponse ?” Netfinity, alias IBM, alias HAL, est le monolithe ?”, IBM retourne habilement le propos d’un film qui mettait en cause le pouvoir des machines. IBM n’a pas oublié l’aphorisme de François Truffaut, selon lequel les Français avaient deux métiers : le leur et critique de cinéma. En jouant directement sur la culture cinéphile du public, IBM entérine le fait qu’ils en ont désormais un troisième : informaticien. Peu importe, alors, que personne dans la salle ne soit susceptible d’acheter un serveur. Il suffit que la cible se sente concernée pour que la campagne de sensibilisation porte ses fruits.


IBM, fragilisé dans sa suprématie par l’essor de la micro dans les années 80, est redevenu le géant qu’il était, car le monde parle désormais ?” ou à nouveau ?” son langage. Le PC (Personal Computer) fut le symbole des années 80 et de leur égoïsme. Aujourd’hui, il n’est plus question que de réseaux. Ces spectateurs confortablement installés dans leurs fauteuils rouges sont peut-être allés voir Matrix. Ce matin, ils se sont connectés. Toute la journée, ils ont enregistré leurs données sur le disque réseau “, surfé sur le ” réseau des réseaux ” et ont dû s’accommoder des ” erreurs réseau “. Ils n’ont plus d’amis, mais un ” réseau de relations “, auquel ils restent connectés avec leur téléphone mobile. Derrière ces réseaux, des serveurs. Et derrière ces serveurs, IBM. Ce qui semblait un clin d’?”il amusant est en réalité un constat glacial : 2001 arrive, Stanley Kubrick est mort, HAL a gagné, IBM est partout.Prochaine chronique le 13 avril

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Jean-Baptiste Dupin, journaliste