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Test : Leica M Monochrom, le boîtier fou qui voit la vie en 50 nuances de gris

Objet superbe, le M Monochrom est un appareil unique dans son approche, le genre de boîtier qu’on adore ou qu’on déteste.

L'avis de 01net.com

Leica Monochrom (Typ 246)

Qualité photo

4 / 5

Qualité vidéo

3 / 5

Réactivité

1.5 / 5

Ergonomie et finition

4 / 5

Appréciation générale

4 / 5

Autres critères et mesures

3.5 / 5

Note de la rédaction

Note publiée le 08/07/2015

Voir le verdict

Fiche technique

Leica Monochrom (Typ 246)

Monture (baïonnette) Leica M
Format de capteur Plein format 24 x 36
Définition du capteur 24.1 Mpx
Type de capteur CMOS
Sensibilité ISO min 3200
Voir la fiche complète

Leica Monochrom (Typ 246) : la promesse

Il y a deux ans, Leica commercialisait le M240, son premier boîtier de la série M à entrer de plain pied dans l’ère numérique : la montée en ISO était enfin convenable, la vidéo faisait son arrivée, le GPS (optionnel) itou et l’écran était enfin digne du nom (et du prix) de la marque allemande. Deux ans plus tard, Leica sort de son chapeau un frère bâtard du M240 : le M Monochrom. Avec ce boîtier au doux nom de code « Typ 246 », la marque de Wetzlar accouche d’un boîtier tout à la fois cinglé, puriste, exigeant, limité, etc. Un appareil clivant qui n’offre qu’une promesse : aller du noir au blanc sans jamais voir rouge.

Leica Monochrom (Typ 246) : la réalité

Sur le papier l’équation paraît simple : on retire la matrice colorée placée devant chaque photosites – ces puits de lumière improprement appelés pixels – et on obtient des « pixels » qui récoltent une quantité de lumière qui va du noir au blanc. En pratique tous les programmes internes des appareils photo sont programmés pour voir en couleurs, toutes les routines d’analyse d’image ont l’habitude de faire des moyennes de ces couleurs : les ingénieurs allemands ont donc dû réécrire un code pour évaluer la lumière différemment.

Filtre coloré mis à part, le « M Monochrom » est un M, un vrai, avec réglages des vitesses manuel plus une vitesse automatique (paramétrable), l’ouverture et la mise au point à gérer à la « mano », un viseur télémétrique et la joie d’avoir le look de Robert Capa un jour de pluie en Normandie. Les chasseurs de couleurs passeront leur chemin, le Monochrom n’a d’yeux que pour les contrastes.

En passant, vous pouvez regarder et télécharger les photos en pleine définition sur notre album Flickr. Nous avons mis les Jpeg originaux et leur frères jumeaux développés sous Lightroom.

RAW le beau fichier

Comme tout boîtier numérique qui se respecte, le Monochrom sort aussi bien des RAW que des Jpeg. Au cas où vous n’avez rien suivi, on vous le répète : vous ne retrouverez AUCUNE information colorée dans les fichiers RAW. Si les boîtiers classiques peuvent produire des images jpeg en N&B avec leur capteur couleur, le Monochrom ne VOIT PAS ces couleurs.

Travaillés, les RAW offrent une excellente plage dynamique et beaucoup de matière, notamment dans les nuages (recadrage 100% ci-dessous).

« Mais à quoi servent alors les fichiers RAW en noir & blanc ? ». A profiter d’une plus grande plage dynamique pour interpréter les contrastes et créer des ciels plus dramatiques et des ambiances plus rock & roll. Dans ce rayon, le M Monochrom est un chef pour capter les nuances de gris (ou de blanc) des nuages. Sur la photo ci-dessus et le détail d’un morceau de nuage, le résultat est tout simplement bluffant et montre l’un des rares avantages que représente un capteur noir & blanc : une perception des contrastes un cran au-dessus des capteurs colorés.

Le jpeg issu de boîtier offre un rendu très/trop doux, selon les goûts. Le fichier RAW retravaillé dévoile plus de matière et de détails (voir plus haut).

Cette latitude est la bienvenue puisque les fichiers Jpeg issus du boîtier sont un peu softs : les dégradés sont doux, les détails peu soutenus et les contrastes atténués – ou carrément mous selon votre perception. Un mélange d’Ilford HP5 Plus 400 et de Kodak T-Max 100 avec un rendu des détails plus numérique – le générateur de grain de votre logiciel de développement est votre ami.

Visée télémétrique mon amour

Comme si l’absence de couleurs n’était pas assez clivante, nous vous rappelons que tous les M sont des boîtiers à visée dite télémétrique, une visée qui date du début du XXe siècle et qui ne connaît que deux camps : ceux qui la célèbre et ceux qui l’abhorre. L’histrion qui couche ses lignes avoue en toute subjectivité son adoration pour cette visée non intrusive, à hauteur d’homme, qui permet de cadrer les yeux ouverts et d’anticiper les déplacements des éléments du cadre. Une visée qui interdit longues focales et zooms, et qui ignore le concept même de mise au point automatique. Un mode de vision exigeant qui force les photographes à se dépasser… ou à abandonner. Bien maîtrisée, la visée télémétrique permet de se concentrer sur le cadre, le cadre et le cadre. Parenthèse subjective refermée.

Hate/Love

Comme un bon vieux débat Microsoft/Apple, nul besoin de convaincre qui que ce soit : parmi les gens informés, les avis sont déjà tranchés. Si nous étions de la bande des « anti », nous pointerions du doigt le prix prohibitif de l’engin, son archaïsme technique, ses limites en noir & blanc – impossible de simuler un filtre ou de jouer sur les canaux –, ses refus technologiques (quoi l’autofocus ?).

A l’inverse, si nous jouions le rôle d’un « pro », nous soulignerions que les meilleurs artistes s’appuient sur les limites de leurs outils, que la visée télémétrique est ce qui se fait de mieux pour le reportage, que voir en noir et blanc nativement délivre d’une partie du travail informatique et que les optiques de Leica sont parmi les meilleures du monde.

Personne n’a changé d’avis dans la salle mais vous qui venez de lire avez sans doute eu la possibilité de vous faire le vôtre. Et de sans doute n’en jamais changer.

Ceci n’est pas un test

A qui s’adresse un constructeur qui ne prend pas la peine de mettre à jour un boîtier de deux ans d’âge, le condamne à une achromatopsie forcée et fait payer plus cher que pour le boîtier de base ? À des amoureux enragés du N&B c’est un fait, mais aussi à des maniaques de sa marque. Leica est, à l’instar d’Apple, une des rares entreprises à disposer d’une communauté suffisamment folle – ou passionné, choisissez votre camp – pour avoir le loisir de développer un appareil hors normes et trouver tout de même son public. Du coup si nous mettons une note, elle reflète autant l’atypisme du boîtier que les attentes du public et surtout notre plaisir d’utilisation.

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