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Photo : le smartphone Huawei P10 fait-il honneur à Leica ?

Depuis un an, Huawei joue à fond la carte de la photographie en mettant en avant son partenariat avec Leica. Mais que valent vraiment les nouveaux P10 ? 

La photo est l’argument phare – massue même – que Huawei met en avant dans ses terminaux haut de gamme. Sur ses sites web, ses brochures ou encore pendant ses conférences, la marque joue à fond la carte du smartphone « appareil photo ». Pour donner du crédit à son message, le géant chinois s’est allié fin 2015 à la prestigieuse entreprise allemande Leica, réputée pour la qualité de ses optiques et pour avoir marqué l’industrie photographie et l’histoire avec ses célèbres M télémétriques.

À lire : Test du Huawei P10 Plus: le smartphone grand, beau et fort

La première fournée estampillée Leica est arrivée sur nos bureaux début 2016 avec le P9 et le Mate 9, deux terminaux estampillés « Leica Summarit » du nom d’une gamme optique célèbre. Mais l’interface logicielle du terminal (police de caractère, logotypes) et l’homogénéité de l’optique étaient bien les seuls éléments qui sentaient la « Leica’s touch » : 7e de notre top 10 des meilleurs photophones, le Mate 9 ne nous a pas laissé un souvenir mémorable, largué par les Apple, Samsung et autres. Un an après, les P10 et P10 Plus apportent-ils des évolutions notables et méritent-ils, enfin, le sceau de Leica ?

Deux terminaux, deux optiques

Adrian BRANCO / 01net.com – Huawei P10 Plus
A.B. / 01net.com – Huawei P10

Les deux versions du P10 partagent les mêmes capteurs et la même focale de 27 mm (en équivalent 35 mm). Ce qui ne veut pas dire que les blocs optiques sont similaires : la version normale intègre une optique Summicron ouvrant à f/2.2 tandis que la version « Plus » profite d’une optique plus lumineuse estampillée « Summilux » et ouvrant à f/1.7.

En photographie, l’ouverture notée « f/x » est « le rapport de la focale f au diamètre d de la pupille d’entrée ». En clair, la capacité du diaphragme à s’ouvrir le plus grand possible. Plus la valeur notée après f/ est petite, plus l’optique laisse rentrer de lumière. Selon cette échelle logarithmique, l’optique du P10 Plus laisse donc rentrer deux fois plus de lumière que celle du P10. Un avantage clé dans les basses lumières et pour obtenir des arrière-plans flous.

01net – Huawei P10
01net – Huawei P10 Plus

On voit ainsi sur les deux captures ci-dessus que les deux modules caméras réagissent différemment face à la même scène : sur la version « normale » du P10, le logiciel sélectionne une vitesse d’obturation de 1/17 de seconde et 800 ISO avec son optique à f/2.2 tandis que le « Plus » et son optique à f/1.7 permettent au logiciel d’accélérer un peu la vitesse – 1/20e – et de limiter la montée en sensibilités à 640 ISO.

Huawei persiste sur la caméra de soutien

Les P10 disposent, comme chez le Mate 9 sorti l’an dernier, de deux modules caméras d’un bloc optique grand angle 27 mm plus ou moins selon le modèle comme nous l’avons vu. Le module caméra principal est équipé d’un capteur « normal » de 12 Mpix (capteur CMOS BSI), tandis que le second est un capteur de 20 Mpix dépourvu de matrice colorée– il voit en noir & blanc, en somme.

Huawei utilise ce second capteur de deux façons : pour améliorer la qualité des clichés noir & blanc et diminuer le bruit numérique en basses lumières à la manière d’un Leica M Monochrom. Mais aussi pour améliorer le mode portrait : le premier capteur enregistre l’image tandis que le second capteur mesure la distance aux différents sujets, les informations passant dans une moulinette logicielle afin de recréer un arrière-plan flou se rapprochant le plus possible du reflex.

Dans le cas du portrait, le rendu est loin, très loin de ce que proposent Apple et le second module caméra 56 mm f/2.8 de son iPhone 7 Plus. La focale plus resserrée de l’iPhone 7 Plus compresse mieux les perspectives, renforce la présence du sujet, évite les déformations du visage. Quant aux flous d’arrière-plan, il est clair que les algorithmes de génération sont (bien) meilleurs chez Apple, puisque le rendu est plus progressif et plus réaliste – même s’il reste toujours imparfait selon les scènes.

Et que dire de l’argument noir & blanc ? Sans crier à la fumisterie, nous sommes loin d’être séduits. D’une part, l’accès au module 20 Mpix monochrome ne fonctionne qu’en Jpeg. En effet, si vous vous mettez en mode « Pro », la sélection d’un rendu noir & blanc est impossible. Et si vous sélectionnez un mode monochrome puis basculez en mode pro, l’appareil bascule en couleur. C’est bête : avec un bon RAW 20 Mpix issu d’un capteur monochrome, on se prend à rêver à shooter à 1600-3200 ISO tout en étant capable de traiter efficacement le bruit numérique.

Quant à parler du rendu monochrome en Jpeg, il nous semble que n’importe quel bon logiciel – VSCO, Snapseed – est tout à fait à même de générer d’aussi bons rendus avec… un Galaxy S7.

Ergonomie de l’interface à revoir

La police de caractère Leica est jolie. C’est un fait. Mais bon sang que l’ergonomie logicielle du P10 est agaçante : entre les volets qui ne fonctionnent qu’en mode portrait (pour modifier un paramètre quand on tient son téléphone à l’horizontale il faut d’abord le remettre à la verticale !), les icônes mal choisies (celle du rendu des couleurs fait penser à la vidéo), l’organisation générale des options est bien moins pratique que celles des Samsung et consorts, sans parler de la simplicité des iPhone. Si on comprend – et on apprécie – le parti pris d’aller au-delà de ce que propose l’iPhone, la réalisation est bancale.

Autofocus toujours un peu en retrait

En ce qui concerne la rapidité de l’autofocus, rien ne semble avoir évolué depuis les P9/Mate 9 : c’est très correct mais le déclenchement souffre parfois de temps de latence difficiles à expliquer. En basses lumières c’est le même constat, le P10/P10Plus reste inférieur à l’iPhone et bien inférieur au Galaxy S7, champion du genre. La rafale quant à elle est certes performante, mais elle se limite à 100 clichés consécutifs. Quand l’iPhone 7 permet une rafale certes moins véloce, mais largement suffisante et complètement illimitée.

Partenariat en cours de gestation

Adrian BRANCO / 01net.com

Alors mauvais le P10 ? Non, le rendu des couleurs est très agréable, l’optique très homogène (pas de faiblesses sur les bords de l’image) et il tient sans peine dans notre top 10…. Mais dans le bas du tableau. Est-ce à dire que l’histoire autour du partenariat avec Leica n’est que du flan ? Pas du tout : il est certain que les ingénieurs de Leica collaborent avec ceux de Huawei et qu’ils valident certains cahiers des charges. Mais les deux marques sont loin d’être à plein régime. Et pour cause : le centre de recherche commun situé dans le Leitz Park, siège de Leica à Wetzlar, est en cours de construction et ne devrait pas être opérationnel avant 2018. Autant dire que d’ici là, les terminaux Huawei ne profiteront pas pleinement du savoir-faire de la marque allemande.

Huawei – Campagne de publicité Huawei pour le P10 avec Antoine Griezmann, très connu pour ses talents de photo… pardon, de butteur.

D’ici là, vous savez que les arguments de Huawei quant à son « studio photo mobile » tiennent plus du matraquage marketing qu’à une vraie domination technique. Mais si le chinois met autant d’argent dans sa R&D que dans ses campagnes de communication, il pourrait peut-être progresser rapidement. Espérons-le pour eux…

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