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Patrons en disgrâce…

Dans l’Antiquité, il n’était pas rare que l’on coupât le cou aux généraux vaincus. Aujourd’hui, les grands capitaines sont ceux de l’industrie. On leur laisse la tête sur les épaules. Mais on les prive sans pitié de leur siège.

Bien sûr, le phénomène n’a rien de nouveau. Régulièrement, on apprend que tel ou tel PDG (CEO) est remercié, mais, avec le coup de froid qui s’est abattu sur l’économie américaine depuis le début de l’année, le mouvement s’accélère, touchant grandes et petites entreprises.John Roth, le PDG de Nortel, quittera ses fonctions en 2002, alors qu’il n’a pas 60 ans, et son ” dauphin “, Clarence Chandran, numéro deux, 52 ans, a soudainement démissionné. Motif : de vieilles blessures, reçues en 1997, au cours d’une agression, semblent se réveiller. Coïncidence, le triomphant Nortel des années 1999 et 2000 n’est plus que l’ombre de lui-même, affichant plusieurs milliards de dollars de pertes et licenciant 20 000 personnes.Chez Ciena, autre champion de l’optique, mais plus petit, qui affiche lui aussi des pertes, le PDG, Patrick Nettles, est remplacé par Gary Smith. Le premier devient responsable de la stratégie à terme, poste taillé sur mesure pour les patrons en disgrâce.Chez Globalstar, constellation de satellites en orbite basse, cousine d’Iridium, et qui glisse vers la faillite encadrée par le chapitre 11 de la loi américaine, le PDG Bernard Schwartz cède son fauteuil à Olof Lundberg, l’ancien patron d’ICO, autre constellation rivale de Globalstar, et qui n’a dû sa survie qu’à son rachat par Teledesic.Globalstar prétendait que, après un démarrage laborieux en 2000, la société allait pouvoir voler de ses propres ailes. En fait, elle affiche une perte de 145 millions de dollars au premier trimestre. Si Olof Lundberg a réussi à sauver ICO, sans doute les actionnaires de Globalstar pensent-ils qu’il peut aussi faire quelque chose pour eux.Arrêtons la liste pour les Etats-Unis.L’Europe semble à son tour gagnée par cette vague d’épuration. AIain Vallance, grand patron de BT, hier porté aux nues pour avoir conduit la privatisation de l’opérateur, puis, le premier, noué de hardies alliances internationales (MCI) et multiplié les participations chez les opérateurs étrangers (dont Cegetel), a été poussé dehors. BT, endetté, se replie sur lui-même ; il en est même à revendre ses immeubles et son parc automobile. Son second, Peter Bonfield, est sur la sellette et on lui reproche jusqu’à son salaire.En Allemagne, le patron de Viag Interkom, s’en va, suite à un désaccord avec la maison mère… BT.On murmure également que Kurt Hellström, PDG d’Ericsson, pourrait bien, lui aussi, céder sa place. Il est vrai que léquipementier va très mal, affichant des pertes et licenciant. Certes, la société a démenti, mais la naissance même de cette rumeur est déjà tout un symbole.Prochaine chronique vendredi 29 juin

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Jean-Pierre Soulès