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Voiture à hydrogène : la route est encore longue

Sur le papier, la pile à combustible est la solution idéale pour l’environnement. Mais les défis sont nombreux et les coûts beaucoup trop élevés pour envisager une commercialisation avant 2015.

Rouler en voiture sans polluer, tout le monde en rêve. Dans les labos, la solution existe ! Elle consiste à remplacer le moteur à essence par une pile à combustible. L’hydrogène stocké dans le réservoir est mélangé à de l’oxygène
tiré de l’air ambiant. S’ensuit la production de chaleur, d’un peu d’eau et, surtout, de courant électrique.En Europe, aux Etats-Unis, en Chine et au Japon, de nombreux prototypes sont opérationnels. En France, le plus abouti s’appelle Genepac. Codéveloppée par le Commissariat à l’énergie atomique (CEA) et PSA Peugeot Citroën, cette pile a
été dévoilée au Mondial de l’automobile dans un concept-car, le coupé 207 Epure. Genepac génère une puissance maximale de 80 kilowatts, de quoi largement motoriser une voiture ! Hélas, la commercialisation à grande échelle
n’est pas pour demain. ‘ En voyant des prototypes qui roulent, on pourrait croire qu’ils sont prêts. Seulement ces véhicules coûtent très cher et ne sont pas encore suffisamment fiables pour le grand
public ‘,
explique Nicolas Bardi, chef du programme Pile à combustible du CEA. ‘ Le kilowatt délivré par notre pile coûte entre 3 000 et 4 000 euros, alors qu’un moteur thermique
délivre un kilowatt à 30 euros ‘,
précise-t-il.La production en série pourrait réduire les coûts, mais insuffisamment. Selon les estimations du CEA et de PSA, il faudrait fabriquer au moins 100 000 piles pour atteindre un prix du kilowatt entre 100 et 150 euros.
‘ Pour que cela devienne raisonnable, il faudrait un kilowatt à 50 euros ‘, estime Nicolas Bardi.

Le platine, une ressource limitée

Afin d’y parvenir, les industriels cherchent à remplacer les matériaux qui constituent la pile, comme le platine indispensable jusque-là pour catalyser la réaction. D’une part, ce métal coûte deux fois plus cher que l’or. D’autre
part, les réserves mondiales ne suffiraient pas à équiper le seul parc automobile français.Autre pierre d’achoppement : la membrane qui permet l’échange des protons dans une pile à combustible. Aujourd’hui, celle-ci est constituée de polymères perfluorosulfonés de type Nafion (nom commercial donné
par DuPont de Nemours, le principal fabricant). Ce dernier coûte 500 euros le mètre carré. Or, il en faut dix par pile. ‘ Malgré des investissements énormes dans les grands labos d’électrochimie, il n’y pas
de meilleur choix ‘,
avance Thierry Alleau, président de l’Association française de l’hydrogène (AFH2).Des difficultés techniques s’ajoutent au coût de fabrication. La pile doit pouvoir s’intégrer dans le véhicule tout en satisfaisant aux normes de sécurité et aux conditions d’utilisation d’une voiture.
‘ Il faut pouvoir démarrer quand il gèle en veillant à ce que l’eau n’altère pas les composants ‘, explique Nicolas Bardi.Pour préserver le Nafion, qui se dégrade à plus de 85 ?’C, le système de refroidissement doit être plus performant que celui d’un moteur à essence, qui fonctionne à 100 ?’C. Le réservoir de l’automobile doit
aussi être sécurisé. ‘ L’hydrogène est stocké sous pression, à 700 bars, ce qui permet d’en embarquer cinq kilos dans un véhicule, soit une autonomie de 500 km, mais il faut installer un réservoir en
structure composite très résistant ‘,
précise Thierry Alleau.

Vers des solutions intermédiaires

Résoudre tous ces problèmes prendra du temps. ‘ Les calendriers européen et américain sont en phase. Les premiers véhicules pourraient être commercialisés en 2015, avec une généralisation à grande échelle en
2020 ‘,
indique Nicolas Bardi. D’ici là, des solutions alternatives devraient préparer l’arrivée de la pile à combustible comme les voitures hybrides thermique/électrique (telle la Prius de Toyota) ou celles
utilisant des moteurs thermiques à hydrogène. BMW a présenté au Mondial de l’auto une limousine au moteur bicarburant (essence ou hydrogène).‘ En 2015, les voitures tireront parti d’une hybridation équilibrée entre batterie rechargeable et pile à combustible ‘, anticipe Nicolas Bardi. Avant cette date, la France devra
s’équiper de stations publiques à hydrogène. Il n’en existe pas une seule dans l’Hexagone alors que les pays les plus avancés en compte déjà une centaine.

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David Maume