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n.commerciale

Jusqu’alors, le supervendeur avait à sa disposition la liste des entreprises de votre secteur, votre numéro de téléphone et quelques données comptables. Désormais, il possède également votre e-mail. Danger !

Ambiance sombre. Vous avez passé une très, très mauvaise nuit : la bombe de Ventoline à sec en pleine crise d’asthme ; une mégacrise existentielle avec la femme de votre vie ; la gastro à répétition de votre petit dernier (rayez les mentions inutiles). Le matin, à moitié somnambule, vous êtes contacté au téléphone par un vendeur d’élite. Celui-qui-veut-absolument-vous-fourguer-son-produit. Aïe !Le propre d’un bon commercial est de sentir immédiatement si c’est son jour, quitte à rebrousser chemin habilement en vous proposant de vous recontacter dans quelques temps. Juste aux premiers mots échangés, à l’aspect pâteux de votre voix, le bon vendeur sent que vous avez passé une très mauvaise nuit. Il va même, s’il est excellent, vous souhaiter un week-end de repos, vous témoigner un peu de compassion.Le problème, c’est le commercial qui a passé, lui, une très mauvaise semaine. Quand arrive le vendredi midi, il est à bout de nerfs.Le scénario qu’il m’a joué ce matin est sommaire. L’enclume de service me dévide sa bonne parole, coinçant virtuellement son pied dans le creux de mon oreille. J’essaie, une ou deux fois, d’interrompre le robinet d’eau tiède en argumentant aimablement, malgré ma grosse envie de mordre. Finalement, ça se clôt par une rupture unilatérale des relations téléphoniques.C’était sans compter avec les représailles, le Scud sournois, l’e-mail vengeur ! J’ai ainsi reçu le message suivant : “Vu votre impolitesse, je vous souhaite de claquer sans voir vos gosses !!”Texto et signé ! J’avais simplement déclaré, avec de raccrocher au nez de mon importun, que, la vie étant trop courte, je préférais passer plus de temps avec mes mômes que de l’écouter.Ayant demandé par retour d’e-mail à ce jeune homme de s’excuser, j’ai eu le droit à une suite : “Je […] dénonce à nouveau votre non-savoir-vivre (commercial), dont vous avez su faire preuve lors de notre entretien téléphonique !! Pour ce faire, les excuses attendues doivent se faire dans l’autre sens !!”Voilà, tout est dit. Plus le droit de ” tôler ” les enquiquineurs, les casse-pieds, les raseurs ! Faut vous y faire. Et apprendre par c?”ur les nouveaux articles du ” savoir-vivre commercial ” :Article 1. Le prospect se doit d’écouter sans ronchonner toute information fournie au téléphone, quels que soient son degré de fatigue et ses occupations immédiates.Article 2. Le prospect doit manifester de l’enthousiasme et de l’intérêt pour la solution magnifique qu’on a la générosité, que dis-je, la bienveillance de lui présenter.Et pas question de déroger aux règles sous peine de se faire engueuler ! C’est bien dans l’air du temps…A l’époque de la Rome impériale, le concurrent disqualifié d’AreneStory, s’il n’était pas trop cabossé, pouvait voir les pouces des spectateurs s’abaisser avant d’être achevé. Aujourdhui, les (télé)spectateurs votent à 3,75 francs la minute et les expulsés sortent avec la couronne de laurier.

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Jean-Christophe Courte